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Citation de coco4649


Le beau hêtre


Caché au cœur de la forêt je connais un endroit où se dresse
 Un hêtre, tel qu’en peinture on n’en peut voir de plus beau.
Lisse et clair, d’un seul trait pur il s’élève, solitaire,
 Et nul de ses voisins ne touche à sa parure soyeuse.
Tout autour, si loin que cet arbre imposant étende sa ramure,
 La pelouse verdit, afin de rafraîchir l’œil en silence.
De tous côtés également elle ceint le tronc qui en forme le centre :
 La Nature elle-même, sans art, a tracé ce cercle adorable.
Des taillis délicats font une première enceinte, puis ce sont les
                                                   [hauts fûts
 D’une foule d’arbres serrés qui tiennent éloigné le bleu du ciel.
Près de la sombre épaisseur du chêne, le bouleau berce
 Sa tête virginale timidement dans la lumière dorée.
Là seulement où, jonché de roches, le raidillon dévale vers l’abîme,
 La clairière me laisse deviner l’étendue des champs.
‒ Quand, dernièrement, solitaire, séduit par les visions nouvelles
                                                   de l’été
 Je quittai le chemin et vins me perdre là dans les taillis,
Ce fut un esprit amical à l’oreille toujours aux aguets, la divinité
                                                 de ce bois,
 Qui soudain m’introduisit ici pour la première fois, moi l’étonné.
Quelles délices ! C’était aux environs de l’heure haute de Midi :
 Tout se taisait. Même l’oiseau dans le feuillage restait silencieux.
Et j’hésitais encore à poser le pied sur ce tapis plein de grâce ;
 Avec solennité il accueillit mon pas, moi qui ne le foulai que
                                               sans bruit.
Puis, une fois adossé au tronc (qui ne porte pas trop haut
 Sa large voûte), je laissai mes regards vaguer à la ronde,
Là où les rayons enflammés du soleil traçaient une frange aveuglante,
 Presque parfaitement régulière, tout autour du cercle ombragé.
Et je restai là, sans broncher ; au plus intime de moi-même tout
                                                mon être
 Épiait le démon du silence, toute cette insondable paix.
Enfermé avec toi dans le prodige de cette ceinture solaire,
Je ne sentais que toi, ô Solitude, à toi seule allaient mes pensées.
                                            (été 1842)

p.147-149
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