Un cri à glacer le sang jaillit du fond de l’étable pour se dissiper dans la nuit brûlante. Son faible écho parvient aux oreilles du jeune Norman, fils de Murdo Morrison, qui le confond avec le coassement d’une grenouille.
Alors qu’un croissant de lune jaunâtre se lève dans le ciel étoilé, le garçon de huit ans et demi avance avec prudence dans l’obscurité des bois, pressé de retourner à la fête organisée chez leur voisin Angus Gobha.
Sous un soleil plombant, Normand Sainte-Marie arrive enfin à destination. Après un interminable voyage en bus de Montréal à Sherbrooke, suivi d’un taxi exorbitant jusqu’à Lac-Mégantic, le vétéran de quatre-vingt-neuf ans aux cheveux rares sous son béret se retrouve devant la bibliothèque municipale, rue Frontenac. Une vieille serviette de cuir craqué sous le bras, il pénètre à l’intérieur, déterminé à remplir les dernières volontés de sa mère morte il y a presque quarante ans.