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Critiques de Erik Larsen (28)
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Savage Dragon on Trial

L'impunité n'est pas envisageable.

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Ce tome fait suite à Savage Dragon : Invasion (épisodes 175 à 180) qu'il faut avoir lu avant. Il regroupe les épisodes 181 à 186, initialement parus en 2012/2013, écrits, dessinés et encrés par Erik Larsen qui a également réalisé les couvertures. La mise en couleurs a été réalisée par Nikos Kutsis & Mike Toris.



Dragon se trouve à bord de l'immense vaisseau spatial nation Krylan : il est en train de discuter avec Lorella. Celle-ci lui reproche d'avoir ordonné le massacre des extraterrestres qui avaient envahi la planète Kalyptus, celle d'où est originaire Vanguard. Elle l'informe qu'il va bientôt affronter Krull, le fils de l'empereur Kurr, c’est-à-dire le fils de Dragon lui-même. Elle le prévient que son fils a bénéficié du même entraînement que lui-même avait reçu dans le passé. Dragon entre dans l'arène, et Krull se jette littéralement sur lui. Dragon le reçoit avec un direct puissant, ce qui projette son fils contre la paroi de l'arène à quelques mètres de là, sa tête s'enfonçant dans le mur. Son père se moque de lui : visiblement, il n'a pas tiré autant d'enseignements qu'il l'aurait dû de son entraînement, et plus il semble avoir besoin d'aide pour extraire sa tête du mur. Du coup, il le frappe, ainsi que le mur. Krull finit par se remettre sur pied et attaque à nouveau son père. Ce dernier esquive sans peine et il lui en colle trois autres qui l'envoient mordre la poussière. Puis il se met à haranguer la foule : il leur parle de démocratie, il critique leur organisation qui favorise l'inertie, de ne jamais remettre en question leurs croyances. Il leur explique qu'ils n'ont d'autre choix que de saisir l'occasion de changement qu'il a crée pour eux, et de pouvoir ainsi enfin quitter le vaisseau qui leur sert de pays.



Pendant ce temps, Krull a pu récupérer et il se jette à nouveau sur son père. Celui-ci l'évite facilement, et il lui laisse le temps de se relever et de l'attaquer encore une fois. Il pare son coup avec une facilité humiliante, puis lui assène un nouveau coup qui l'envoie au tapis pour de bon. Dragon est donc confirmé dans son rôle d'empereur. Il réaffirme ses décisions : la tenue d'élections, l'installation sur la planète Kalyptus. Sur Terre, les informations diffusent l'image traumatisante de dieu gisant dans son sang, son corps salement amoché, abattu par erreur par le pilote d'un avion de chasse militaire. Dans le vaisseau, Dragon se parle à lui-même : il a cinquante ans. Son fils entre dans la pièce : Dragon lui explique qu'il n'a jamais été question qu'il le tue en combat singulier. Sur Terre, Malcolm Dragon et Rex Dexter marchent au milieu des ruines d'un large quartier de Chicago. Rex estime que la vie va revenir, et que c'est important que la vie continue, après ces épreuves traversées ensemble. Sur Kalyptus, Dragon est suivi par une dizaine de personnes : il constate que les bâtiments sont encore en relativement bon état et de dimensions un tout petit peu plus grandes que nécessaires pour son peuple. Sur Terre, Overlord survole les décombres de Chicago. Dans l'espace, les Krylans ont élu Dragon comme leur empereur.



Derrière cette couverture rouge et noir qui arrête le regard, le lecteur sait bien ce qu'il va trouver : un récit de superhéros direct et brutal, avec une dose de comédie dramatique, et une progression réelle pour les personnages, même si elle n'est pas rapide. C'est tout l'avantage de cet univers quasiment auto-contenu, l'œuvre d'un unique artiste. Après une minisérie en 1992, Erik Larsen a entamé une série presque mensuelle, dont il a été l'unique auteur depuis le début (à l'exception de l'épisode 13 originel, mais refait par la suite), ayant donné lieu à quelques séries dérivées, et quelques miniséries, existant depuis une trentaine d'années. La force créative de son auteur a permis de développer un univers d'une incroyable richesse, et d'une incroyable inventivité, dans un registre purement superhéros, sans l'effet d'inertie frappant l'univers partagé de DC ou de Marvel. Toutes ces années plus tard, rien ne semble entamer l'enthousiasme très communicatif de l'artiste. Par exemple, le lecteur sait que Dragon va dérouiller, et que Larsen prend la représentation de la violence au sérieux. Celle-ci est une composante essentielle dans la qualité de divertissement des comics de superhéros. Pour qu'elle fonctionne, il ne faut pas se contenter d'un échange de coups de poing ou de rayons destructeurs joliment colorés, il faut que le lecteur sente l'implication des personnages, ressente l'impact des coups. De ce point de vue, Larsen est le digne héritier de Jack Kirby en termes d'impact. Certes la violence est plus graphique, ce qui la rend plus sadique. Mais dans le fond, l'artiste utilise les mêmes recettes que Kirby, avec une grande maîtrise : grands gestes puissants, focalisation sur le mouvement plutôt que sur l'impact, coups de poing qui envoie l'adversaire valdinguer à travers la case, et même hors de la case, etc.



S'il a déjà lu des tomes précédents, le lecteur sait qu'Erik Larsen est un auteur qui aime les comics de superhéros, qui en utilise les conventions de genre au premier degré, en augmentant un peu le niveau de violence, et avec une fibre comédie romantique moins naïve. Dans chaque épisode, il prend soin d'intégrer au moins un combat, ainsi que des scènes d'action spectaculaires, comme un combat dans une arène, un combat dans un cimetière, un voyage dans l'espace, une nouvelle invasion, et encore de nombreux combats. Comme d'habitude, le lecteur est fort impressionné par la richesse de cet univers partagé au sein d'une unique série, avec de nombreux personnages, tous facilement mémorisables qu'il s'agisse des héros comme Dragon, Malcolm ou Battle Girl, ou qu'il s'agisse des criminels, avec bien sûr Overlord, mais aussi PowerHouse (dit Tête de poulet). Le lecteur retrouve d'autres conventions de genre pleinement assumées et exagérées : à commencer par la largeur du torse de Dragon, mais aussi le tour de poitrine de Battle Girl, la finesse de sa taille, sans oublier un ou deux plans culotte. Sous réserve qu'il ne soit pas allergique à ces caractéristiques caricaturales, la familiarité avec les comics de superhéros agit à plein, d'autant plus que l'amour du créateur pour le genre apparaît dans chaque page, avec une forte influence de Jack Kirby, très bien maîtrisée, ce qui n'est pas donnée à tout le monde.



Le lecteur familier des comics se sent encore plus chez lui avec les personnages classiques présents. Il a déjà refait connaissance avec Daredevil (Bart Hill), personnage tombé dans le domaine public, créé en 1940 par Jack Binder, et intégré à la série Savage Dragon à partir de l'épisode 141 en 2008. S'il est attentif, il voit passer Billy Batson le temps d'une case. Dans ces épisodes, l'auteur introduit également The Claw, créé par jack Cole en 1939, dans Silver Streak Comics 1. Il reconnaît bien également la composante entre comédie dramatique et comédie de situation. La grande différence avec les séries habituelles de DC ou de Marvel est que l'auteur a conservé la propriété intellectuelle de ses personnages, et qu'il les écrit en les faisant évoluer. Il ne s'interdit pas de faire usage de résurrections, mais il ne défait pas ce qu'il a construit pour autant. Par exemple, Dragon est père, et son fils a grandi, étant dans ses dernières années de l'adolescence. Avec ce parti pris peu commun dans les comics avec un superhéros récurrent, l'auteur réintroduit une forme de danger : il est peu probable que le personnage principal y laisse sa peau, en revanche il peut être blessé au point d'être réduit à l'inactivité pendant plusieurs numéros. Il peut être remplacé par un autre héros, et les personnages secondaires peuvent mourir, y compris sans espoir de retour par un tour de passe-passe de type résurrection en carton. Du coup, l'implication émotionnelle du lecteur connaît un regain. Malcolm Dragon est susceptible de laisser sa peau dans un combat dépassant sa stature. Angel Murphy n'est pas à l'abri d'un mauvais coup, surtout quand on repense au fait que dieu lui-même est mort dans le tome précédent. Même les résurrections ne sont pas assurées, et l'auteur ne se gêne pas pour jouer sur cette incertitude : tel personnage va-t-il revenir d'entre les morts ? Est-ce bien elle ou lui ?



Erik Larsen joue avec ces conventions attendues, avec la possibilité de les respecter à la lettre ou d'en prendre le contrepied, avec l'exagération de la violence (Ce poing qui traverse un crâne de part en part ! dans un dessin en double page bien sûr), avec la liberté de modifier le statu quo à sa guise (un peuple extraterrestre exterminé), et avec les pouvoirs grotesques (le corps impossible de Double Paige qui porte bien son nom). Chaque élément pris un par un peut s'avérer juste amusant (ce qui est déjà pas mal). L'accumulation de tous ces écarts, de toute cette fougue restitue tout le plaisir régressif à ce comics de superhéros, ainsi qu'un réel suspense. Si c'est marqué sur la couverture, ça veut vraiment dire que Dragon va passer au tribunal, et le verdict d'acquittement n'a rien d'assuré, bien qu'un prêtre ait organisé une église qui le reconnaît comme dieu. Le tout bénéficie d'une forme de bonne humeur, avec des moments humoristiques réussis comme Angelica Murphy tentant d'expliquer ce qui est arrivé à Dragon et que si c'était son corps qui a commis des atrocités, ce n'était pas son esprit.



Les années passent et Erik Larsen ne perd pas la flamme : Savage Dragon est toujours aussi dynamique et inventif, brutal et fort en amitié et en amour. Le lecteur se régale de ce comics de superhéros qui a assimilé la puissance de Jack Kirby et une partie de son inventivité, en assumant pleinement les éléments les régressifs que sont la violence et une forme de caricature des corps masculins comme féminins. Cela donne une lecture très dynamique, regorgeant d'action et de suspense avec des personnages très attachants.
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Spawn, Tome 5 : Rédemption

D'excellents épisodes rassemblés dans ce 5e intégrale!

Comprenant désormais que ses choix ne peuvent ni ne doivent être dictés par ses seuls sentiments, Spawn prend lentement conscience que les conséquences de ses actes sont désormais à la hauteur de ses pouvoirs.

Toujours aidé par le vieux Cogliostro, l'antithèse du Violator, notre sombre Héros va finalement à l'encontre de ses rancunes en sauvant la vie de Terry grâce à ses pouvoirs, ce qui le renvoie en Enfer selon les règles établis par Malebolgia...

Spawn doit donc combattre des créatures malfaisantes, jusqu'à atteindre le Démon majeur qui a fait de lui ce qu'il est...

Encore un bon moment, sombre, de Comics!
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Spawn, Tome 5 : Rédemption

« Spawn, tome 5, rédemption » est pour moi en dessous de son prédécesseur car moins riche, intense et mouvementé.



L’intrigue se situe trop dans le surnaturel et le franchissement successif des cercles de l’enfer est pour le moins laborieux avec une débauche d’effets particulièrement gore donnant la nausée.



De plus, la rencontre pourtant prometteuse avec le charismatique Savage dragon accouche d’une intrigue ridicule, le musculeux extra terrestre refusant le combat et tournant en dérision les tourments pourtant bien réels de Spawn.



Du coté de l’intrigue policière tout se recentre autour de la maladie certes émouvante de Terry mais laissant bien en second plan les Wynn, Blake et Williams.



Au final, malgré la toujours bonne tenue des dessinateurs, ce cinquième opus de Spawn apparait plus comme un épisode attentiste préparant une nouvelle montée en puissance.
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Savage Dragon : United We Stand

Peu de temps auparavant, Solar Man est réapparu sur Terre. Il s'agit d'une copie de Superman qui a décidé d'apporter une solution finale contre les supercriminels en les exterminant purement et simplement. She-Dragon est revenue de la dimension X, mais elle reste trop faible pour pouvoir vraiment agir. Savage Dragon est dans une maison de retraite pour rencontrer la mère de Jennifer Wilson (son ex-femme, portée disparue depuis plusieurs épisodes). Malcom Dragon (le fils de Savage) accompagné de sa soeur et de2 autres enfants essaye de trouver un moyen de sortir de la dimension X. À Baltimore, Invincible se bat contre des Magnanites et des Seigneurs de la Lave. Il est bientôt rejoint par Savage Dragon. Puis Solar Man s'invite au milieu du combat. De son coté, Angel Dragon essaye de se défiler pour revêtir son costume de Battle Dragon et porter assistance à Star et Red Giant (Rita Medermade). Mais Alex Wilde la retient et la convainc de faire ses devoirs.



Voilà une expérience surréaliste : plonger en plein coeur de la continuité d'un titre dense, sans plus d'explications. Si vous n'avez pas suivi la série mensuelle, vous découvrez une multitude de personnages très exotiques s'affrontant pour des enjeux importants, pas toujours discernables car non explicités. La première apparition du Dragon en train de parler à une vieille dame laisse rêveur quant à l'importance des révélations. Et la page d'après semble totalement gratuite avec She-Dragon captive essayant de se rebeller en attaquant une autre prisonnière qui voulait l'aider. Heureusement l'action reprend le dessus et la menace représenté par ce Superman sans pitié est compréhensible et très réelle. Mais tout au long de ce tome, le lecteur qui n'est pas familier avec les épisodes précédents est confronté à scène après scène chargée d'émotions, de mystères et de résolutions, totalement incompréhensibles. Il s'agit d'une expérience postmoderne d'une intensité rare. Sans rien comprendre aux intrigues et aux relations, le lecteur distingue uniquement les dispositifs narratifs, vidés de leur signification. Qui sont ces personnages ? Impossible de savoir. Qui est cette géante à la grosse poitrine ? Mystère, mais difficile de ne pas ressentir de l'empathie devant sa détresse. Encore plus enivrant : She-Dragon est-elle plutôt du coté des bons ou des méchants ? Je ne sais pas, mais cela ne diminue en rien le suspense lié à sa situation.



Erik Larsen possède une telle maîtrise de la narration que le lecteur ne demande qu'à éprouver de la sympathie et de l'empathie pour chaque personnage. Il sent confusément qu'il est le témoin privilégié d'actes de bravoure énorme, de démonstration de courage magnifique. Il faut dire que les indicateurs sont faciles à lire. Superman a pété les plombs, les autres superhéros de l'univers vaguement partagé d'Image Comics s'unissent : Spawn (Al Simmons), Invincible (Mark Grayson), Witchblade (Sara Pezzini) et ShadowHawk (Eddie Collins) et le nombre de morts est impressionnant. En prime, Larsen s'offre le petit plaisir de ramener les superhéros de Nedor Comics qui sont tombés dans le domaine public, tels que Daredevil et Black Terror (comme l'avait fait Alex Ross dans Project Superpowers 1).



Comme à son habitude, Erik Larsen n'y va pas avec le dos de la cuillère pour ce qui est du niveau de violence graphique : crâne éclaté d'un coup de poing (dès la deuxième page), superhéroïne écrasée sous les débris d'un immeuble, poing pulvérisé sous la poigne de Solar Man, superhéros électrocuté, etc. L'exagération des attributs sexuels des femmes produit un effet racoleur à souhait, à commencer par le costume révélateur Sara Pezzini (sans parler de cette jeune adolescente qui projette un fluide semblable à de la toile d'araignée à partir de ses parties intimes, un sens de l'humour provocateur et très personnel). Les blagues à forte connotation ne font pas peur à Larsen, avec une superhéroïne qui fait observer que son amoureux n'a pas de pénis (il est prisonnier d'un corps robotique), ou une supercriminelle (Heavy Flo) qui défèque à pleine puissance sur Dragon. Mais ce coté graveleux est compensé par un sens de l'humour qui fat mouche, par exemple la page consacrée aux dîners de Dragon dans le cadre de son abonnement à un club de rencontres.



Le style graphique d'Erik Larsen peut rebuter au premier coup d'oeil car il n'est pas adepte de la ligne courbe. Il n'essaye pas de faire joli, il fait dans l'efficace en mariant un style très comics de superhéros, un ou deux visages mangas (de façon très anecdotique), une exagération de la carrure de Savage Dragon (quelle largeur d'épaules !) et un sens de l'impact qui fait mal, vraiment très douloureux. Il fait preuve également d'une inventivité graphique remarquable pour les apparences visuelles de la ribambelle de personnages costumés qui peuplent l'histoire.



Le tome se termine sur un épisode destiné à conclure un certain nombre d'intrigues secondaires et à nouveau l'impression de surréalisme saisit le lecteur à la gorge pour une expérience de lecture des plus singulières. Malgré cette absence de compréhension des personnages et des situations, c'est un vrai plaisir que de côtoyer cette galerie de gugusses improbables : Rex Dexter, Horridus, Frank Darling, Heavy Flo (j'ai du mal à m'en remettre de celle-là), Rita Medermade, Alex Wilde, Alison Summers, Vanguard & Wally, Malcom Dragon, Angel Dragon, etc. Back in Blue (épisodes 145 à 150), le tome suivant, constitue une entrée plus accessible dans la série.
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Savage Dragon, tome 15 : This Savage World

Ce tome ne fait pas suite à Savage Dragon Volume 11: Resurrection (épisodes 53 à 58, en couleurs), mais plutôt à Savage Dragon Archives Volume 3 (épisodes 51 à 75 en noir & blanc). Il contient les épisodes 76 à 81 (en couleurs), initialement parus en 2000, écrits, dessinés et encrés par Erik Larsen, avec une mise en couleurs de Reuben Rude.



Savage Dragon a tué Damien Darklord, avant qu'il ne puisse voyager dans le temps, ce qui a créé un paradoxe temporel de grande ampleur. Dragon reprend connaissance dans un endroit en flammes (une de ses spécialités) et découvre un monde post apocalyptique, Chicago en ruines, des gros monstres pas beau partout avides de chair fraîche, et quelques rares humains survivant plutôt mal que bien. Luttant régulièrement pour éviter de servir de repas, il finit par se diriger vers l'endroit où il habitait avec Jennifer Murphy (sa femme) et Angel (leur fille adoptive). À la place, il trouve un énorme cratère, ses pérégrinations reprennent sur cette terre dévastée.



Dans l'introduction de 2 pages, Erik Larsen explique que ces épisodes correspondent au début d'une nouvelle période dans la série. Il avait fait le choix conscient de marquer une rupture forte d'avec les 75 premiers épisodes. Ces 6 épisodes sont conçus comme un hommage à la série Kamandi, the last boy on earth de Jack Kirby. Avec cette référence en tête, le lecteur identifie tout de suite le garçon en fuite aperçu le temps d'une page (page 5 de l'épisode 76), en culottes courtes bleues, avec une belle chevelure blonde (oui, c'est Kamandi). Le lecteur ayant lu "Kamandi" reconnaît immédiatement la situation de Savage Dragon, en tant que dernier "homme" sur Terre, évoluant dans une civilisation en ruines, avec des gros monstres à chaque coin de rue, et des humains ayant perdu leur place en haut de l'échelle de l'évolution.



De ce point de vue, l'hommage d'Erik Larsen est réussi. Il avait déjà prouvé dans les tomes précédents qu'il parle le Kirby avec aisance et fluidité, capable aussi bien d'utiliser son vocabulaire graphique (même types de postures des personnages, même sens de la démesure cosmique), et sa grammaire (séquençage des cases). Comme à son habitude, Larsen sait rendre hommage, tout en conservant un minimum de créativité, et sa narration spécifique. Savage Dragon ne devient pas naïf, il ne perd pas non plus sa personnalité. Les monstres dessinés par Larsen héritent leur apparence de ceux de Kirby, sans être une recopie. Les aventures de Dragon évoquent celles de Kamandi sans en être une copie conforme.



Plus étrange, Larsen décide d'adopter le mode narratif de Kirby sur "Kamandi", des épisodes initialement parus entre 1972 et 1976. Larsen explique dans l'introduction qu'il a choisi de rétablir des bulles de pensées, des cellules de texte explicatives, de supprimer les intrigues secondaires, et de faire en sorte que Savage Dragon apparaisse dans toutes les cases sans exception. Pour un lecteur régulier de la série, le choc est rude. Alors que Larsen l'avait habitué à une narration dense et fluide, il doit ici progresser au milieu de textes patauds et lourds pour dénicher une éventuelle information qui ne soit pas déjà disponible dans les dessins. Larsen explique que cette forme de retour en arrière narratif a divisé son lectorat. Les lecteurs de la première heure y ont vu un recul, une forme de dégénérescence rendant la lecture laborieuse, et l'intrigue trop linéaire. Les nouveaux lecteurs ont trouvé un récit immédiatement compréhensible, accessible et explicatif.



D'un côté, Larsen donne à voir un grand spectacle fantastique, reprenant même l'entame des épisodes conçues par Kirby : un dessin pleine page pour la première page, suivi d'un dessin sur une double page pour les pages 2 et 3. C'est du grand spectacle apportant une gratification immédiate, sans besoin d'un investissement en concentration du lecteur. De l'autre, la lecture de tous les textes est fastidieuse, le mordant et l'ironie de Dragon ont disparu, et la linéarité des aventures (une grande fuite en avant) laisse un lecteur plus âgé sur sa faim.



Il faut attendre le sixième et dernier épisode pour retrouver la verve caustique de Larsen, qui oublie enfin ces cellules de texte et qui divise par 5 le volume des bulles de pensées. Enfin, il réintègre une forme de caricature sarcastique, sous la forme d'un prince des mers pas très futé, et de la revanche de Mako (un homme-requin) dans une aventure sous-marine qui tâche.



Après 75 épisodes, le lecteur peut comprendre qu'Erik Larsen éprouve le besoin de changer de registre narratif. Il a fait preuve d'une inventivité sans faille pendant 7 ans, mariant violence sans retenue, humour relevant de plusieurs registres de comique, personnages sympathiques et attachants, criminels idiots, grotesques, dangereux et parfois bêtes et méchants, intrigues échevelées, suspense à couper au couteau, hommage aux grands créateurs de comics de superhéros, et parodies drôles et intelligentes. Il opère donc un changement radical pour un hommage premier degré à "Kamandi" de Jack Kirby. La radicalité de cette nouvelle orientation a permis à la série d'attirer de nouveaux lecteurs, la contrepartie étant que les lecteurs de longue n'y trouveront vraisemblablement par leur compte.



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- Pour la petite histoire, Erik Larsen avait décidé d'arrêter la réédition en recueil (et en couleurs) après le numéro 11 "Resurection", c'est la raison pour laquelle il n'y a pas de recueils 12, 13 et 14. Par la suite, il a repris le modèle bon marché des Essentials de Marvel, ou des Showcase de DC, c'est-à-dire des compilations de 25 épisodes en noir & blanc dans la collection Archives.
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Savage Dragon, tome 11 : Resurrection

Ce tome fait suite à Endgame (épisodes 47 à 52). Il contient les épisodes 53 à 58, initialement parus en 1998/1999, écrits dessinés et encrés par Erik Larsen. La mise en couleurs a été réalisée par le studio IHOC (créé par Reuben Rude).



William Johnson et Rita Medermade sont de retour dans le commissariat de Chicago (où est affecté Savage Dragon) et ils annoncent leur projet de mariage. Alex Wilde et Chris Robinson font la paix. Bruce Robinson (Bludgeon) demande l'aide d'Amy Belcher (She-Dragon) pour entrer par effraction dans un repère de Johnny Redbeard. Jennifer Murphy (Smasher) rend visite à Hercule sur son lit d'hôpital pour essayer de le convaincre de rendre les superhéros qu'il a enlevés. Une équipe réduite de SOS (Special Operations Strikeforce) se rend sur la planète Godworld pour délivrer les prisonniers faits par Hercule. Max Damage (le seul survivant de Brute Force) essaye de recruter de nouveaux membres pour SOS. Quand William Johnson se contemple dans la glace, il a la surprise d'y voir le reflet de Savage Dragon et de l'entendre parler dans sa tête.



Ceux qui n'ont pas lu les tomes précédents peuvent abandonner tout espoir de comprendre quoi que ce soit aux agissements et interactions de ces nombreux personnages, les autres peuvent rester. Dans son introduction de 2 pages, Erik Larsen rappelle qu'il avait créé le personnage de Savage Dragon quand il était enfant, que ces comics n'ont pas survécu, mais que ces épisodes sont une sorte d'hommage à cette version préhistorique du personnage.



Ces épisodes sont fortement immergés dans la continuité interne de la série, de la façon dont Dragon va pouvoir revenir d'entre les morts (c'est marqué sur la couverture) aux raisons pour lesquelles William Johnson souhaite échapper à son frère. Le premier plaisir de lecture est donc de pouvoir découvrir la suite de l'intrigue principale et des nombreuses intrigues secondaires. Arrivé à ce stade de la série, le lecteur a développé un attachement émotionnel réel pour plusieurs personnages, tous très humains car présentant une forme de manque de confiance en eux qui se manifeste de manière différente. C'est un vrai plaisir de voir Amy Belcher essayer d'aider Bludgeon, et de constater qu'elle s'affirme, qu'elle reprend confiance en elle. De la même manière, il est touchant de voir William Johnson regagner également un peu de confiance en lui, et décider de reprendre l'initiative sur ce frère qu'il redoute tant.



Arrivé à ce stade de la série, le lecteur a également développé une curiosité pour savoir à quel pan de l'univers des comics Erik Larsen rendra hommage dans ces histoires. Ici, il y a plusieurs séquences (celles concernant Godworld et Allgod) qui sont fortement inspirées par les comics cosmiques de Jack Kirby (par exemple Fourth World). Larsen parle le Kirby cosmique comme pas deux. Il sait à la fois utiliser le vocabulaire et la grammaire visuels de Jack Kirby, et conservant un ton qui lui est propre. Larsen a l'art et la manière d'être dans l'hommage respectueux, sans tomber dans le plagiat honteux.



Arrivé à ce stade de la série, le lecteur a développé un goût pour ces aventures premier degré mâtinée d'un second degré au goût d'autodérision. Ça ne manque pas : l'histoire s'ouvre sur un dessin pleine page où 3 gros bras sont en train de se taper dessus comme des sourds. Le lecteur découvre qu'il s'agit de 3 superhéros très musclés, en train de s'entraîner. L'image est à la fois iconique (un gros coup de poing qui envoie l'un d'entre eux valdinguer à plusieurs mètres), très puissante, et idiote (des gugusses en collants moulants et voyants, se tapant dessus comme des gamins). La première apparition d'Allgod (en pleine page pour mieux imposer sa majesté) est toute aussi savoureuse : un individu gigantesque en pagne surplombant une armée à ses pieds, avec une tête sur laquelle sont greffées plusieurs petites têtes (il faut le voir pour se rendre compte). Ce personnage est aussi imposant que ridicule, une image juste sur le point d'équilibre comme sait en imaginer Erik Larsen. Tout au long de ces 6 épisodes, Larsen ne s'autocensure jamais et se fait plaisir, même de manière primaire. C'est ainsi que dans un épisode les personnages se mettent à se taper dessus entre eux, parce qu'un mutant passe à proximité en émettant des ondes d'agressivité malgré lui. Pourtant le lecteur se régale de voir ces superhéros se taper dessus avec force, ces dessins plein de bruit et de fureur primaires ces conflits gratuits défoulatoires et cathartiques. Les comics de superhéros, c'est aussi ça.



Bien sûr, il y a aussi l'intrigue principale, toujours aussi inventive. Le lecteur se repaît des scènes comiques, de la caricature, des émotions, de ces aventures plus grandes que nature qui en mettent plein les yeux. Il ne faut pas oublier qu'Erik Larsen intègre toutes ces facettes dans une histoire divertissante, intrigante et bien ficelée. Pour commencer, il propose une solution originale pour le retour de Savage Dragon dans ce plan d'existence. Ensuite, il entremêle ce retour progressif avec l'histoire personnelle de William Johnson, résolvant une intrigue secondaire en suspens depuis 2 tomes, de manière organique et naturelle. Ce fil conducteur lui permet aussi de développer plusieurs intrigues secondaires s'y rattachant directement (les aventures d'Amy Belcher, le retour d'Overlord). Enfin, il continue de développer des intrigues secondaires ayant des répercussions à long terme, telle que l'opération sur Godworld. Mine de rien, Larsen tisse une trame narrative très ambitieuse dans laquelle chaque séquence vient apporter une pièce supplémentaire, gérant avec habilité des situations se déroulant simultanément, impliquant des personnages différents, dans des lieux différents. Ces différents fils narratifs sont liés, les actions des uns ayant des répercussions sur la situation ou l'avenir des autres. Au bout de 11 tomes, il serait facile de tenir pour acquis que ce degré de coordination est naturel. Il suffit de reprendre un comics de superhéros basique pour s'apercevoir du degré d'inventivité de Larsen, et de l'aisance naturelle avec laquelle il arrive à tisser une trame aussi riche.



Avec ce onzième tome, Erik Larsen poursuit avec maestria les aventures de Savage Dragon, toujours aussi hautes en couleurs et imprévisibles, débordant de personnages attachant, très premier degré dans ses composantes superhéros (des combats physiques dantesques et visuellement bien pensés), une intrigue prenante et pleine de suspense, des intrigues secondaires rocambolesques (la planète des panthéons), une narration sophistiquée (une myriade de personnages, un usage de l'ellipse brutale et bien maîtrisée), un second degré attestant d'une forme de recul et d'autodérision qui permet au lecteur adulte d'encore plus apprécier ces aventures.



Et la suite ? Pour avoir les épisodes suivants, il faut passer au noir & blanc dans Savage Dragon archives, volume 3 (épisodes 51 à 75). Pour des raisons économiques, Erik Larsen avait choisi de sauter quelques épisodes pour poursuivre les rééditions en couleurs. Le tome suivant est numéroté 15 (pour préserver la possibilité de reprendre la numérotation plus tard) : This savage world qui contient les épisodes 76 à 81.
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Savage Dragon, tome 2 : A Force to Be Recko..

Ce tome fait suite à Baptism of fire (minisérie originelle en 3 épisodes, ayant bénéficié d'un nouveau montage). Il comprend les épisodes 1 à 6 de la série régulière (quasi mensuelle, toujours en cours de parution en 2014), initialement parus en 1993, écrits, dessinés et encrés par Erik Larsen, le créateur du personnage.



La situation à Chicago est toujours aussi catastrophique. La ville est aux mains de supercriminels se promenant en toute liberté dans les rues, et les forces de police conventionnelles ont bien du mal à faire face. Frank Darling a recruté Savage Dragon dans le premier tome et celui-ci est le seul officier capable de résister aux superpouvoirs et de taper plus fort que les ennemis. Dans ces épisodes, Frank Darling doit supporter les conséquences du chantage dont il est victime. Savage Dragon se bat contre The Shrew à la tronçonneuse. Il ne sait pas comment réagir à la proposition d'aide de sa collègue Alex Wilde. Il ne sait pas quoi répondre à madame Harris (la mère de Debbie, assassinée sous les yeux du Dragon). Il ne sait pas comment répondre poliment à Emily Schwartzblatt qui prétend être sa mère. Il doit repousser les avances d'Amanda Mills. Côté professionnel, il a l'impression que le lieutenant Darling l'envoie sur des missions d'une importance toute relative. Il se rend à New York où il fait équipe avec les Teenage Mutant Ninja Turtles. Il assiste à l'arrivée de plusieurs autres superhéros dans les forces de police de Chicago : Dart (Jill August), Ricochet & Barbaric, Horridus, Rapture (Sharona Jackson). 2 autres superhéros se joignent à la bataille : Mighty Man et Star.



En surface, ces épisodes ressemblent à une collection de clichés et de stéréotypes des comics de superhéros, dans tout ce qu'ils ont de plus ridicule et de plus débile. Cela va de l'apparence des personnages, aux bagarres à grands coups de poings, en passant par un nombre d'intrigues secondaires hors de contrôle. Les méchants pillent des banques et souhaitent devenir maître du monde (ou presque) ; les gentils les font rentrer dans le rang à grands coups de phalanges dans la tronche. Conformément aux conventions en vigueur dans ce genre très américain et surreprésenté dans les comics, les superhéros mâles disposent tous d'une musculature exagérée (même en s'aidant de stéroïdes), à commencer par le personnage principal. Savage Dragon (même s'il refuse de porter un costume moulant) dispose d'une largeur d'épaule impossible, de biceps plus gros que sa tête, de poings comme des marteau et d'une vitalité lui permettant de guérir de tout très vite. Il est une collection de clichés à lui tout seul. Les personnages féminins ressortent de la même approche : poitrine énorme, taille de guêpe, costume riquiqui. En tant que dessinateur, Larsen renforce encore ces stéréotypes en cadrant ses images sur les muscles des superhéros, et les fesses ou la poitrine des superhéroïnes (sans compter leur costume qui leur rentre dans les fesses).



En termes narratifs, Larsen embrasse pleinement tous les clichés possibles, avec des superhéros qui cognent sur leurs ennemis comme seule solution à tous les conflits, avec des personnages qui ont du mal à s'entendre, avec un clivage Bien / Mal sans aucune nuance, et avec une approche des relations interpersonnelles relevant d'une sitcom produite à la chaîne. Il succombe même dans ces épisodes à une Claremontite aigüe (adjectif dérivé de Chris Claremont) en multipliant les intrigues secondaires au-delà du raisonnable, sans espoir de résolution proche.



Oui, mais d'un autre côté, cette façon de se vautrer dans les conventions du genre (et de s'en repaître) interpelle le lecteur pour plusieurs raisons. La première est que la verve d'Erik Larsen lui permet de tout faire passer, du plus ridicule au plus référentiel. Dans la première catégorie, il y a le personnage appelé Doubleheader (jeu de mot sur les cinémas ou les tournées de rock où 2 films ou artistes se partagent la tête d'affiche) affublé d'un visage 2 fois plus haut que la normale, constitué de 2 visages superposés (de bas en haut : un menton, une bouche, un nez, des yeux, un front / menton, une autre bouche, un autre nez, et une autre paire d'yeux). Il s'agit d'une représentation totalement débile, sans aucune plausibilité même lointaine, même dans le cadre d'un comics de superhéros, mais il s'agit aussi d'un hommage rigolo aux comics d'horreur pour jeunes enfants des années 1930 ou 1940. Dans les références pointues, le lecteur attentif pourra déceler Peter Klaptin (visiblement une variation sur le nom d'Eric Clapton, amalgamé avec le prénom de Peter Parker), R. Richard Richards (nom dérivé de J. Jonah Jameson de la série Spider-Man). Les références ne sont pas que textuelles, à l'évidence Erik Larsen cite Steve Ditko dans les postures qu'il donne à Star, très similaires à celles de Spider-Man. Il cite également Jack Kirby dans sa manière de présenter la force des coups des personnages lors des affrontements physiques. Il cite aussi Frank Miller, à la fois dans certaines cases très contrastées noir / blanc, mais aussi dans plusieurs thématiques, allant du laxisme de la justice vis-à-vis des coupables, à la posture de Frank Darling ayant son maître chanteur au bout du fil (tel Ben Urich dans la même situation).



Toutefois, Erik Larsen ne se contente pas d'aligner les citations plus ou moins bien digérées. Il effectue un véritable travail de recomposition dans lequel il rend hommage de manière patente à ses pères spirituels, tout en transformant cet amalgame en quelque chose qui devient personnel. Il ne s'agit pas d'un simple patchwork, mais bien d'une création originale. Un bon exemple est celui de Mighty Man. D'apparence il évoque un croisement entre Superman et Captain Marvel (Billy Batson), toujours souriant et agréable à l'œil, une véritable publicité ambulante pour un dentifrice, une vie saine et l'accession au bonheur. Si son uniforme évoque une variation de celui de Captain Marvel, il n'en est pas moins original, Larsen étant un excellent concepteur visuel de personnages et de costumes de superhéros. Si son apparence évoque ces 2 grands superhéros fondateurs, le comportement de Mighty Man défie les poncifs qui leur sont liés, le rendant immédiatement spécifique.



Outre ces références aux fondateurs du genre superhéros Marvel (Kirby et Ditko), Erik Larsen ne fait pas semblant. S'il y a bien une forme d'hommage, la narration de Larsen ne verse pas dans la parodie. Pour lui, le comics de superhéros est un genre qui se respecte. Savage Dragon est un personnage bourrin qui frappe son ennemi de plus en plus fort, jusqu'à ce qu'il s'écroule, les combats doivent être à la hauteur, à la fois visuellement et dans leur déroulement. En ceci, Larsen se révèle être l'héritier spirituel de Kirby, il est hors de question de dépeindre un combat par-dessus la jambe, ça doit péter, il doit y avoir des destructions massives et des dégâts. Lorsqu'un coup est asséné, le lecteur doit en prendre plein les mirettes et ressentir l'onde de choc ou la douleur de l'opposant. Larsen s'emploie donc à concevoir des séquences brutales de combats, des pleines pages qui en jettent et même des doubles pages dans lesquels ça cogne fort. Le fait d'être son propre éditeur et de posséder les droits intellectuels sur son personnage lui permet d'en rajouter en termes de violence cathartique, jusqu'à Savage Dragon s'en prenant à The Shrew avec 2 tronçonneuses. Certes il y a une dimension parodique dans cet assaut, mais Larsen représente tout au premier degré, sans tomber dans le gore, en figurant les dégâts avec des giclées d'encre. Pour Larsen un combat physique, c'est du sérieux.



Cela n'empêche en rien plusieurs formes d'humour, allant des regards concupiscents des officiers de police vers Dart (en tant que superhéroïne, elle est affublé d'un costume riquiqui et elle explique que c'est intentionnel qu'il s'agit d'une forme de déconcentration de ses opposants), aux grimaces échangées par Dart et Dragon qui s'apprécient peu, en passant par des noms de personnages improbables Mike Litoris (à prononcer à haute voix rapidement).



Erik Larsen propose de nouvelles aventures de Savage Dragon, toujours aussi dérivatives sur le plan de l'intrigue et des dessins, mais toujours aussi personnelles. Il peuple le monde de Savage Dragon de dizaines de personnages improbables tous dotés d'un nom (même le supercriminel qui n'apparaît que le temps d'une case), baignant dans de multiples intrigues. C'est le seul point faible de ce tome que de multiplier les intrigues sans les résoudre. Savage Dragon continue de cogner dans The fallen (épisodes 7 à 11).
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Savage Dragon : Invasion

Ce tome regroupe les épisodes 175 à 180, parus en 2011/2012. Il fait suite à The kids are alright (épisodes 169 à 174).



Comme le laisse supposer la couverture, Savage Dragon n'a pas totalement disparu. Il se retrouve dans le vaisseau des extraterrestres à la peau verte avec une crête sur la tête et ses sujets l'appellent Empereur Kurr (y compris son fils et sa fille). Il y retrouve même Darklord, un de ses ennemis les plus acharnés. L'explication est compliquée et renversante. Il va lui falloir un peu de temps pour s'y faire. Sur Terre, Malcolm continue à être en butte avec le caïd du lycée et Tierra (la copine de Malcolm) se rend compte que ce n'est pas facile de sortir avec un superhéros. Angel Murphy se remet lentement de ses blessures, mais elle peut compter sur le soutien de Frank Darling. Et le cadavre d'Oussama ben Laden semble encore abriter un semblant de vie.



Pour ces épisodes, Erik Larsen est en très grande forme. Ça commence avec une pleine page en gros plan sur le visage de Dragon demandant où il se trouve, ça continue avec une double page du vaisseau spatial sur fond étoilé, puis le lecteur passe aux explications entre Dragon, sa progéniture (d'une certaine manière) et Darklord. Afin d'expliquer le revirement de comportement de ce dernier, Larsen se sert d'une analogie à base de jours de la semaine, assez convaincante. Elle lui permet de changer de système de référence et de donner une explication qui tient la route. Puis Larsen se lance dans une aventure parodiant Flash Gordon, très savoureuse. Le Dragon avec sa morphologie caricaturale (largeur d'épaules énorme, taille resserrée) fait un excellent héros d'aventures de science fiction rétro, avec son beau T-shirt rouge (il a juste une planète comme insigne, au lieu d'un éclair). Et comme d'habitude, Larsen se montre aussi malin que retors puisque le comportement de Savage Dragon ne correspond pas du tout à ce que son peuple attend de lui. Il faut dire, entre autres, que cette Lorella est vraiment bien roulée.



Sur Terre, Larsen se déchaîne encore plus que dans l'espace. Malcolm prend peu à peu conscience que sa force crée autant de problèmes qu'elle n'apporte de solution, en particulier quand un combat contre Overlord détruit son quartier d'habitation. Et puis arrive le combat du siècle : Malcolm contre le corps irradié et agrandi d'Oussama ben Laden. C'est énorme. Larsen trouve exactement le bon ton parodique pour transformer cette blague d'un goût douteux en un savoureux pastiche de comics de superhéros au rabais, et de politiquement incorrect. C'est bien simple : Frank Miller aurait dû lui demander conseil avant de sortir Holy terror. On a le droit aux radiations aux conséquences bizarres et farfelues, à la lame de fond qui détruit les constructions côtières et à la main déformée sortant de l'eau, annonçant l'apparition du monstre. Le combat est brutal et basique, le héros triomphe, l'Amérique est sauvée ! Malcolm et Angel améliorent leur cote de popularité. Facile : en 1 épisode, Larsen a parodié les films de monstres des années 1950, parodié les comics des années 1960, caricaturé le ton de l'Amérique triomphante, le tout dans une ambiance d'autodérision irrésistible. Et attendez de voir ce qu'il a prévu pour la deuxième moitié du tome : l'invasion évoquée dans le titre, avec force destruction et moult pertes en vies humaines. Tous les superhéros doivent se mobiliser pour sauver la race humaine, avec Daredevil (Bart Hill), Dart (Alison Summers), Hercule, Invincible, Kill-cat & Kid Avenger, Spawn, Mighty Man, Madman, Shadowhawk, Witchblade, etc.



Ce qu'il y a de bien avec cette série, c'est que Larsen ne lésine pas sur les moyens. Il est seul maître à bord de sa série, et il peut détruire la Terre une ville à la fois, ou continent par continent, ça ne pose aucune difficulté. Il est capable de générer une énergie identique à celle de Kirby dans ses dessins de batailles (mais sans les textures de Kirby). Il y a une logique dans le déroulement des affrontements, il ne s'agit pas simplement de cases juxtaposées dans lesquelles il est difficile pour le lecteur de rétablir les mouvements. Il y a toujours un fond de parodie qui ne prend jamais le dessus sur le premier degré de l'histoire, mais qui permet d'apprécier ces aventures plus grandes que nature pour le divertissement pur qu'elles sont vraiment. Il n'y a que le nombre un peu trop important de plans sur la petite culotte d'Angel qui soit vraiment d'un goût douteux.



Avec ce tome, Larsen est au meilleur de sa forme pour inventer des péripéties sans cesse renouvelées, pour laisser libre cours à son imagination. Il construit un récit prenant dans lequel Savage Dragon revient sans bien réussir à trouver sa place, tout en causant le maximum de dégâts. Sur Terre, ses enfants continuent de grandir tout en affrontant des périls dont l'intensité va grandissante. Il souffle un vent de changement à décorner les lecteurs les plus frileux, et pour des enjeux colossaux.
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Savage Dragon : Kids Are Alright

Ce tome comprend les épisodes 169 à 174 de la série mensuelle, parus en 2011. Il fait suite à Emperor Dragon (épisodes 163 à 168) qu'il est recommandé d'avoir lu avant.



En l'absence de leur père, Malcolm Dragon et Angel Murphy (tous 2 enfants de Savage Dragon, mais de mères différentes) prennent la relève. Première mission : mettre fin à un braquage de banque par Cutthroat, le fils de son père également supercriminel du nom de Cutthroat. Ce combat permet à Malcolm d'affirmer son assurance, et à Angel de trouver sa place à ses cotés dans les affrontements. Les médias sont aux petits soins avec lui et la chasse aux supercriminels lui permet de bien gagner sa vie grâce aux primes. Par contre il n'a toujours pas rattrapé son retard scolaire. Tierra Jones s'interroge sur l'évolution de ses sentiments, et Angel n'apprécie que moyennement d'être dans son ombre. Krull, son demi-frère, lui propose de le rejoindre. Il reste toujours le cas épineux de Rex et Dixie Dexter prisonniers de la dimension X, avec Horridus. Angel a du mal à adopter un comportement mesuré vis-à-vis de Daredevil (Bart Hill). Il subsiste également la position ambiguë du nouvel Overlord, et les préparatifs menaçants de Mister Glum.



Contrairement à ce que le résumé pourrait laisser croire, Erik Larsen ne se lance pas dans le comics pour jeune adolescent. Il parvient à trouver un ton assez convaincant pour rendre compte de la jeunesse de Malcolm et Angel, sans les rendre ridicules par leur bêtise ou leur naïveté, sans non plus que le lecteur ait l'impression de lire des dialogues d'adultes. Les 2 sont touchants par leur détermination et leurs convictions simples et inébranlables, ainsi que par leur fougue et leur énergie. Larsen met en valeur l'honnêteté de ces personnages, et leur candeur, leur manque de cynisme ; ils ne sont pas blasés et ils souhaitent faire de leur mieux.



Les illustrations montrent que malgré ce changement de personnages principaux, le mode narratif reste similaire. Erik Larsen utilise toujours ce style qui privilégie l'efficacité à une esthétique aguicheuse ou ronde, avec des détails inattendus. Pour le meilleur ou pour le pire, il continue à exagérer la morphologie de Malcolm et d'Angel. Il est toujours plaisant de voir le torse surdéveloppé du Dragon et ses énormes poings, aussi gros que sa tête. Malcolm est bien le fils de son père et le lecteur n'a aucun doute qu'une bonne résolution de conflit est une résolution brutale où celui frappe le plus fort a gagné. Il continue d'abuser d'un rendu exagérément sexualisé pour les personnages féminins à commencer par Angel avec sa taille de guêpe et sa poitrine hypertrophiée, sans compter le plan petite culotte dès la deuxième page. Pas de doute, Larsen n'a aucune intention de donner dans le comics inoffensif ou insipide.



Ce qui va faire la différence visuelle avec un comics de base, ce sont donc les petits détails insérés par Larsen. Pour commencer ses adolescents ont vraiment un visage juvénile, plus jeune que les adultes. Larsen ne se contente pas de reproduire les mêmes traits d'un personnage à l'autre. En ce qui concerne les Little Wise Guys, ils ont même des visages poupins ce qui correspond bien à leur jeune âge. Il y a également le modèle de baskets de Malcolm, ou les bagues sur les dents d'une de ses copines. Si Larsen privilégie l'efficacité, il n'oublie pas que les comics sont un medium essentiellement visuel, et ses pages apportent leur lot de scène inoubliable. Outre les moments très réussis de la vie quotidienne d'Angel et Malcolm, Larsen propose des pages bien brutales et sans concession. Il y a un combat très sanglant contre un supercriminel armé de lames et effilées et tranchantes où le pouvoir de récupération de Malcolm est fortement sollicité, et où Angel massacre son ennemi. Il y a également plusieurs pleines pages bien senties dont un gros plan irrésistible sur le visage d'un supercriminel intimant à son fils de faire ses devoirs scolaires. Il y a également cet épisode dans lequel Larsen adopte la mise en page popularisée par Frank Miller : une case à gauche de la hauteur de la page, et 4 cases horizontales à droites empilées l'une sur l'autre. Derrière le caractère auto-indulgent et potache de l'histoire, les illustrations montrent qu'Erik Larsen est un maître de la narration séquentielle



Concernant le récit proprement dit, le lecteur a le plaisir de voir que Larsen ne revient pas en arrière sur les bouleversements du tome précédent et qu'au contraire il continue à faire place nette pour passer à autre chose, en particulier avec la destruction des corps des différents Dragons. Le lecteur éprouve une empathie complète pour ces 2 jeunes gens qui doivent assumer des responsabilités un peu trop complexes pour leur âge, sans être ni des benêts naïfs, ni des génies précoces. L'univers dans lequel évoluent ses personnages est toujours aussi riche, aussi pince-sans-rire et ironique sans être méchant. La fin de l'histoire me retient d'attribuer une cinquième étoile car elle fait appel de manière intensive à la continuité et il est difficile de déchiffrer les enjeux sans effectuer quelques recherches sur des sites spécialisées pour avoir des détails sur le passé de différents personnages, à commencer par Rex Dexter. Angel et Malcolm continuent d'être à la hauteur dans Invasion.
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Wolverine Epic Collection : Shadow of Apoca..

Ce tome s'inscrit dans le format Epic Collection qui reprend l'intégralité des épisodes, mais avec une parution chronologique qui ne respecte pas l'ordre numérique des tomes. Il s'agit du tome 12 qui comprend les épisodes 133 à 149 de la série, ainsi que le numéro 8 de la série Hulk, et le numéro spécial Wolverine/Cable, initialement parus en 1999/2000. Erik Larsen a écrit les épisodes 133 à 149, avec l'aide d'Erik Stephenson pour les épisodes 136, 143, 144, et de Fabian Nicieza pour les épisodes 146, 147. Il s'agit de la version de Wolverine sans son adamantium, avec des griffes en os.



Épisodes 133 à 138 (dessins de Jeff Matsuda et encrage de Jonathan Sibal) - Logan (Wolverine) et Carol Danvers (Warbird) sont tranquillement en train de jouer au billard dans l'entresol d'un bar pas forcément très fréquentable. Une extraterrestre humanoïde se faisant appeler Powerhouse sème la destruction au pied du building des Nations Unies. Wolverine et Warbird interviennent mais Powerhouse réussit à posséder l'esprit de Wolverine et à lui faire commettre des agressions. Il doit alors affronter plusieurs superhéros, avant de se retrouver dans une planète prison dans l'espace pour prendre la tête d'une rébellion.



Ce tom regroupe l'ensemble des épisodes écrits par Erik Larsen pour Wolverine, alors qu'il était parti fonder Image Comics en 1992, avec Todd McFarlane, Jim Lee, Whilce Portacio, Marc Silvestri, Jim Valentino et Rob Liefeld, pour créer sa propre série Savage Dragon. Larsen reprend Wolverine alors qu'il ne dispose plus d'adamantium (enlevé avec force par Magneto) et qu'il vient de connaître des épisodes mémorables réalisés par Larry Hama & Marc Silvestri, voir Wolverine by Larry Hama & Marc Silvestri - Volume 1. Le lecteur découvre une première aventure haute en couleurs, dans laquelle le scénariste se fait plaisir, avec de l'action, des personnages invités et en jouant avec des personnages de l'univers partagé Marvel. Afin de remplir ces 6 épisodes, Erik Larsen commence par un test des capacités de Wolverine, assez artificiel : la possession par une extraterrestre et un épisode consacré à se battre contre des superhéros amis. La suite dans l'espace est l'occasion de faire apparaître plusieurs des Starjammers, ainsi qu'un personnage cosmique de moyenne envergure, et un autre de grande envergure. Larsen ne se contente pas de passer d'une scène de combat à la suivante, il fait ressortir la personnalité de Logan au cours de sa discussion avec son amie Carol Danvers, et il organise la rébellion de manière à brouiller les cartes quant à quelle faction à raison.



Ces 6 épisodes projettent également le lecteur au beau milieu des années 1990, avec ses excès picturaux caractérisés. Jeff Matsuda joue avec les exagérations des formes, piochant à la fois dans les tics graphiques des mangas, dans les déformations des visages rappelant Rob Liefeld, dans les individus qui posent pour une image plus avantageuse, dans les cases qui se chevauchent pour provoquer une sensation de chaos ou de violence. Le résultat est plus lisible que l'apparence ne le fait craindre, avec un entrain qui contrebalance pour partie un esthétisme plus criard que vivant. Du coup cette première partie peut s'apprécier comme une aventure débridée et sans complexe, avec un scénario un peu élaboré et bien fourni, et des dessins très enjoués, même si leur fougue est surtout de surface.



Épisodes 139 à 143 (dessins de Leinil Francis Yu et encrage de Dexter Vines) - Logan est en train de descendre quelques bières dans un bar, se lamentant sur son sort, quand Nathan Summers (Cable) passe la porte et vient s'accouder au comptoir à ses côtés. Avant de pouvoir vraiment commencer à papoter, ils sont interrompus par Longbow et doivent sortir pour se battre contre une créature géante mi-homme, mi-animal. Puis Nightcrawler (Kurt Wagner) et Wolverine doivent se défendre contre Solo (James Bourne) et Cardiac (Elias Wirtham) qui veulent neutraliser Wolverine suite aux agressions commises lorsqu'il était possédé. Alors qu'il se promène tranquillement dans la rue avec Jubilation Lee, Logan est agressé par les séides de Donald Pierce. Enfin, Wolverine retourne au Canada pour s'allier avec Alpha Flight et lutter contre un individu se faisant appeler Weapon X.



Après une grande aventure cosmique tout public, Erik Larsen change son approche narrative pour 4 histoires autocontenues, la dernière s'étalant sur 2 épisodes. Le lecteur découvre ou retrouve un dessinateur dont les pages ont mieux supporté l'épreuve du temps et dont la carrière s'est poursuivie dans les années 2000 et 2010. Il profite de ce répit dans les exagérations et les déformations anatomiques, tout en ressentant l'impact et la force des coups, par le biais de cadrages penchés et en contreplongée. Il note l'encrage méticuleux de Dexter Vines, jouant habilement sur le contraste entre des traits de contours parfois très fins, et des aplats de noir tantôt très fluides, tantôt présentant des contours déchiquetés. Les personnages continuent de poser pour la photo à intervalle régulier, mais la narration visuelle est moins infantile, et gagne ainsi en impact.



Même si Cable sort de nulle part pour une raison pas très claire, Erik Larsen sait faire s'exprimer la saveur de sa relation avec Wolverine, au travers de dialogues sarcastiques sans être cyniques. Le rythme de l'histoire est rapide, et la tonalité virile reflète bien la personnalité des 2 héros. Le scénariste utilise l'épisode suivant pour raccorder la série aux événements se déroulant dans les séries X-Men, pour rappeler que Logan ne vit pas tout seul dans son coin, grâce aux informations données par Kurt Wagner. Le quota d'action est fourni par une rapide bagarre de bar et par les antihéros venant appliquer une justice expéditive. L'épisode se lit sans déplaisir, mais s'oublie une fois la dernière page tournée. L'épisode suivant est l'occasion pour Wolverine de continuer à reprendre contact avec ses amis, cette fois-ci avec Jubilee dont il fut le mentor. L'affrontement contre Donal Pierce est pyrotechnique à souhait, avec la participation de Khyber pour faire bonne mesure. À nouveau l'épisode se lit facilement avec Yu s'amusant bien à mettre en scène les personnages dans les affrontements, et s'affranchissant de dessiner les décors. Enfin, le temps est venu pour Wolverine de retrouver Aurora, Northstar, Sasquatch, Puck, Shaman et Heather Hudson pour affronter un ennemi un peu plus conséquent et s'immerger dans la mythologie spécifique d'Alpha Flight, à la fois ses bons côtés (une apparition de Snowbird), à la fois le retour récurrent et pathétique de James Hudson, diluant un peu plus le personnage à chaque retour. Leinil Yu est toujours dans l'exagération de la force des coups et des mouvements brutaux, avec un dosage moins harmonieux.



Épisode 144 (dessins de Mike Miller et encrage Vincent Russell) & Hulk 8 (dessins de Ron Garney et encrage de Sal Buscema) - Logan vient tout juste d'être recruté par le département H et sa première mission est d'assurer la sécurité du territoire canadien qui est menacée par l'intrusion de Hulk. Puis il doit à nouveau affronter Hulk au temps présent, mais cette fois-ci sans son adamantium. Avec le premier épisode, Larsen prouve qu'il maîtrise la continuité du personnage et qu'il est capable de trouver des plages de liberté pour mettre en scène l'amitié qui unit Logan au couple Hudson et pour expliquer le contexte de la première apparition de Wolverine dans les épisodes 180 et 181 de la série Incredible Hulk en 1974. Dans le deuxième épisode, il raconte un combat avec une narration assez datée qui manque d'implication viscérale, tout en montrant que Logan n'est plus dominé par son instinct animal depuis longtemps. Les dessins de Miller sont professionnels, mais sans beaucoup de personnalité. Ron Garney donne l'impression de singer Herb Trimpe, lui-même s'inspirant de Jak Kirby, mais sans sa force de conviction, et le lecteur est content que cet interlude se termine.



Épisodes 145 (dessins de Leinil Francis Yu et encrage de Dexter Vines), 146 (dessins de Mike Miller et encrage de Durruthy Massengill), 147 (dessins de Roger Cruz et encrage de Derek Fridolfs), 148 (dessins de Roger Cruz et encrage d'Andy Owens), 149 (dessins de Graham Nolan et encrage de Jimmy Palmiotti) - Apocalypse est de retour avec un plan pour assimiler les superpouvoirs des 12 mutants les plus puissants de la planète (The Twelve) à son profit. Wolverine se retrouve récupéré et devient l'un des cavaliers de l'Apocalypse. Il se bat successivement contre Sabretooth, Hulk et (Arch)Angel. Pour finir, il se détend en faisant équipe avec Hulk, Spider-Man et Ghost Rider dans une réalité parallèle (Ages of Apocalypse), puis avec Nova après toutes ces aventures.



Erik Larsen a réservé une surprise de taille à son lecteur qui comprend mieux le passage à des histoires courtes dans les épisodes précédents, et qui retrouve Wolverine à nouveau possédé, ce qui explique ses performances diminuées face à ses ennemis de toujours. Erik Larsen tire bien son épingle du jeu au milieu du maelström de ces crossovers, mettant à profit les éléments de continuité à bon escient, conservant la voix de Wolverine et insufflant un minimum de sens dans ces affrontements. Leinil Francis Yu est revenu gonflé à bloc pour insuffler un élan cinétique à chaque personnage dans chaque case lors des affrontements, au point que le lecteur peut ne pas s'apercevoir tout de suite qu'il n'y a plus aucun décor. Mike Miller réalise des planches plus soignées que dans l'épisode 144, pour une narration visuelle à la fois dense et claire. L'arrivée de Roger Cruz renvoie le lecteur aux exagérations de Jeff Matsuda, une partie de son entrain en moins, mais avec les mêmes automatismes et tics exaspérants. Graham Nolan ramène la narration visuelle dans une registre plus traditionnel, mais avec un encrage trop pâteux de Jimmy Palmiotti.



À nouveau ces 5 derniers épisodes se lisent sans déplaisir, mais s'oublie tout aussi rapidement, cette fois-ci du fait qu'ils ne représentent qu'une partie de l'histoire The Twelve, même si Larsen sait construire des épisodes qui forment des chapitres qui peuvent se lire sans avoir suivi les autres séries, et avec des dessinateurs aux qualités fluctuantes.



Wolverine/Cable (scénario de Joe Casey, dessins de Stephen Platt, aidé par 6 encreurs) - Cable est de retour au temps présent, mais amnésique. Il se lie d'amitié avec un vétéran militaire désargenté qui l'accueille chez lui. Un individu appelé D'von Kray reprend conscience dans les laboratoires souterrains du Département H et se souvient de sa mission : pourchasser et exécuter Nathan Dayspring. Alors qu'il est arrivé à New York et se déchaîne, il trouve Wolverine sur sa route.



Le lecteur comprend vite que Joe Casey a écrit une histoire sur mesure pour Stephen Platt, roi de l'exagération testostéronée, des postures viriles, des hommes musclés, et des gros flingues. Il s'agit donc de mettre en scène des individus musculeux qui s'affrontent sans pitié, faisant preuve d'un courage viril et guerrier. Sous réserve d'être conscient de la nature de cet exercice de style, le lecteur peut apprécier à sa juste valeur cet épisode de pur divertissement dans un genre très balisé, en regrettant que Platt ne soit pas lâché un peu plus. 4 étoiles.
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Savage Dragon : Emperor Dragon

Ce tome contient les épisodes 163 à 168, parus en 2010. Il fait suite à Dragon War (épisodes 157 à 162).



Quelque part dans la dimension X, Rex Dexter, Horridus (Sarah Hill) et Dixie Dexter (leur fille) sont à la recherche d'une solution pour regagner la réalité de Savage Dragon quand ils se rendent compte que Mister Glum (Ba-Goom) a étendu sa sphère d'influence de manière significative. Thor a été le premier à retrouver Mister Glum et il lui demande de l'envoyer dans sa dimension d'origine, ce que Glum accepte sous réserve que Thor détruise Savage Dragon. Le pacte est scellé, aussitôt dit, aussitôt fait, et Thor se retrouve face à Dragon. Sur la Terre principale, Angel Murphy souffle les 16 bougies de son gâteau d'anniversaire. Mais rapidement le quotidien reprend ses droits et elle se retrouve à se battre contre Double Paige et Vein, en compagnie de son demi-frère Malcom Eugene Jackson Dragon. De son coté, Vanguard a mis au point un plan pour récupérer son téléporteur portatif, accaparé par l'empereur Krull. Et quelque part non loin de la Terre, un énorme vaisseau extraterrestre est stationnaire, avec à son bord une armada d'individus de la même race que Savage Dragon.



Plus brutal, plus fort, plus trash (avec un soupçon de gore), plus dérivatif des comics, tel est la devise d'Erik Larsen. Et il fait ça très bien. Il ne faut toujours pas chercher de justification à ce comics, autre qu'un gros défouloir primaire et efficace. En fait, le lecteur est fortement impressionné par la capacité de Larsen à continuer dans la même veine trash et premier degré (avec des clins d'oeil aux clichés de comics de superhéros) sans se répéter.



La violence reste à un niveau supérieur aux comics Marvel ou DC, avec encore de bien belles séquences : coup de marteau dans la tête (merci Thor), yeux crevés, bras droit calciné, individu écrasé sous un immeuble s'effondrant. Et il ne s'agit que du premier épisode, le plus calme. Ça se gâte par la suite.



L'aspect parodique est bien représenté également, de 2 manières. Tout d'abord, Erik Larsen a un don incroyable pour créer des personnages originaux aussi grotesques que dérivatifs et subversifs. Double Paige vaut à elle seule le détour, et pourtant il y a encore pire. Double Paige tire son pseudonyme du fait qu'il s'agit des 2 soeurs siamoises dotées de superforce, et jointe l'une à l'autre d'une manière assez particulière qui leur permet de combattre efficacement. Le résultat visuel est grotesque, burlesque et absurde, un ravissement au second degré (voulu par Larsen). Or des personnages grotesques, il y en a quelques uns dans ce tome qui voit des apparitions de plusieurs personnages antérieurs. Ensuite Larsen glisse quelques références discrètes aux clichés des comics de superhéros employés à outrance par Marvel et DC. Alors que la fin du monde semble proche, une brume rouge envahit l'atmosphère évoquant immédiatement les cieux rouges de Crisis on Infinite Earths (et des Crises suivantes). Il emprunte également un superhéros appelé Captain Four Color qui lutte pour la préservation (en très bon état) des comics et dont chaque phrase est un cliché de collectionneur (un régal d'ironie).



Enfin, l'histoire va à toute vitesse : Erik Larsen raconte en un tome une histoire qu'il aurait pu étirer au moins sur le double de pages selon les standards en vigueur à l'heure actuelle dans les comics. Les illustrations (réalisées également par Larsen) sont à l'unisson de la narration : rapide efficace, sans s'embarrasser de fioritures pour faire joli. Évidemment ce parti pris graphique peut rebuter dans la mesure où le résultat n'est pas très joli, pas du tout rond, un peu esquissé, et brut de décoffrage. Toutefois, chaque page trahit les 2 influences majeures de Larsen : Jack Kirby et Walt Simonson. Et c'est vrai qu'il se dégage de ces pages une énergie et un enthousiasme communicatifs. Thor est à la fois majestueux et un tantinet ridicule dans sa belle armure moulante. Savage Dragon dispose toujours d'une largeur d'épaule hallucinante (ça doit remonter son centre de gravité de manière significative). Il adopte à plusieurs reprises des poses régaliennes imposantes. Chaque coup porté fait toujours aussi mal : il faut voir pour le croire les blessures infligées par SuperPatriot à Savage Dragon (toujours avec une légère touche second degré, grâce au nombre de douilles éjectées). Larsen ne peut pas s'empêcher d'inclure un plan petite culotte (un seul en 6 épisodes, ça reste supportable).



En prime Erik Larsen semble vraiment motivé puisqu'il ne lésine pas sur les décors et qu'il ne recourt que ponctuellement à la mise en couleurs pour combler quelques vides. Ce tome constitue comme les précédents un plaisir coupable et régressif. Le héros tape comme une brute jusqu'à temps qu'il gagne. La destruction est massive, la violence ne faiblit jamais, les méchants sont vraiment méchants. Mais la lecture est un plaisir rare car la narration est vive et alerte, il flotte un parfum de légère dérision qui montre que l'auteur n'est pas dupe. En outre c'est une ode à l'inventivité et à la créativité d'Erik Larsen qui se renouvelle d'épisode en épisode, sans jamais tomber dans les ornières des comics de superhéros traditionnels. En prime, il est vraiment savoureux de lire un comics où l'auteur n'hésite pas une seconde à bousculer le statu quo, à maltraiter son héros, à tuer ses personnages, etc. Pas de doute, vive l'auto-indulgence ! Je m'en vais de ce pas me vautrer dans The kids are alright (épisodes 169 à 174).
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Savage Dragon : Dragon War

Ce tome contient les épisodes 157 à 162, parus en 2010. Il fait suite à Identity Crisis (épisodes 151 à 156).



Le tome s'ouvre sur une scène choc comme seul Larsen sait en créer. Savage Dragon vient de pulvériser la tête de Dark Dragon. Il est penché au dessus du cadavre en train de récupérer la bouillie de cervelle pour la manger (la seule méthode pour être sûr que ses pouvoirs de régénération ne le ramènent pas à la vie) devant Malcom (le fils de Savage). Cette scène ne se termine pas très bien pour Malcom. Lorsque Daredevil et Angel (la fille adoptive de Savage Dragon) arrivent sur place (après la bataille), ils découvrent une demi-douzaine de gugusses à l'apparence approchante de celle de Savage Dragon (ils ont bénéficié d'une transfusion de son sang). Flash Mercury vient en aide à Malcom. Overlord conclut un pacte d'entraide avec le Capitaine de police Stewart. Savage Dragon vole un objet à Vanguard. Il se met ensuite à accomplir ses préparatifs en vue d'un objectif indéterminé, avec le maximum de violence comme à son accoutumée.



Même si vous prenez le train en marche avec ce tome, vous ne serez pas complètement perdu car Erik Larsen a l'art et la manière de raconter une histoire rapide, brutale et intrigante tout en donnant les informations nécessaires pour comprendre qui est qui.



Le lecteur retrouve donc quelques uns des personnages propres à cette série tels qu'une courte apparition de Vanguard (l'extraterrestre chargé de surveiller la Terre), l'inénarrable Deadly Duo (Kid Avenger & KillKat) toujours aussi inefficace, Daredevil (Bart Hill, un superhéros du golden age tombé dans le domaine public), et Neutron Bob.



Erik Larsen s'en donne à coeur joie pour l'intrigue ; le lecteur retrouve son goût pour la violence et le grotesque. Coté violence, quand Savage Dragon frappe, ça fait très mal : le sang gicle, les têtes explosent, les torses sont transpercés, les yeux explosent, la tripaille se répand à l'air libre. Coté grotesque, Erik Larsen marie habilement la caricature dérivative des poncifs des comics, avec les idées plus grandes que nature de Jack Kirby. Il mélange sauvagement les exagérations idiotes des comics de superhéros avec l'imagination imposante du King. D'un coté le lecteur ne peut être que navré de constater la taille imposante de la poitrine d'Angel et les 2 ou 3 cases consacrées à sa petite culotte. De l'autre, il ne peut qu'être estomaqué de voir que Larsen est l'un des fils spirituel de Kirby, que ce soit un gant de puissance libérant de l'énergie, la carrure impossible de Savage Dragon avec un torse démesuré, la vision dantesque de la dimension X (version survitaminée de la zone négative des Fantastic Four), l'exosquelette pour exterminer Savage Dragon (tout droit inspiré par les Spider-slayer de la série Spider Man), l'hallucinante ironie prétentieuse de KillKat, etc.



Erik Larsen embrasse pleinement les clichés des histoires de superhéros pour mieux les détourner. Outre les éléments classiques Marvel évoqués ci-dessus, il s'amuse à se faire rencontrer 2 personnages 100% humains qui s'appellent Norman et Luthor et dont les apparences ne laissent pas de place au doute quant à leurs contreparties (Norman Osborn et Lex Luthor). Il y a également un propriétaire de journal irascible qui fait penser à J. Jonah Jameson, le Daredevil du Golden Age, etc. Ce parti pris se retrouve également dans son style graphique qui privilégie l'efficacité au détail ou à l'esthétisme. Larsen ne dessine pas pour faire joli, mais pour en jeter plein la figure. Il s'adresse donc plutôt à des adultes prêts à accepter des visages grossiers, des silhouettes parfois anatomiquement hasardeuses, pour se régaler de poses vives et rentre dedans, de brutalité bestiale, de destruction massive (un peu schématique), de héros ayant l'air d'abruti (Flash Mercury et son masque avec un nez en aiguille), et postures théâtrales. Il a abandonné son habitude de dessiner des pieds pointus, par contre il a adopté l'habitude Jack Kirby de dessiner des extrémités de doigts carrées.



Au final, ce tome de Savage Dragon procure un plaisir régressif de bastons brutales et de coups tordus destinés à des grands lecteurs de comics à qui il faut une dose corsée, tout en pastichant les superhéros traditionnels et leurs stéréotypes, mais en capturant un peu du sens du merveilleux de Jack Kirby. Erik Larsen est vraiment un auteur particulier capable de divertir des adultes blasés, avec un récit percutant qui ne perd pas son lecteur malgré le respect de la continuité interne de la série. Le tome suivant est Emperor Dragon (épisodes 163 à 168).
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Savage Dragon : Identity Crisis

Ce tome contient les épisodes 151 à 156, parus en 2009. Il fait suite à Back in blue qu'il faut absolument avoir lu avant.



La partie supérieure du corps de Savage Dragon avait été pulvérisée à la fin du tome précédent. Lorsque celui-ci commence, Daredevil (Bart Hill) est en train de se battre contre Mako (une sorte de croisement entre un homme et un requin) pour essayer de l'arrêter. Le capitaine de police Stewart vient annoncer la nouvelle du décès de Dragon à ses enfants (Malcom Dragon et Angel Murphy). Alors qu'ils sortent aller examiner les lieux de la mort de Savage Dragon, ils perçoivent le bruit du conflit. Malcom et Angel s'élancent à la rescousse de Daredevil. Dans le même quartier, Alison Summers (Dart II) et les Little Wise Guys se rendent eux aussi sur place pour voir s'ils peuvent apporter leur aide. Ailleurs, les agents du Vicious Circle ont récupéré le cadavre de Savage Dragon et sont en train de l'examiner pour essayer de récupérer son sang. Ailleurs encore, Rex Dexter dispose du cadavre d'une autre itération du Savage Dragon. Et quelque part d'autre encore, un autre Savage Dragon semble en bonne forme et prêt à exterminer tout autre prétendant à ce nom.



Pour être honnête, Erik Larsen ne facilite pas l'accessibilité de son récit. La prolifération de versions de Savage Dragon finit par faire tourner la tête et par faire revenir à plusieurs reprises quelques pages en arrière, pour essayer de retrouver le fil de la provenance du Dragon que le lecteur a sous les yeux. Certaines pages provoquent le même sentiment d'intense surréalisme comme dans United we stand : mais qui c'est celui là et de quoi il cause ?



À condition d'accepter ces moments où l'on perd pied, l'immersion dans le récit est totale et sans pitié. Erik Larsen est déchaîné et commence à envoyer promener le politiquement correct dès la troisième page. Malcom est en train de taquiner sa presque soeur sur son béguin pour Daredevil. Elle se jette sur lui pour se chamailler et se rend compte qu'il réagit physiquement à cette promiscuité. Elle se moque de lui en insistant sur leur lien de parenté et il lui rétorque qu'elle n'avait pas à se frotter contre lui. Toute ambigüité sur le ton du récit étant levée, le lecteur peut se vautrer avec délice dans le style auto-complaisant de Larsen.



Comme d'habitude le niveau de violence est très élevé (même pour un comics), le sang coule, les membres cassent, les dents volent, etc. Le summum est atteint dans le dernier épisode qui raconte le combat de Savage Dragon contre Savage Dragon, annoncé sur la couverture. Erik Larsen ne se contente pas d'aligner page après page de coups dans la gueule, il orchestre un véritable combat, sur la base d'une chorégraphie simple mais efficace. Il aide quand même le lecteur en ajoutant un détail (une trace de sang sur l'un des visages) permettant de différencier les 2 Dragon. Il construit le déroulement du combat avec des phases différentes, et une sauvagerie qui va crescendo (une double page atroce lors de la prise d'une otage), un vrai massacre. Parmi les différentes versions du Dragon, il y a en un qui semble être un hommage directe aux monstruosités difformes imaginées par Kevin O'Neill (une grande force visuelle, répugnant, obscène viscéralement dérangeant).



Le lecteur retrouve bien sûr les tics graphiques habituels d'Erik Larsen : femme à forte poitrine et taille de guêpe (Alison Summers constitue une apothéose dans le genre), puissance dévastatrice des coups portés dans une efficacité digne de Jack Kirby, simplicité classique de la mise en page, visages dessinés à grands traits tout en étant expressifs, intensité de l'action faisant oublier l'absence de décors sur certaines pages, conception graphique originale et frappante de chaque personnage.



Cette débauche de violence repose sur une histoire solide qui n'hésite par à faire évoluer la situation des personnages (et qui fait un peu trop fortement appel à la continuité pour les nouveaux lecteurs). Overlord continue d'ourdir ses machinations sans qu'il soit possible au lecteur de deviner ses motivations. Les enfants de Savage Dragon recherchent toutes les idées possibles pour faire revivre leur père. Les rebondissements se succèdent rapidement et l'action ne faiblit jamais. Larsen sait varier les formats des scènes d'exposition pour faire ressortir le caractère de ses personnages, tout en gardant un rythme rapide à la narration. Le lecteur se demande sans cesse où mène le récit, pour découvrir surprise après surprise, et déboucher sur une révélation inattendue.



Ce tome continue de faire évoluer la situation de Savage Dragon à grands coups de poing dans la gueule, et de scènes chocs. Il est recommandé à des lecteurs blasés de comics cherchant un divertissement immédiat et jouant sur les clichés des comics. Le carnage continue dans Dragon war (épisodes 157 à 162).
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Savage Dragon, tome 15 : This Savage World

CRITIQUE TEST
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Savage Dragon, tome 9 : Worlds At War

Ce tome fait suite à Terminated (épisodes 34 à 40 et 1/2). Il contient les épisodes 41 à 46, initialement parus en 1997/1998, écrits dessinés et encrés par Erik Larsen, et mis en couleurs par le studio IHOC. Ce tome bénéficie d'une introduction de Robert Kirkman (rédigée en 2003) indiquant qu'Erik Larsen est au summum de sa créativité, et qu'il vaut mieux avoir lu la série depuis le début.



Savage Dragon est maintenant le responsable d'un groupe de superhéros dépendant de l'état, un groupe spécial d'intervention gouvernemental baptisé Special Operation Strikeforce (SOS). Le SOS remplace l'équipe Youngblood portée disparue (la série de Rob Liefeld lancée à la création d'Image comics). Nat Hawkins, leur agent de liaison, sollicite Savage Dragon pour qu'il accepte des contrats de merchandising pour aider à financer l'équipe. Dragon refuse de compromettre ainsi ses valeurs (ce qui déçoit beaucoup Barbaric qui ne rêve que d'avoir une figurine à son image). L'épisode 41 est consacré au mariage de Ricochet (Rikki Shaefer) et Barbaric (Bernard Runningbear). Par la suite, Darklord (un dictateur d'une Terre divergente) substitue des morceaux du sol américain en bon état, par leur équivalent ravagé de la Terre de sa dimension parallèle. Savage Dragon, Smasher (Jennifer Murphy), Rapture (Sharona Jackson), Rock et SuperPatriot se font transporter sur cette autre Terre pour stopper ces échanges forcés.



Déjà dans le tome précédent, Erik Larsen faisait preuve d'une créativité illimitée, avec un nombre de personnages distincts dépassant la centaine et un renouvellement significatif des intrigues, sans rien perdre du potentiel empathique des personnages. Ce nouveau tome continue dans la lancée. Le premier épisode est l'occasion pour Larsen de rendre hommage à une bonne quinzaine de comics indépendants de l'époque, ainsi qu'à ses personnages favoris Marvel ou DC (de manière plus discrète, juste un bras ou un bas de jambe aisément reconnaissable au costume). Le temps ayant fait son effet, seuls les lecteurs plus âgés seront capables d'identifier les invités au mariage : DNAgents (de Mark Evanier et Will Meugniot), FemForce, Vampirella, Hellboy (de Mike Mignola), WildCats, E-Man (de Joe Staton), Wildstar (de Jerry Ordway), Elton John, le frère de Pitt (de Dale Keown), Zot (de Scott McCloud), Flaming Carrot (de Bob Burden), Destroyer Duck (de Steve Gerber & Jack Kirby), Cerebus et Jaka Tavers (de Dave Sim & Gerhard), Ka-Boom (de Jeff Matsuda), Hulk, Spider-Man, Hibgoblin, Sandman (Flint Mako), Popeye, Marge Simpson, etc.



En tant qu'artiste, Larsen continue également à rendre hommage à ses pairs. Dans ces épisodes, il est possible de détecter l'influence massive de Jack Kirby et l'hommage à New Gods (avec Darklord ressemblant superficiellement à Darkseid et sa planète à Apokolips), ainsi que celle de Walt Simonson. Les coutures de la combinaison spatiale de Jennifer Murphy font penser à celles dessinées par Jim Starlin dans le premier épisode consacré à Warlock. Toutefois, ces influences ne supplantent jamais le style idiosyncratique de Larsen.



Effectivement ces épisodes combinent une créativité sans limite pour l'intrigue, avec le développement de très nombreuses intrigues secondaires débutées dès le premier épisode. Larsen reprend l'origine de Mace, pour en dériver une autre Terre, avec un effet temporel en retour très adroit, laissant augurer de grandes difficultés pour la suite (la naissance de Damien Farrell, futur Darklord). Larsen se sert du thème de la Terre parallèle pour placer Savage Dragon face à une autre Debbie Harris pour un effet émotionnel des plus efficaces, sans tomber dans le mélodrame basique ou prévisible. Le lecteur découvre donc une aventure grand spectacle imprévisible, dans laquelle les personnages ne sont pas oubliés. Larsen développe ses intrigues secondaires à la façon Chris Claremont. D'un côté le lecteur suit les personnages principaux à chaque épisode, de l'autre les personnages secondaires bénéficient d'une page de temps à autre. Ainsi on apprend incidemment que Rita Medermade et William Jonson ont mystérieusement disparus. Mais ils n'apparaîtront que le temps d'une page durant ces 6 épisodes. De la même manière, Alex Wilde et Chris Robinson ont droit à 2 pages, essentielles, mais incompréhensibles pour un lecteur qui aurait l'étrange idée de commencer la série par ce tome.



Même pour un lecteur régulier de la série, certaines scènes laissent pensifs. En effet à cette époque, Erik Larsen supervisait plusieurs miniséries (dont celle de Freak Force, avec Barbaric, Ricochet, SuperPatriot, Dart, Mighty Man, et Rapture, 18 épisodes + 1 minisérie de 3 épisodes). Du coup, le dialogue entre Liberty et Justice dans une maternité reste un peu obscur si le lecteur n'a pas eu accès à la série Freak Force (en particulier l'organisation occulte "Covenant"). C'est encore pire pour le personnage de Jennifer Murphy qui est apparue pour la première fois dans une minisérie en 2 épisodes "Savage Dragon - Sex & violence" (1997), jamais rééditée, écrite par Larsen, Tom & Mary Bierbaum, et dessinée par Adam Hughes, Mark Lipka et Rick Mays.



Heureusement, la majeure partie des références est accessible pour le lecteur régulier. Il y a bien sûr cette pleine page où Savage Dragon et Jennifer Murphy sont allongés nus dans un terrain vague, au milieu des flammes, qui renvoie à la première apparition de Dragon dans le premier tome. Il y a Frank Darling continuant de chercher les origines de Savage Dragon, examinant la possibilité qu'il soit un extraterrestre, évoquant à la fois l'amitié de Darling pour Dragon, et titillant le lecteur avec l'origine réelle de Dragon qui ne sera révélée que des années plus tard (dans l'épisode 175 paru en 2011, voir Invasion). Il est facile de reconnaître les soucoupes volantes de "Mars attacks!" en provenance directe du tome précédent. En termes de références, Larsen s'amuse comme un petit fou avec une séquence mettant en scène Bill Clinton (alors président des États-Unis, mais sans stagiaire) qui se fait apostropher par SuperPatriot des plus sarcastiques. Larsen s'amuse comme un petit fou avec ses propres versions d'Hercule et Thor, ce dernier décrochant la palme de la suffisance et du plus grand balourd que les cieux aient enfanté. La découverte d'un distributeur de canettes contenant du "New Coke" (mis sur le marché le 23 avril 1985) est un grand moment d'humour.



Comme d'habitude, Erik Larsen n'oublie ni l'humour, ni ses personnages. Le cas le plus représentatif est certainement celui d'Amy Blecher (She-Dragon). Larsen renouvelle une fois encore la blague récurrente sur les voix qu'elle entend dans sa tête (en créant 5 personnages ex nihilo, juste le temps de 2 pages : Lovechild, Big Lug, Cowbloke, Might, Charisma). Toutefois, il ne se contente pas de la tourner en ridicule ; en fait il la réhabilite de manière admirable et crédible, la rendant encore plus touchante qu'elle n'était déjà, sans en faire ni une victime, ni une bécasse.



Si Larsen emprunte quelques tics aux dessinateurs qu'il admire, ses modalités de représentation restent inchangées. Les personnages masculins ont toujours des carrures impossibles (largeur d'épaules démesurée, taille fine, poings plus gros que la tête). Les personnages féminins ont une morphologie tout aussi fantasmée : taille de guêpe et poitrine énorme défiant les lois de la gravité. Larsen continue de titiller le lecteur avec des costumes fragiles, dont les déchirures révèlent les rondeurs de ces dames, le summum étant atteint lors d'une case où le lecteur voit une partie de l'auréole du mamelon de Jennifer Murphy, mais par le téton. Sous réserve de supporter ces particularités (voire de les apprécier en tant qu'exagérations réalisées sciemment à des fins parodiques), le lecteur ne peut que tirer son chapeau à Larsen qui réussit à caser des dizaines de personnages dans une case qui reste lisible, qui s'investit pour rendre chaque page de combat utile et titanesque.



Ce neuvième prouve avec éclat qu'Erik Larsen est un créateur infatigable, jamais à court d'idées, mariant le premier degré des conventions de superhéros, avec un second degré drôle et intelligent, pour des aventures ébouriffantes et originales, avec des personnages attachants. La vie de Savage Dragon continue d'épater et de divertir le lecteur dans End game (épisodes 47 à 52).
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Savage Dragon : Back In Blue

Ce tome contient les épisodes 145 à 150, écrits et dessinés par Erik Larsen. Il fait suite à United we stand (épisodes 139 à 144).



Au début de ce tome, Savage Dragon gagne sa vie en étant chasseur de primes. Il a 2 enfants à charge de 2 mères différentes : Angel Murphy (14 ans, la fille adoptive de Savage Dragon, suite à la disparition de Jennifer Murphy, sa mère décédée), et Malcom Eugene Jackson Dragon (12 ans, le fils de Savage et Ratpure également décédée). Le lieutenant de police Frank Darling vient lui proposer de rejoindre la police de Chicago, place qu'il a déjà occupée autrefois. Les autres policiers du commissariat l'accueillent à bras ouverts, malgré sa disgrâce médiatique. Il a en fait explosé le crâne d'un superhéros devenu incontrôlable devant les caméras de télévision. Son retour sur le devant de la scène pour lutter contre le crime organisé à Chicago aiguillonne la communauté de supercriminels qui le prennent pour cible. Les attaques sont brutales et escaladent jusqu'à un attentat terroriste meurtrier, et l'enlèvement des enfants du Dragon. Ce dernier bénéficie de l'aide de la police et d'un superhéros revenu d'une forme de stase temporelle. Il s'appelle Daredevil (un ancien superhéros du Golden Age, dont les droits sont tombés dans le domaine public).



Première bonne surprise : il est possible de commencer à lire Savage Dragon par ce tome, sans se sentir perdu. Dragon explique régulièrement sa situation à différents personnages, et Larsen a inclus un résumé en 4 pages des épisodes précédents, suffisant pour prendre pied dans sa continuité.



Deuxième bonne surprise : Erik Larsen n'a rien perdu de son agressivité brutale et quelque peu auto-complaisante. Concernant le comics "Savage Dragon", Erik Larsen le positionne à mi-chemin entre des comics de superhéros traditionnels Marvel et des comics plus ambitieux comme ceux de Vertigo. Il construit une trame linéaire simple qui embrasse les codes et les archétypes des comics des superhéros, avec un personnage principal brutal qui combat les méchants avec ces poings et une stratégie de base : je suis le plus fort et le plus résistant, je tape jusqu'à celui en face s'écroule. En particulier Larsen n'hésite pas à mettre le pouvoir de régénération du Dragon à rude épreuve et à montrer son épiderme entièrement brûlé et ses chairs à vif. De fait le niveau de violence est très élevé : tête de Solar Man pulvérisée en bouillie, bouche en sang, crâne écrasé entre deux mains, membre tranché par un sabre, etc. Larsen reprend les archétypes des comics de superhéros et les débarrasse de leur hypocrisie sous-jacente. Le lecteur veut du sang de la chique et du mollard, Larsen le leur donne sans retenue avec une inventivité certaine. Il a également régulièrement recours à un autre artifice qui est celui des femmes sexualisées à outrance. C'est ainsi que le lecteur retrouve une nouvelle incarnation de Dart dont le costume continue de lui rentrer dans les fesses comme un string, révélant ainsi une bonne surface de peau. Par contre, il ne va pas jusqu'à utiliser la nudité totale de ses personnages ; en ça il se cantonne dans la pudibonderie hypocrite des comics. Pour être honnête, si les personnages féminins mettent en avant leurs charmes, les personnages masculins brillent par leur incapacité à développer une relation adulte avec le beau sexe.



Erik Larsen propose donc un récit 100% divertissement, un peu régressif et dérivatif des comics de superhéros traditionnels. La tension ne baisse jamais, les combats font mal, les méchants sont cruels et vicieux, les gentils souffrent, le personnage principal est cool et assuré. Il incorpore une apparition de Barack Obama, juste pour le fun. Larsen joue également sur le fait que son lectorat est composé d'habitués des superhéros capables d'apprécier les hommages un peu pointus. Il y a donc l'utilisation du Daredevil (Bart Hill) créé en 1940 par Jack Binder et tombé dans le domaine public, également réutilisé par Alex Ross dans Project Superpowers, puis dans The Death Defying-Devil. Il emploie avec intelligence des codes graphiques mis au point par Jack Kirby pour marquer l'impact des coups, ou les fuites d'énergie liées aux superpouvoirs. Il rend également hommage au King en mettant en scène une équipe de gamins très débrouillards qui aident le superhéros.



Erik Larsen utilise un style qui privilégie l'efficacité sur l'esthétisme, sans tomber dans le bâclé. Sa mise en page est plutôt variée, avec une moyenne de 5 cases par page. Les dessins disposent d'un coté un peu brut avec lignes énergiques et rapides qui rendent bien compte de la brutalité de cette réalité. Les proportions du Savage Dragon sortent de l'ordinaire avec une largeur d'épaule colossale. Les individus normaux ont des proportions raisonnables (sauf peut être pour quelques poitrines féminines). Les individus dotés de pouvoirs ont des apparences travaillée, avec parfois des réminiscences grotesques héritées de Jack Kirby (le garçon qui pilote un gros monstre par la matière qui lui sort des yeux). Et tous les coups portés font mal, très mal.



Erik Larsen continue d'occuper la place de sale gosse des comics, en proposant des histoires 100% divertissement avec un superhéros qui encaisse tout et qui massacre du supercriminel à tour de bras, et avec des méchants vicieux qui ne reculent devant rien. Ses illustrations sont à l'avenant de l'histoire : rapide, brutale et efficace, avec une imagination qui évite le ronronnement ou le purement fonctionnel. Savage Dragon continue d'asséner sa justice expéditive et brutale dans Identity Crisis (épisodes 151 à 156).
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Savage Dragon, tome 10 : Endgame

Ce tome fait suite à Worlds at war (épisodes 41 à 46). Il comprend les épisodes 4 à 52, initialement parus en 1988, écrits, dessinés et encrés par Erik Larsen. La mise en couleurs est réalisée par le studio IHOC (avec Reuben Rude), avec un lettrage de Chris Eliopoulos. Il vaut mieux avoir commencé la lecture de la série avec le premier tome Baptism of fire pour saisir tous les tenants et les aboutissants des intrigues, sans parler de reconnaître la multitude de personnages.



D'un bel uppercut, Savage Dragon envoie valser Star dans le décor. Il s'agissait en fait de Kill-Cat (Alan Williamson) qui essayait de se faire passer pour Star pour intégrer l'organisation gouvernementale SOS (Special Operations Strikeforce) dirigée par Savage Dragon. Derick Stephenson indique à Dragon que SOS doit se rendre en Liberheim (un petit état d'Europe centrale) pour mettre fin aux agissements de Dread Knight, un dictateur en armure. Par la suite, Savage Dragon retourne à Chicago pour aider à contenir l'organisation criminelle Vicious Circle, sous la coupe de Horde. Il retrouve avec plaisir Alex Wilde. Pendant ce temps là, Rock (Joe Manning, à la tête de SOS) empêche l'invasion de New York par des Atlantéens.



En fait, Erik Larsen a réalisé 2 couvertures pour ce tome, et amazon a retenu la moins provocatrice. Sur la vraie couverture, Savage Dragon est en train de taper comme un sourd sur un opposant qui n'est pas dans le cadre du dessin. Dragon a eu son bras gauche d'arraché et il matraque son opposant avec. Pas une seule page de perdue : dès la couverture le mauvais goût et l'humour noir frappent. La page suivante est tout aussi ironique avec Star volant dans les airs sous l'effet de l'uppercut de Dragon, dans un dessin pleine page. Le dernier épisode comporte également un arrachage de bras (mais sur une autre personne) des plus violents.



Comme à son habitude, Erik Larsen insère des clins d'œil à des classiques des comics. Cela commence avec la mission de SOS en Liberheim : un dictateur en armure dans un pays d'Europe Centrale... voyons voir... ça commence par Doctor et ça finit par Doom. Sauf qu'ici, Dread Knight ne tient le choc que 6 pages et l'affaire est réglée (de manière originale) pour de bon. Larsen continue avec une invasion d'atlantéens (même si leur chef ne ressemble pas à Namor, difficile de ne par faire le rapprochement). En 3 pages, cette invasion a vécu et la défaite est sans appel. Les membres des Eternal Youths évoquent les Forever People créés par Jack Kirby, voir Fourth World. Les plus attentifs repéreront que les noms de Super Tough et Young Tough (respectivement Adam Ward et Burt West) sont des hommages aux acteurs incarnant Batman et Robin dans la série TV, respectivement Adam West et Burt Ward. Comme à son habitude, Larsen rend hommage aux grands noms des comics, sans jamais tomber dans le plagiat, en imprimant sa propre marque, que ce soit sur les personnalités ou l'environnement de ces personnages. il n'y a qu'à voir Zeus et Hercule pour se rendre compte que Larsen les interprète à sa manière, très différente de Marvel (série Thor ou Avengers) ou de DC (série Wonder Woman).



En termes de provocation adolescente, Larsen atteint le sommet avec Super Tough et Young Tough. Lorsqu'ils se retrouvent, ils se roulent une pelle bien baveuse, alors que Young Tough était l'aide adolescent (sidekick) de Super Tough. La provocation n'est pas dans la relation homosexuelle, mais dans la différence d'âge et la référence à l'hypothétique dimension amoureuse dans la relation entre Batman et Robin. Cette scène est rendue encore plus provocatrice par le soliloque homophobe d'Howard Niseman en arrière plan, débitant toutes les appellations les plus injurieuses possibles et dégradantes désignant des homosexuels. Comme à son habitude, le mode d'expression d'Erik Larsen est direct, sans ambages et d'une efficacité redoutable.



Larsen joue de manière provocatrice avec la fibre morale du lecteur. Ce baiser entre hommes n'a rien de glamour, mais la réaction homophobe de Niseman indique clairement l'imbécillité crasse de son comportement, et donc fait porter l'affection du lecteur vers le couple, sauf qu'il s'agit d'une relation entre un adulte et son ex-jeune protégé. Ils pourraient être père et fils, mais Larsen ne laisse planer aucun doute sur le fait qu'il s'aime d'amour. Larsen attaque de front les préjugés, sans finesse, mais sans hypocrisie. Dans la mesure où tous les autres superhéros du récit gagnent l'empathie du lecteur, ce dernier aurait tendance à penser que Larsen serait plutôt du côté des Tough, ou au moins tolèrerait leur relation, sans vouloir la banaliser ou la qualifier de normale.



Les aventures de Savage Dragon ne reposent pas uniquement sur des superhéros plus colorés et des combats plus violents. Au fil des épisodes, les personnages ont acquis une épaisseur qui les rend proches. Le lecteur ressent vraiment le désarroi de Barbaric qui a pu réaliser son rêve d'avoir des figurines à son effigie, et qui pourtant n'a pas obtenu ce qu'il voulait. Ces figurines ne se vendent pas parce son image a été utilisée dans un dessin animé pourri. En même temps il est facile de partager son plaisir d'être un jeune papa. Lorsqu'une héroïne perd ses 2 jambes dans l'affrontement de Lieberheim, le lecteur subit le choc de l'image, mais aussi compatit et se demande comment elle va surmonter ce traumatisme. Il éprouve un grand plaisir à voir Amy Blecher (She-Dragon) retrouver un équilibre, et s'épanouir. Il s'interroge sur les motivations réelles de William Jonson : amoureux de Rita Medermade, fuyant son frère Ralph Jonson, et cachant quelque chose. Il partage la joie de vivre de Savage Dragon et Alex Wilde qui se font plaisir sans complexe. Il constate que larsen n'hésite pas à décrire des femmes fortes qui prennent l'initiative sur les hommes, sur le plan sentimental, mais aussi dans l'action.



En plus de ces qualités, Larsen maîtrise sa narration qui associe conventions du superhéros (conflits physiques homériques et inventifs), personnages bariolés et aisément reconnaissables avec un bon niveau de détails (la dentition de Mako, avec trois rangées de dents), intrigue qui avance de manière significative (une réelle victoire sur Horde), superpouvoirs novateurs (et parfois horrifiques, les veines de Vein qui forment des filins préhensiles), le tout servi dans un humour omniprésent. L'amalgame entre Brainiape et Cyberface était déjà drôle (un singe avec un cerveau dans un bocal greffé au sommet de son crâne), il franchit un autre palier de parodie et d'absurde, avec l'ajout de l'amure d'Overlord (un grand moment de farce comique visuelle). Erik Larsen a même encore inventé un nouveau moyen de détruire Savage Dragon qui est déclaré mort au deux tiers du tome. C'est la raison pour laquelle le tome suivant s'intitule : Resurrection (épisodes 53 à 58).
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Savage Dragon, tome 8 : Terminated

Ce tome fait suite à A talk with God (épisodes 27 à 33). Il contient les épisodes 34 à 40 et 1/2, initialement parus en 1996/1997, écrits, dessinés et encrés par Erik Larsen, et mis en couleurs par le studio IHOC.



Ce tome commence plutôt bien pour Savage Dragon puisque la guerre des gangs pour la succession d'Overlord est achevée, et sa relation avec Sharona Jackson est clarifiée. Il est devenu immunisé aux vers de Horde. Son premier ennemi est Brainiape, un cerveau d'humain dans un corps de singe, et il reçoit l'aide d'Hellboy. Il doit quand même lutter contre une énorme créature sous-marine. Cyberface a pris la place d'Overlord et est en train d'accéder à un niveau de puissance supérieur grâce à un vampire invoqué par Abner Cadaver. Peter Klaptin est toujours porté disparu, enlevé par on ne sait qui. Rita Medermade finit par céder à l'appel de la chair. William Jonson (le flic qui porte tout le temps des lunettes de soleil) révèle une faiblesse psychologique inattendue. Star doit faire face à un conflit d'intérêt qui lui impose un choix cornélien. Savage Dragon se laisse pousser un collier de barbe. Il doit faire face aux 2 pires humiliations de sa vie (de nature scatologique) et pour couronner le tout il doit faire face à Adolph Hitler.



Dans l'introduction, Erik Larsen explique qu'il a créé Savage Dragon quand il était tout petit, qu'il lui a dessiné des aventures pendant des années (d'une qualité amateur grand débutant) et qu'il avait donc des plans à très long terme quand il a commencé la série à titre professionnel. Cela signifie aussi qu'en tant que créateur, il a une soif d'explorer différentes situations et qu'il ne se sent pas obligé de conserver un statu quo rassurant. En outre dans le tome précédent, Larsen avait retrouvé le pinacle de force créatrice (dans le genre qu'il a choisi) alimentant son récit d'un flux continu de trouvailles.



Dès le premier épisode de ce huitième recueil, le lecteur constate que Larsen n'a rien perdu de sa verve, de son inventivité, et de sa provocation de sale gosse. Mike Mignola lui a prêté son personnage Hellboy, et pour Larsen le point de jonction évident qui occasionne sa rencontre avec Savage Dragon ne peut être rien moins qu'Adolph Hitler en personne... ou presque. Larsen se délecte à reprendre un cliché éculé des films de série Z (Oh ! Mon dieu ! Ils ont sauvé le cerveau d'Hitler.) pour l'assaisonner à sa façon, aboutissant à une variation savoureuse, dans un registre humoristique irrésistible, de mauvais goût assumé. En termes de mauvais goût assumé, Larsen y va franco. Non seulement Savage Dragon est avalé par un monstre et doit se frayer un chemin pour sortir par les voies naturelles de transit (si vous n'avez pas compris, je ne vous ferai pas un dessin), mais en plus il doit se battre contre un sinistre individu appelé Dung dont le superpouvoir est de projeter un flux d'excréments en continu, encore pire qu'Heavy Flo (apparue dans le numéro 32). Le résultat est aussi immonde que scatologique, dans une couleur boueuse des plus évocatrices, une provocation régressive du plus mauvais goût, et d'une grande efficacité.



Tout du long de ces 7 épisodes et demi, Erik Larsen est à fond, que ce soit dans les provocations crades, les différents registres d'humour, l'intrigue, ou les relations entre les personnages. Larsen n'est pas limité à la blague scatologique, il utilise un large registre de comiques. Il y a de l'humour très visuel (le ver se tordant par terre, avec une grimace grotesque), de la dérision référentielle (ils ont sauvé le cerveau d'Hitler), de la comédie de situation (Frank Darling découvrant Savage Dragon en train de se faire masser le dos par une asiatique), encore de la dérision référentielle (Dragon en géant écrasant des martiens sous son pied), des comportements comiques (l'hilarant manque de confiance de Rita Medermade et celui tout aussi dévastateur de William Jonson), etc. Larsen prend sa narration très au sérieux, à commencer par l'efficacité et la diversité de son humour. À plusieurs reprises, le lecteur se surprend à sourire franchement en se disant "Non, il ne va pas faire ça ?", ou "Non, je ne peux pas croire qu'il ait fait ça.".



Du point de vue de l'intrigue, Larsen n'est jamais à court d'idée ; son imagination très fertile lui permet de se renouveler sans effort apparent, avec une verve épatante. Alors que la guerre des gangs est terminée et qu'un nouveau supercriminel a pris la pègre de Chicago en main, le lecteur pourrait craindre que tout ça soit reparti pour un tour. Il n'en est rien. Larsen déjoue les attentes du lecteur en incluant à bon escient des invités (Hellboy et Mars attacks!, version cartes à collectionner) et en développant un criminel plus intelligent que la moyenne, une pléthore de supercriminels aussi variés que qu'inventifs, et des développements de relation entre les personnages savoureux et nuancés.



Erik Larsen estomaque à nouveau en mettant en scène une centaine de personnages différents, tous disposant d'un costume les rendant immédiatement identifiables, tous facilement reconnaissables d'un tome à l'autre. Le lecteur retrouve ses tics graphiques habituels : taille de guêpe et grosse poitrine pour les femmes, taille de guêpe et largeur d'épaule impossible pour Savage Dragon. Il retrouve également la facilité déconcertante avec laquelle Larsen conçoit des découpages immédiatement lisibles, et des mises en scène dans lesquelles le lecteur se sent impliqué, même s'il s'agit d'une énième baston. Il tente de s'approcher du style de Mike Mignola pour la représentation d'Hellboy, sans y réussir, mais en trouvant un compromis fonctionnel entre ce style et le sien. Il réussit une représentation alliant premier degré et second degré, absolument remarquable pour les martiens. Il réussit cet amalgame alliant horreur et dérision avec la même dextérité pour le personnage de Wipple Octopus (celui qui a des tentacules qui lui sortent de l'abdomen). Il réussit avec habilité chaque dosage entre ces 2 composantes. Il y a encore un moment d'équilibre exceptionnelle lorsqu'un criminel à tête de poulet picore un ver doté de conscience, l'apogée de la dérision tout en permettant une lecture premier degré. Il y a des moments d'horreur visuelle pure (le garçon qui révèle des orbites vides lorsque les 2 antennes du monstre sont arrachées de ses yeux) et des moments de comédie pure (le comportement puéril et suffisant de KillCat).



Ce huitième tome des aventures de Savage Dragon est un pur régal du début jusqu'à la fin, mêlant superhéros, second degré, aventures, comédie, hommage à Jack Kirby, références à la culture populaire, parodie, pour une histoire de haute tenue, et un humour irrésistible. Larsen continue de se déchaîner dans Worlds at war (épisodes 41 à 46).
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Savage Dragon, tome 7 : A Talk With God

Ce tome fait suite à Gang war (épisodes 22 à 26). Il contient les épisodes 27 à 33, initialement parus en 1996, écrits, dessinés et encrés par Erik Larsen, mis en couleurs par le studio IHOC. Ces épisodes bénéficient d'une introduction de 2 pages écrites par Jim Steranko.



Alors que Savage Dragon vient d'emménager chez elle, Sharona Jackson (Rapture) lui fait sa demande en mariage, ce qui provoque chez Dragon des visions de petits Dragons et de petites Rapture courant partout autour de lui. Il prend le temps de réfléchir avant de lui donner sa réponse. Ces visions sont encore aggravées par l'intrusion de The Maxx (un personnage créé par Sam Kieth). Par la suite les agissements de The Fiend (entité malveillante possédant Bonnie Harris) vont projeter Savage Dragon dans les Enfers où il va croiser Spawn (un personnage créé par Todd McFarlane), le Diable et même Dieu. En parallèle, Peter Klaptin raconte les origines de Star, et le lien qui l'unit à Chris Robinson.



C'est déjà une reconnaissance significative que Jim Steranko adoube Erik Larsen par le biais d'une introduction, mais en plus celle-ci propose une vision pénétrante de ces épisodes. Steranko insiste en particulier sur le caractère imprévisible de l'intrigue, sur la capacité de Larsen à surprendre son lecteur. Il y a bien sûr cette rencontre avec le Diable, puis avec Dieu qui vaut son pesant de cacahouètes. Erik Larsen ne change rien et ne fait pas dans la dentelle. Ses dessins sont plus grands que nature, toujours dans la lignée de ceux de Jack Kirby (la capacité d'abstraction en moins), pour une grande baston, avec des coups de poings bien sentis. À l'époque (1996), quelques créateurs plus ambitieux que d'autres avaient mis en scène la rencontre de leur personnage avec Dieu, ou tout du moins l'entité omnipotente de leur réalité (Animal Man avait rencontré Grant Morrison, Cerebus avait rencontré Dave Sim). Larsen ne se dégonfle pas, Savage Dragon rencontre Dieu et lui pose les questions difficiles (Quelle religion a raison ? Que devient l'âme quand on meurt ?). Les réponses ne permettront pas au lecteur d'atteindre un nouveau palier de spiritualité, mais elles sont moins débiles que prévues, tout en gardant leur pouvoir comique.



Erik Larsen s'empare ainsi d'un modèle de scénario éprouvé dans lequel le personnage principal grimpe les échelons du pouvoir jusqu'à s'approcher du pouvoir ultime (ici un dieu). Il sait faire en sorte que Savage Dragon ne perde rien de sa personnalité dans cette aventure peu commune. Il continue également à manier la parodie avec une dextérité inattendue. À l'évidence, le lecteur ne peut pas prendre au sérieux ce Dieu blanc, à la longue barbe, vêtu d'une ample tunique, s'exprimant d'une voix tonitruante (caractères de hauteur supérieure et police gothique), encore moins ce diable rouge et agressif. Larsen se moque donc ouvertement des conventions propres aux personnages sataniques des comics de superhéros, tous dérivés d'une imagerie naïve et abêtie de la tradition chrétienne, en prenant au pied de la lettre ces stéréotypes dégénérés, réduits à ce qu'ils ont de plus générique. Malgré le recours auxdits stéréotypes, il sait insuffler un humour ravageur, et faire apparaître les convictions spirituelles très pragmatiques de Savage Dragon (peut-être celles de Larsen).



Dans les tomes précédents Larsen semblait parfois s'approcher des limites de son concept : un superhéros sans déguisement, pragmatique, qui tape plus fort que tous ses opposants jusqu'à gagner, parodiant avec respect les conventions du genre superhéros. Par comparaison, il montre ici que la personnalité des protagonistes s'est assez étoffée pour porter la narration. Dès le premier tome, Larsen avait insisté sur le fait que Dragon n'a aucune intention de porter un costume moulant aux couleurs voyantes. Il s'agit d'un individu pragmatique, sans ambition intellectuelle ou philosophique, avec une approche prosaïque de la vie. Sa rencontre avec Dieu s'inscrit dans ce registre, pour un effet à la foi comique et plein de bon sens. Larsen n'a pas l'envie ni la prétention de rivaliser avec Grant Morrison en termes de métacommentaires (mais les comics de Larsen sont plus drôles que ceux de Morrison).



Ces épisodes bénéficient donc de l'investissement affectif du lecteur dans le personnage que Larsen a bâti à coup de petites touches discrètes au fil des précédents épisodes. En particulier la demande faite par Sharona Jackson relève bien d'un dispositif de sitcom, mais elle est nourrie par la personnalité de Sharona et Savage. Ces 2 tourtereaux ne débitent pas des réparties génériques au kilomètre, leur situation est vraiment particulière et déterminée par ce qu'ils sont et les spécificités de leur relation. En tant que dessinateur, Larsen s'en donne à cœur joie pour combiner provocation et effet comique. Il y a cette pleine page dans laquelle Sharona est allongée sur le dos, les jambes bien écartées, une ribambelle de marmots s'élançant vers le lecteur, soit à l'image du Dragon (pour les garçons), soit à l'image de Sharona (pour les filles). Dans un autre dessin pleine page, il y a également une belle utilisation du cordon ombilical. Larsen n'a rien perdu non plus de sa capacité à créer des visuels dérangeants ou horrifiques (Savage Dragon perdant ses bras, ça fait très mal, ou Dragon affublé de 2 bras rachitiques, assez choquant).



De scène en scène, le lecteur peut à nouveau constater la symbiose parfaite entre Erik Larsen scénariste, et Erik Larsen dessinateur. Le combat entre le Diable et Dieu à grands coups de poing dans la tête est tordant par sa démesure, son premier degré, sa cohérence avec le mode d'affrontement de Savage Dragon, sans une once d'intellectualisme ou de prétention, avec un niveau de divertissement exceptionnel. Les manifestations visuelles des atermoiements de Dragon (accepter la proposition de Sharona ou non) présentent une vitalité humoristique remarquable, à commencer par l'impression qu'a Dragon que toutes les femmes veulent de lui, pressentant qu'il sera bientôt casé. Larsen s'amuse également à établir une référence visuelle avec le premier épisode de la série, quand Savage Dragon se retrouve nu au milieu de décombres en flamme.



En termes d'humour, il serait impardonnable de ne pas évoquer l'inénarrable Kill-Cat (Alan Williamson), bellâtre confiant dans la certitude inébranlable que Jill August (Dart, une femme au caractère bien trempé) est sous son charme irrésistible, même si elle ne le montre pas. Dart l'a envoyé à l'hôpital pour avoir agressé Justin Farrell, son amant qui se trouve dans le lit d'hôpital à côté de celui de Kill-Cat. Elle fait irruption dans la chambre, Kill-Cat étant convaincu qu'elle vient prendre de ses nouvelles. Elle tire le rideau de séparation entre les 2 lits et fait l'amour avec Justice, ce que Kill-Cat n'a aucune chance d'ignorer. Larsen réalise un découpage impeccable, avec un rythme enlevé, pour une chute sans pitié contre l'incapacité de Kill-Cat à assimiler la réalité du mépris de Dart.



À nouveau, Larsen remplit ces 7 épisodes jusqu'à la gueule de personnages, de péripéties, d'interactions, de trouvailles... Dans le lot, il n'y a que les "origines secrètes" de Star dont le rythme de narration semble un peu artificiel, séquence découpée en plusieurs parties intercalées dans l'intrigue principale. Toutefois cette origine secrète joue à nouveau avec les attentes du lecteur (une variation inventive sur Peter Parker, avec un sosie de Mary Jane) pour déboucher sur une histoire étonnamment noire.



Avec ce septième tome des aventures de Savage Dragon, Erik Larsen prouve qu'il est capable de dépasser le principe de base de la série (aventures et parodie de superhéros) et de faire vivre ses personnages au point qu'ils semblent dotés d'une vie autonome, sans rien perdre en horreur, en humour, en divertissement. Une très grande réussite. Erik Larsen continue à donner vie à Savage Dragon dans Terminated (épisodes 34 à 42 + 1/2).
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Savage Dragon, tome 6 : Gang War

Ce tome fait suite à Revenge (épisodes 17 à 21). Il contient les épisodes 22 à 26, initialement parus en 1995/1996, écrits, dessinés et encrés par Erik Larsen, avec un lettrage de Chris Eliopoulos, et avec une mise en couleurs du studio IHOC.



Ayant accepté de collaborer avec la police, Cyberface bénéficie d'une amnistie totale. Sharona Jackson (Rapture) a fait un grand ménage dans son appartement et a investi dans un lit avec matelas d'eau ce qui intrigue fortement Horridus. Savage Dragon est en train de se battre contre Carnage (un gros méchant pas beau à la peau violette) avec l'aide de Raphaelo, Michaelangelo, Donatello et Leonardo (les Teenage Mutant Ninja Turtles). Antonio Seghetti (Overlord) est enterré dans le calme. Mais la mort d'Overlord laisse un vide dans la chaîne de commandement du crime organisé, et bientôt plusieurs prétendants vont tenter de s'imposer, déclenchant des affrontements sanglants faisant plusieurs victimes parmi les civils. The Fiend réussit à blesser Savage Dragon et à l'envoyer à l'hôpital. Amy Blecher tente d'en profiter pour prendre la place de Dragon au sein de la police de Chicago. Le mystère de l'identité de Star est enfin révélé, alors que Peter Klaptin fait du gringue à Amanda Mills. Enfin Johnny Redbeard fait sa réapparition.



Fort logiquement, après la disparition d'Overlord, Erik Larsen aborde la question de sa succession (la nature ayant horreur du vide) comme intrigue principale. Il n'oublie pas ses intrigues secondaires, toujours aussi nombreuses et divertissantes, qu'il s'agisse de l'identité secrète de Star, ou de la vengeance de The Fiend/Bonnie Harris contre Savage Dragon. Il continue de développer les relations entre les personnages, à commencer par celle unissant Savage Dragon et Sharona Jackson, mais aussi entre Dragon et Alex Wilde, sans oublier la reconnaissance envahissante d'Amanda Mills. Le lecteur retrouve avec plaisir des personnages hauts en couleur le temps d'une séquence : Johnny Redbeard bien sûr (une parodie de John Byrne qui prend plus de consistance) ou Burt West (Mace, un parodie du Punisher dans ses méthodes expéditives), ou encore le très attachant Mighty Man (sa bonne humeur et sa volonté de bien faire). Ce qui est appréciable est que Larsen ne se repose pas sur ses lauriers et qu'il fait l'effort d'aller de l'avant. Par exemple, il ne contente pas de resservir le gag sur les voix intérieures de She-Dragon, il développe sa personnalité, et montre en quoi sa personnalité troublée la dessert, sans l'humilier, en la conservant très humaine. Larsen révèle une grande capacité à transmettre l'humanité de ses personnages imparfaits, mais suscitant une forte empathie.



L'une des difficultés que Larsen doit surmonter tient à la nature même de son comics. Il a choisi de raconter une histoire de superhéros, recourant à toutes les conventions du genre, à la fois en les utilisant en premier degré, à la fois en les exagérant pour induire une forme de dérision qui se moque de ces conventions, tout en ayant conscience de s'en servir, créant ainsi une mise en abyme dans laquelle Larsen se moque de lui-même, dans une forme savoureuse d'autodérision. Le lecteur prend par exemple conscience que Savage Dragon est grièvement blessé de manière régulière et qu'il termine à l'hôpital une fois par tome. Pour éviter la redite, Larsen doit donc trouver de nouvelles formes de blessures, toujours plus inventives. C'est ainsi que Savage Dragon avait fini empalé dans le tome 3. Ici, Larsen imagine un châtiment corporel qui conduit à ce que tous les os de Dragon soient brisés et qu'ils se ressoudent (grâce à ses capacités de guérison accélérée) de manière anarchique. Cela permet de renouveler la nature des blessures, mais aussi de donner lieu à des dessins de Dragon en vrac, situation à la fois horrible et pétrie d'humour noir.



Tout au long de ces 5 épisodes, le lecteur peut admirer la complémentarité exceptionnelle en Erik Larsen scénariste, et Erik Larsen dessinateur. Il combine comme personne un premier degré descriptif rendant crédibles et menaçantes 4 tortues anthropomorphes, avec une gentille moquerie d'adulte ayant conscience du caractère outré de ce qu'il représente (2 des tortues faisant une grimace pas possible en prenant conscience de la hauteur de la chute qui les attend). Il maîtrise parfaitement les conventions visuelles des comics de superhéros, et il en tire le meilleur parti. Parmi les prétendants à la succession d'Overlord, se trouve Brainiape, un gorille doué de conscience et de parole, dont le sommet de la boîte crânienne est remplacé par un dôme en verre, laissant voir son cerveau. Le lecteur reconnaît immédiatement une parodie de supercriminel de Flash ou de la Doom Patrol, avec une apparence héritée des années 1950. Alors que Brainiape essaye de s'imposer comme nouveau chef de la pègre, un autre supercriminel fait observer qu'avec cette apparence, il ne sera jamais accepté par les humains, tournant ainsi en dérision l'apparence du personnage. Larsen dose avec soin ses citations visuelles, et avec une grande intelligence (par exemple le lecteur constate la totale pertinence de la ressemblance d'Amanda Mills avec Mary Jane Watson).



Larsen sait également composer des pages d'une rare intensité dramatique, telles celles où Mighty Man se retrouve contraint d'effectuer une sale besogne sanglante. Il faut voir l'intensité du regard de Mace pour le croire, et il suffit de la voir pour comprendre qu'il y a longtemps qu'il n'est plus normal dans sa tête. Enfin il fait preuve d'une inventivité débridée qui en impose, puisqu'il n'insère pas moins de 180 personnages différents (tous nommés dans ce tome ou dans les autres) en 5 épisodes.



Avec ce sixième tome, Erik Larsen continue de régaler et d'impressionner ses lecteurs. Il bâtit son récit sur une trame solide, en développant des intrigues secondaires filées d'épisode en épisode. Il gère une distribution pléthorique de personnages, tous dotés de caractéristiques les rendant immédiatement identifiables. Il se renouvelle dans l'utilisation des conventions du genre superhéros en introduisant des variations significatives et inventives. Il ne néglige ni les personnages, ni leurs interactions, ni les scènes d'action, ni les moments chocs, ni les respirations humoristiques. Le titre du tome suivant promet une confrontation d'une ampleur sans égale : A talk with God (épisodes 27 à 33).
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