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Citation de Charybde2


Il semble que cela ait été un désir venant de lui. Oui. Que le bateau soit démoli en laissant en dernier le pont de commandement. Exactement le contraire de ce qu’on fait habituellement ici, à Chittagong. Ces ouvriers du Bangladesh sont dans un tel état de misère que d’habitude le pont de commandement, avec ses objets de prix, disons ainsi, est pris d’assaut tout de suite. Par les premiers, ceux qui sont encore suffisamment robustes pour arriver à bord en montant à mains et pieds nus le long des chaînes des ancres.
Mais cette-fois ci, cela n’a pas dû se passer ainsi. Ils ont fait comme il le demandait, lui. Une des rares choses sûres dans cette histoire de souvenirs payants et d’hypothèses passionnées. Ils ont démoli tout le bateau en commençant par la proue. Cloison après cloison, pont après pont, cale après cale. Puis ils ont fait le tour du château arrière et, de la poupe, ils sont repartis pour arriver à nouveau au château.
C’est ainsi que je suis aujourd’hui en haut d’une espèce de tour haute de trente mètres plantée dans le sable pourri de Chittagong. Comme un gigantesque clou de la Croix. On y arrive par une échelle de pilote, mais multipliée par vingt. Une peine terrible avec cette chaleur. L’air ici est de l’eau. À travers les vitres encore intactes, je vois une forêt de fer. Des cheminées sans chaufferies, des antennes, des grues. Des proues sans bateau, des hélices sans poupes. Le soir, l’endroit où je me trouve est le seul objet de la côte qui ait encore une lumière allumée. Le seul encore vivant. De loin, ça doit sembler le plus horrible, ou peut-être le plus idiot. Même de nuit, même à cette hauteur, la puanteur est insupportable.
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