AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de CeCedille


Cependant que toutes ces choses se jugeaient, une troupe de comédiens de campagne était arrivée pour venir donner du divertissement à ceux qui donnaient de la terreur à tout le monde. Ils dressèrent d'abord leur théâtre, et furent prêts à jouer le lendemain […] Ils disaient tout rôle du mieux qu'ils pouvaient, changeant l'ordre des vers et des scènes, et implorant de temps en temps le secours d'un des leurs qui leur suggérait des vers entiers, et tâchait de soulager leur mémoire. [… ] Il y avait une de leurs femmes qui récitait assez bien, et il faut leur donner cette louange qu'ils représentaient assez bien le burlesque, parce qu'ils étaient assez burlesques eux-mêmes, et qu'ils étaient meilleurs farceurs que comédiens. Comme ils sont seuls dans la province, il faut bien se contenter d'eux. Cela fait qu'on y va presque pour y trouver compagnie plutôt que pour y entendre les comédiens, et qu'il s'y passe bien d'autres amours que ceux qu'on représente sur le théâtre. L'assemblée est composée de quelques dames de la ville qui sont de tous les divertissements, de quelques galants qui les suivent ou qui les mènent, et de quelques-uns de Messieurs des Grands-Jours qui jouent des personnages bien différents dans cette ville. Ils font dresser des échafauds pour les exécutions, ils font dresser des théâtres pour leurs divertissements ; ils font le matin les tragédies dans le palais, et viennent entendre l'après-dînée les farces dans le jeu de paume ; ils font pleurer bien des familles, et veulent après qu'on les fasse rire et comme si la judicature était attachée à leur robe, ils dépouillent toute leur sévérité en la dépouillant, et ne se font plus craindre lorsqu'ils sont habillés de court. Ils voient pourtant dans la représentation du théâtre une partie de ce qu'ils voient en instruisant les procès, c'est-à-dire des tyrans qui ont opprimé les faibles, des amants qui ont fait mourir leurs rivaux indignement, des femmes qui ont donné ou qui ont reçu du poison de leurs maris, et cent autres passions dont on se plaint dans la province et dont on se rit dans le tripot, qui peuvent pourtant servir pour exciter à la justice, parce qu'on les représente toujours punies. (p. 161)


Commenter  J’apprécie          10









{* *}