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Citation de RAMSES1967


Petit Joseph allait gaillardement sur ses cinq ans. C'était un bonhomme fluet et fragile, une boule de nerfs, en butte à des crises d'hyperémotivité, dont il ressortait chaque fois plus lucide et mature. Honteux de se laisser aller à des écarts de conduite incontrôlables, il cherchait après chaque débordement à se faire pardonner.
Paradoxalement, à cinq ans, il en avait déjà assez d'être traité en enfant. Il jubilait intérieurement d'être considéré comme un grand garçon, lorsqu'il rapportait de chez le boucher, le boulanger ou l'épicier, la monnaie des courses, au sou près. Toutefois, pour le mettre à l'épreuve, la grand-mère ou l'une des tantes s'assuraient rituellement, avec un certain scepticisme, que rien ne manquait, vidant le porte-monnaie sur la table, avant de compter les pièces une à une, non sans un hochement de tête approbateur, mêlé d'incrédulité.
Dans les moments difficiles, Petit Joseph cherchait l'aile tutélaire de son père, qu'il adorait comme une idole. En vertu de cette piété filiale inébranlable, il pensait être en mesure de s'adresser à lui comme un grand. Il avait une si haute opinion de son père, contremaître en chef de la grande fabrique, qu'il ne pouvait comprendre que celui-ci dût enlever humblement sa casquette, ou son chapeau le dimanche, quand il croisait Monsieur le directeur de la grande école des garçons, Monsieur le curé, les abbés, les soeurs enseignantes de l'école des filles ou les quatre soeurs gardes-malades du village.
Qu'un enfant fût tenu de le faire, en signe de respect et de poli­tesse, comme la mère l'avait demandé à Joseph, ne souffrait aucune contestation. Mais que les convenances l'exigeassent du père, responsable dans une grande entreprise, témoignait d'une injuste et insupportable sujétion
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