L'après-gaullisme ? Nous y sommes déjà, ou presque. Deux tours, et le système fut ébranlé. Trois petits tours, et puis s'en vont truands, enfants de chœur, combinards et barbouzes... Le gaullisme alimentaire trouvera d'autres râteliers. Tant pis pour les renards, les loups, les crocodiles... Mais pitié pour l'immense troupeau des moutons ! Le gaullisme sentimental se sentira comme orphelin... La France midinette est fragile du cœur et prompte à s'enflammer. Chez nous, les sauveurs se pressent au portillon ; ils offrent, tous les vingt ans, leurs services et un homme à aimer. Il faudra, pour nous guérir de l'infantilisme, une médecine de cheval et une cure d'insolence. Ici, les coups d'Etat réussissent quand les banquiers font cadrer leurs intérêts avec les passions des grenouilles qui demandent un roi, ou ce qui en tient lieu... Refaire un citoyen exige qu'on torde le cou à l'imbécile qui se cache au tournant de son cœur, prêt à bondir quand passe le képi. Assez de ce respect qui suinte de partout ! Place à l'impertinence !
Parqués depuis l'aube dans un salon de la préfecture, les magistrats et les hauts fonctionnaires, mâles et femelles, ne donneraient pas leur place pour une nuit d’amours, les premiers avec Liz Taylor, celles-ci avec le Montaure, et restent alignés comme au jeu de massacre.
Ils rougiront comme la rosière d’Espalion quand le Président passera devant eux et écoutera d’une oreille distraite leurs noms et leurs titres. Ah ! s’il songeait à leur tapoter la joue, comme ils seraient heureux ! Autant que le jour de la distribution des prix, l’année où ils eurent l’excellence, et ont-ils jamais cessé d’être bons élèves ?
Ils devront se satisfaire d’un regard ennuyé et lointain qui va flotter un instant au-dessus d’une calvitie prosternée ou d’un chignon emporté dans le tourbillon d’une révérence préméditée.
S’ils levaient les yeux, ils découvriraient, horrifiés, que leur rencontre a provoqué chez l’illustre visiteur ce mouvement du menton vers des sommets inaccessibles au commun, dont l’équivalent, chez le cheval, signifie qu’il s’impatiente.
Un magistère royal...Une audience mondiale...Une culture prodigieuse...Des disciples subjugués...D'innombrables jeunes esprits marqués par lui à jamais. Et pourtant...