AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Nastasia-B


Ainsi le lyon guéry se pourmenoist par la forest. À quelle heure une vieille sempiterneuse ébuschetoit et amassoit du boys par ladicte forest ; laquelle, voyant le lyon venir, tumbat de peur à la renverse de telle faczon que le vent luy renversa robbe, cotte et chemise jusques au dessus des espaules. Ce que voyant, le lyon accourut de pitié veoir si elle s'estoit faict aulcun mal, et considérant son comment a nom, dist : « O pauvre femme, qui t'a ainsi blessée ? »
Et, ce disant, apperceut un regnard, lequel il l'appella, disant :
— Compère regnard, hau, cza, cza, et pour cause !
Quand le regnard fut venu, il luy dict :
— Compere, mon amy, l'on a blessé ceste bonne femme icy entre les jambes bien villainement, et y a solution de continuité manifeste ? Regarde que la playe est grande : depuis le cul jusques au nombril, mesure quatre, mais bien cinq empans et demy. C'est un coup de coignie ; je me doubte que la playe soit vieille. Pourtant, affin que les mousches n'y prennent, esmouche-la bien fort, je t'en prie, et dedans et dehors. Tu as bonne quehue et longue : esmouche, mon amy, esmouche, je t'en supplye, et ce pendent je voys quérir de la mousse pour y mettre, car ainsi nous fault-il secourir et ayder l'un l'aultre. Esmouche fort ; ainsi, mon amy, esmouche bien, car ceste playe veult estre esmouchée souvent ; aultrement la personne ne peut estre à son aise. Or esmouche bien, mon petit compère, esmouche ! Dieu t'a bien pourveu de quehue ; tu l'as grande et grosse à l'advenant ; esmouche fort et ne t'ennuye poinct. Un bon esmoucheur, qui, en esmouchant continuellement, esmouche de son mouchet, par mousches jamais émouché ne sera. Esmouche, couillaud ; esmouche, mon petit bedaud ! Je n'arresteray gueres. […]
Le pauvre regnard esmouchoit fort bien et deçà et delà, dedans et dehors ; mais la faulse vieille vesnoit et vessoit puant comme cent diables. Le pauvre regnard estoit bien mal à son ayse, car il ne sçavoit de quel cousté se virer pour évader le parfum des vesses de la vieille ; et, ainsi qu'il se tournoit, il veit que au derrière estoit encores un aultre pertuys, non si grand que celluy qu'il esmouchoit, dont luy venoit ce vent tant puant et infect.
Le lyon finablement retourne, portant de mousse plus que n'en tiendroyent dix et huyt basles, et commença en mettre dedans la playe avecques un baston qu'il aporta, et y en avoit jà bien mys seize basles et demye et s'esbahyssoit :
— Que diable ! ceste playe est parfonde : il y entreroit de mousse plus de deux charretées.
Mais le regnard l'advisa :
— O compère lyon, mon amy, je te prie, ne metz icy toute la mousse ; gardes-en quelque peu, car il y a encores icy dessoubz un aultre petit pertuys qui put comme cinq cens diables. J'en suis empoisonné de l'odeur, tant il est punays.

Chapitre XV.
Commenter  J’apprécie          472





Ont apprécié cette citation (42)voir plus




{* *}