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Citation de sld09


sld09
29 septembre 2017
Florent tira son épée de plastique du fourreau puis, d'un geste fier, mit sa main sur son cœur.- Tout autre que mon père l'éprouverait sur l'heure ! lança-t-il en défiant un ennemi imaginaire.Comme il avait vu la pièce plusieurs fois et, surtout, assisté aux nombreuses répétitions, il connaissait toutes les répliques, dont certaines lui plaisaient particulièrement.- Tout autre que mon père...Il leva les yeux sur le cartel, constata qu'il était à peine deux heures. Au théâtre d'Arles, sa mère n'était donc pas encore entrée en scène. Il l'imagina, maquillée et coiffée, splendide dans sa longue robe de velours rouge. Pourquoi prétendait-elle que la place d'un petit garçon ne se trouvait pas dans les coulisses ? Il adorait ça !Sur la pointe des pieds, il alla jusqu'à la porte du séjour où Fanélie dormait, affalée dans la bergère râpée. La brave femme était censée le garder mais, après le déjeuner, le sommeil la prenait toujours. Et aujourd'hui, elle avait abusé des cerises à l'eau-de-vie, son péché mignon, sous prétexte qu'à l'approche de Noël on avait bien droit à quelques friandises. La chaleur du feu aidant, sa sieste pouvait durer tout l'après-midi.Avec un petit soupir, Florent s'approcha de la fenêtre du vestibule. Il ne voulait pas réveiller Fanélie parce qu'il avait une idée en tête. Le genre d'idée qui ne manquerait pas de faire hurler les adultes, il en était certain.Du bout des doigts, il effaça la buée sur la vitre et contempla le paysage figé par le givre. «Ce sera un Noël blanc !» avait prédit sa mère le matin même. Oui, mais un Noël triste et démuni, Florent le savait bien.- Tout autre que mon père..., articula-t-il en silence.Quel autre ? Impossible de changer de père, or le sien était parti. Parti avec ses valises à la main, et chassé du cœur de Florent parce qu'il avait dit des choses terribles.Le ciel plombé semblait chargé de neige, ce qui était somme toute réjouissant. S'imaginant déjà sur sa luge, le petit garçon tourna son regard vers la colline. Des chênes kermès s'accrochaient à son flanc, tandis qu'au sommet des buissons d'amélanchiers et d'éphédras étaient battus par les vents. Rien de tout cela ne pourrait faire un arbre de Noël, mais bien plus loin, au-delà de la crête suivante, Florent avait repéré des pins.Par un rapide calcul, il estima qu'il avait presque trois heures devant lui avant la nuit. Fanélie dormirait-elle aussi longtemps ? Il pouvait lui laisser un mot expliquant qu'il était allé jouer dehors et, à condition de se dépêcher...Vaguement mal à l'aise, il hésitait encore. L'aventure le tentait mais présentait des risques, dont le plus grave serait de décevoir sa mère. N'avait-il pas solennellement promis d'être sage ? Cependant, était-ce désobéir que d'aller chercher un sapin de Noël ? Après tout, personne ne lui avait interdit de sortir de la maison. Seul un chemin de terre y menait, la route était loin, les voisins aussi, aucun danger ne le guettait.«Ce sera le paradis, ici !» avait affirmé son père deux ans plus tôt, lorsqu'ils étaient venus s'installer dans ce coin perdu des Alpilles. Un étrange paradis que ce désert de cailloux et de genévriers où s'élevait une bâtisse trapue, faite de galets rehaussés de pierres de taille près des ouvertures. Plus grande qu'un oustau, plus petite qu'un mas, elle avait une certaine allure avec son toit de tuiles romaines, ses volets bleus, sa treille, mais on voyait bien qu'elle était à l'abandon depuis des lustres.
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