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Citation de KatherineT


Mais tu n'as pas toujours été lâche, tu n'as pas toujours été un arbre sec. Il te semble même avoir longtemps lutté contre la lâcheté. Tu la connaissais bien. Elle glissait des épaules affaissées de ton père quand, dans le long couloir de l'appartement de Chartres, il t'arrivait de le croiser. Elle se camouflait sous le désespoir de ta mère. C'était comme une odeur qui avait imprégné les murs, les rideaux de velours bordeaux qu'on n'ouvrait à peine, l'affreux mobilier anglais de la salle à manger où personne ne s'asseyait jamais, car vous ne receviez pas de visite, mais surtout ce coin de la cuisine où, sur une chaise face à la porte d'entrée, ta mère restait des heures immobile et muette. C'était une odeur que même enfant tu reconnaissais. Elle était celle des portes closes, des repas silencieux, des nuques raides, de tes parents ensemble, mais séparés. Elle était celle d'une vie sans heurts et sans joie. Tu t'échappais comme tu le pouvais. Tu rêvais d'un avenir rugissant où tu serais lion ou chanteur de rock. Tu guettais la vie derrière les portes. Tu jouais dans le couloir, tu y étais plus près du dehors, tu pouvais entendre les voix qui venaient du logement du dessous. Tu percevais des rires, des querelles d'enfants. Comme tu aurais aimé toi aussi un peu de tumulte! Ta mère apparaissait, te regardait sans te voir, et tu cherchais sur ses lèvres pâles une malfaçon, une anomalie, qui aurait expliqué qu'elles n'expriment jamais la gaieté ni le contentement, qu'elles ne s'étirent jamais en un rire, qu'elles ne forment jamais un mot tendre.
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