Chant Neuvième - extrait -
Les grands micocouliers pleurèrent
Les grands micocouliers pleurèrent ;
Affligés, s'enfermèrent
Dans leurs ruches les abeilles, oubliant le pacage
Plein de tithymales et de sarriettes.
« Avez-vous point vu où est Mireille ? »
Demandaient les nymphéas
Aux gentils alcyons bleus adonnés au vivier.
Le vieux Ramon et son épouse,
Tous deux gonflés de larmes,
Ensemble, la mort au cœur, assis dans le mas,
Mûrissent leur douleur : « Certes,
Il faut avoir l'âme en délire !…
O malheureuse ! ô écervelée !
De la folle jeunesse, ô terrible et lourde chute !
Notre Mireille belle, ô équipée
O pleurs ! avec le dernier des truands
S'est enlevée, enlevée avec un bohème !…
Qui nous dira, dévergondée,
Le lieu, la caverne reculée
Où le larron t'a conduite ?…
Et ils branlaient leurs fronts orageux.
Avec l'ânesse et les mannes de sparterie
Vint l'échanson, selon l'usage ;
Et, debout sur le seuil : « Bonjour ! Je venais quérir,
Maître, les œufs et le grand-boire.
— Retourne-toi, malédiction !
Cria le vieillard, car, tel qu'un chêne-liège,
Sans elle, ores il me semble qu'on m'a arraché l'écorce !
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