AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Charybde2


Comme je m’y attendais, la gare de Qrenac m’accueillit avec les mêmes toiles d’araignée et les mêmes couloirs poussiéreux dont j’avais pris congé trente ans plus tôt. Le chef de gare, à qui avait également échu le rôle de vendeur de billets et d’aiguilleur, me reçut comme n’importe quel autre habitant du village qui serait revenu après avoir passé le week-end en ville. Avec l’aspect négligé de mon manteau et la saleté générale de ma mise, j’étais dans le ton. De son côté, l’homme de la gare était un vieillard identique à celui dont j’avais gardé le souvenir, même s’il aurait tout aussi bien pu être son frère ou son fils. Il dut penser la même chose tout en me recevant avec l’indifférence de quelqu’un qui a vu des milliers de voyageurs comme moi quitter cette gare et y revenir. Je constatai ainsi qu’à Qrenac l’absence ne signifiait pas grand-chose, car il ne pouvait pas y avoir de distance définitive entre le village et ses habitants. Ce lieu fonctionnait comme l’énorme bouche d’un cétacé qui laissait par instants sortir les poissons qu’il finirait par dévorer tôt ou tard. Nous revenions tous à Qrenac, nous partions tous chaque jour, parfois simultanément, reproduisant tous les mêmes gestes comme en un cercle qui, nous le savions, se refermait et tournait sur lui-même bien que nous eussions essayé de nous éloigner le plus possible de son puissant centre de gravité.
Commenter  J’apprécie          10









{* *}