Bombardement à quatre heures du matin.
Mon corps court dans la rue Arlemovsk, avec mes habits dans une taie d’oreiller :
je cherche un homme qui me ressemble
trait pour trait, pour lui donner ma Sonya, mon nom, ma chemise –
ça a commencé : des voisins montent dans les trams
au marché aux poissons, brisant tous
les instants en deux. Les trams explosent comme des intestins au soleil –
(…)
Je ne trouve pas ma femme, où est ma femme enceinte ?
Moi, un corps, adulte, mâle, je m’attends à
exploser comme une grenade.
Ça a commencé : je vois le canari bleu de mon pays
picorer des miettes dans les yeux de chaque citoyen –
picorer des miettes dans les cheveux de mon voisin –
la neige s’élève du sol et tombe vers le haut, comme il se doit –
avoir un pays, si grand –
courir droit dans les murs, dans les réverbères, dans ceux qu’on aime, comme il se doit –
Le canari bleu de mon pays
se cogne aux murs, aux réverbères, à ceux qu’il aime –
Le canari bleu de mon pays
regarde leurs jambes tandis qu’ils courent et tombent.