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Citation de J-line


J-line
10 décembre 2011
Qu’est-ce que l’homme demandons-nous alors ? C’est un spécimen à jamais immature ou dépourvu de spécialisations l’assignant à demeure et à réalisation plénière. Un individu qui soutient une internalité et s’épanouit en externalité –s’ancre et se densifie de ses appartenances tout en se déprenant de ses aliénations. Un corps qui éprouve et s’émeut. Un projet qui existe dans la mesure où il se soutient et s’invente de ce qu’on l’a fait. Une liberté qui refuse de se soumettre. Une existence sans Essence qui pourtant invente le sens. Et Michel Serres définit joliment cette inessentialité : (...) » . En l’occurrence, si l’aliénation (le soi-matière aveugle à lui-même) est le donné premier de l’individu, la liberté émerge de la multiplicité des possibles moléculaires en relation avec la pluralité des environnements requérants et sélectifs : elle s’inscrit en contre-texte et contre-donne dans le pluriel des arrangements géniques vitaux, dans le rééquilibrage incessant d’équilibres instables, dans l’organisation organistique active, dans la latitude des étayages synaptiques, dans la néoténie cérébrale et dans une longue suite de choix existentiels -et encore dans le risque, l’incertitude et le pari. En d’autres termes, la liberté est faille dans l’opacité de la matière compacte et dans le déterminisme de survie d’un organisme. Faille dans un système coercitif ou éducatif ; faille dans l’en-soi d’un Destin de la matière organisée ; faille dans une re-production ou dans une réaction mécaniste. Nonobstant, l’opérativité génétique offre désormais à l’homme la possibilité d’une fixation ontologique : d’une détermination prédéfinie. Où l’homme irait dans la direction d’une transformation radicale : modification de son identité globale et particulière (immunologique) trompée avant d’être outrepassée ; métamorphose de son corps s’ouvrant à l’autre (gènes, organes ou prothèses) ; transmutation de sa subjectivité tendant à s’identifier à la volonté (et à perdre toute densité ou toute intériorité) ; et remaniement de son identité psychique et personnale (génétiquement modifiable). Mais aussi, altération induite des limites rendues obsolètes –eu égard à la chose, la machine, l’animal ou l’autre homme. Et encore, tris ou manipulations des génomes et inventions des générations futures (définition, sélection, transmutation: jusqu’au chromosome artificiel ou à la chimérisation). Où donc et dramatiquement, la liberté se verrait hypothéquée face à la force octroyée à l’inné. Où donc et artificiellement, des destins s’imposeraient suite à l’éviction trop catégorique du hasard ou de l’imprévu –si ce n’est de l’altérité vraie. Car si le gène-roi est un mythe, il peut se faire agissant : par son action codante réelle et par la confiance y accordée. Gène de l’art, du mal, du beau, du crime, de la dépression ou du bonheur : explication universelle dont on occulte le réductionnisme. Gène de santé ou de maladies, de l’intelligence et du comportement : à gène-roi, homme esclave. Car son règne signerait la dilution de la personne dans un réseau d’interactions moléculaires où une grille de lecture tronquée proposerait à la compréhension (sociale ou individuelle) des gènes agissant dans une incarnation charnelle -et non plus un sujet moral et libre (responsable) qui, de ses gènes, se fait exister. Car encore, réduire l’homme à une machine (ou à un mécanisme de transcription protéique) perturbe son identité vécue, perçue et construite : réduisant à néant sa dimension morale. Car, semblablement, assimiler l’individu au déroulement processuel d’un plan originel contrevient à son existenciation : contestant sa réalité et son sens. Par ailleurs, culbuter ces perspectives par l’introduction des mécanismes de hasard-sélection, ou interpréter toute organisation en termes d’associations et de coopérations, contribue à détotaliser l’individu pour l’ouvrir sur une identité à cohérence et matérialité illusoires.
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