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Citation de coco4649


I L'INTRUS


Extrait 22

Enfant, je croyais savoir qui j’étais : j’étais celui qui
étendait sa main vers sa mère ou du même mouvement,
parfois, et de la même main, au dernier instant, tentait
de la frapper, le gamin qui saisit un objet pour le lancer
loin de soi. Que saisir sinon qui s’échappe ? Quelle peur
de perdre ce que l’on est sur le point de gagner ?
La mort au cœur de la possession. Je retirais ma main
au moment même où j’allais toucher au but. Comme
s’il existait un but plus désirable encore que celui qu’on
découvre a portée. Je différais la prise d’un geste capricieux.
Et comme anticipant ma déception, je frappais
celle que je jugeais responsable de ma peine, alors qu’elle
n’avait jamais été que l’occasion de ma joie.
Plus tard, quand on écrira, c’est le même mouvement
absurde, désespéré, qui fait qu’au moment de saisir la
phrase que l’on cherchait, comme assuré de s’emparer du
trésor, au lieu de l’inscrire sur le papier, on se lève
brutalement, et l’on quitte le bureau, comme si la joie était
trop forte, le cadeau trop inattendu, ou que le fait même
qu’il vous soit donné lui retirait d’un coup sa valeur…
Et quand on reviendra calmé, vers la table de travail, le
don du ciel se sera envolé et c’est seul et livré a soi-même
qu’il faudra tout reprendre, mais il n’y aura plus rien.

p.26-27
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