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Critiques de Jean-José Frappa (3)
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A Paris : Sous l'oeil des métèques !

Aujourd'hui, comme hier, la figure emblématique du métèque, pour nombre d'entre nous, ne peut être que Georges Moustaki !

Ne l'a-t-il pas lui-même assez revendiqué pour qu'on ne le concède à son immense talent ?

Mais, avant-hier, avant lui, qui pouvait bien être le métèque ?

Jean-José Frappa, en 1926, nous l'a présenté.

Il s'appelait Démetrios Vatsas.

Il était grec de Corinthe.

Il fût le guide, à Paris, d'un jeune américain, Harry Wilson Treusley, le fils d'Elbridge Harold Treusley, le roi du ciment armé.

Ce dernier avait envoyé, sur le vieux continent, son fils en mission d'affaires.

Et celui-ci avait débarqué au Havre, les poches confortablement garnies.

Il voulait découvrir ce paris scandaleux dont rêvaient tous les puritains du monde entier ...

Tout le monde le sait : les parisiens ne connaissent pas Paris !

Sur un train d'enfer et de débauche, le jeune américain va emboîter le pas du gentleman grec dans le labyrinthe des nuits parisiennes.

Il va en ressortir, obsédé par l'image de Radah-Siva, une envoûtante danseuse orientale du Moulin Rouge.

La femme attire le jeune homme et l'inquiète.

Elle fût, dit-on, au Laos, la déesse d'une secte qui l'adorait le front dans la poussière ...

Malheureusement, lassé d'une trop longue litanie de débauche, j'ai quitté ce livre, comme au bord de l'écoeurement on quitte plus tôt, avant qu'il ne soit trop tard, une soirée qui dégénère.

Il était d'ailleurs trop tard, déjà l'ennui s'était installé dans ma lecture.

Et le destin de cette passion naissante, malgré que le livre soit bien écrit, et ne soit jamais ni grossier, ni vulgaire, m'était devenu indifférent ...

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Molière - pièce en 4 actes et 6 tableaux -

"Molière" est un drame en quatre actes et 6 tableaux écrit par Jean-José Frappa et Henri Dupuy-Mazuel. Représenté pour la première fois, en mars 1922, au théâtre national de l'Odéon, il est une de ces pièces, les plus prestigieuses, dont peut s'enorgueillir le répertoire de la scène française.

"Molière" n'est pas une pièce raisonnable.

C'est une oeuvre foisonnante et intemporelle, au texte picaresque et élégant, à la distribution nombreuse et pittoresque et aux décors somptueux et évocateurs.

Son intrigue est astucieuse.

Chaque tableau forme un tout mené avec assez de brio pour amuser la foule, et assez d'allusions à la vie et aux ouvrages de Molière pour capter l'intérêt de tous.

Cette pièce est une biographie dramatique de Molière.

Le premier rideau se lève sur le Pont-Neuf, en l'an 1643.

C'est l'un de ces levers de rideau qui fait aimer le théâtre.

Jean-Baptiste a disparu. Son père est dans une colère folle. Le brave homme vient d'apprendre que son fils se prépare à fonder un théâtre au jeu de paume des fossés de la porte de Nesle avec des comédiens : un certain Joseph Béjard et sa soeur Madeleine Béjard.

A-t-on idée de ça !

C'est une calamité pour un tapissier du roi de voir son fils aîné devenir histrion !

La pièce, dans les tableaux suivants, se promenant tout au long du destin fabuleux de Molière, quitte le Pont-Neuf, si bien reconstitué, pour le parc de Versailles, le Palais-Royal et pour, finalement, la chambre où il mourut.

Sur cette scène de l'Odéon, les rencontres sont nombreuses et pour certaines prestigieuses : Scaramouche, Arlequin, le Capitan, madame de la Fayette, Perrault, Lenôtre, Cyrano et bien sûr le roi...

sans oublier les romanichels, les montreurs d'ours, les danseurs de corde, les mousquetaires, les mendiants, les repasseurs et tire-laine, les dévotes et laquais....

Répondant à la critique d'un important comédien leur assurant qu'il était dangereux de faire parler Molière, les deux auteurs de la pièce ont, à l'époque, avec humour, imaginé une réponse de Jean-Baptiste Poquelin à leur superbe pièce :

"J'ai vu votre pièce, lors de la dernière répétition. Mon Dieu, elle n'est pas plus mal qu'une autre...

Oh ! Pas mieux non plus !...

Il y a une chose, par exemple, dont je tiens à vous remercier, c'est de ne pas m'avoir montré bafoué, ridicule, cocu, ce qui est mon lot dans la plupart des comédies où l'on prétend célébrer mon génie...

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À Salonique : Sous l'oeil des Dieux !

« À Salonique, Sous L’Œil Des Dieux ! » puise son essence dans les tragi-comédies italiennes dont Molière s’inspirait déjà dans ses pièces. Sur beaucoup de plans, le roman préfigure certains classiques du cinéma italien des années 70. C’est un livre cruel mais terriblement visionnaire sur le monde à venir, sur le libéralisme conquérant et le mythe des « self-made-men » qui va débuter dès la fin de cette décennie.

Certes, on se sent forcément gêné par ces constantes références au judaïsme avec des arguments qui, aujourd’hui encore, sont ceux de l’antisémitisme. Cependant, il ne faut pas oublier que le personnage principal est un « faux » Juif, c’est-à-dire quelqu’un qui incarne l’idée du Juif telle qu’il est perçu par les autres peuples. Ayché, sa complice dans l’abject, n’est pas juive elle non plus. De plus, si l’on regarde bien leur parcours, ils ne doivent aucun de leur succès à cette appartenance imaginaire à la communauté juive. Le charisme inventif et audacieux d’Ismaël, la beauté soumise et experte d’Ayché sont leurs principaux atouts. Le secret de leur gloire ne repose que sur une adaptabilité sans borne à toutes les situations et une commune absence de scrupules en quelque domaine que ce soit.

Ismaël et Ayché sont avant tout des caricatures, et Jean-José Frappa veut d’abord démontrer que le monde accorde trop de crédit aux caricatures qui cherchent à s’imposer par tous les moyens. Sur ce plan-là, son message reste d’une actualité brûlante. Le cynisme de Frappa cache une révolte morale qui s’est résignée, face aux réalités du monde et à la corruption globale de l’espèce humaine.

Ce roman est un « Citizen Kane » avant l’heure, qui démarre comme une comédie légère et subversive pour évoluer lentement dans un climat plus dramatique, plus noir. La réussite d’Ismaël l’aliène peu à peu, lui fait perdre sa joie de vivre et sa candeur. Les responsabilités, la course effrénée au marché juteux ont fait de lui un bourgeois cynique.

La force particulière de ce roman est de montrer qu’un bourgeois cynique n’est parfois qu’un idiot du village qui a réussi. Car durant les courtes années qui marquent son ascension sociale, Ismaël ne cesse jamais d’être un simple d’esprit, indifférent à tout sauf à ce qui l’obsède. Pauvre, il apparaît sympathique comme un enfant perdu dans sa bulle. Riche, il dévoile plus volontiers sa vraie nature, profondément égoïste, émotionnellement autiste, volontiers manipulatrice. L’argent et le pouvoir lui ont enseigné des attitudes avec lesquelles il est incapable de prendre du recul. Il exploite les gens de la même manière qu’il cirait les chaussures à ses débuts : mécaniquement, parce qu’il ne voit pas ce qu’il pourrait faire d’autre à ce moment-là. Initialement, il fuit la misère. Mais même lorsque celle-ci est loin derrière lui, il continue à grignoter partout où il peut, grâce à sa très complaisante compagne qui semble prendre pour de la sollicitude à son endroit ce qui ne saurait en être.

D’autres caractéristiques semblent cependant très étranges : aussi charmante que soit l’apparition d’Aphrodite et Hermès, on se demande ce qu’ils sont venus faire dans cette galère… Sacrifice esthétique à la magie du conte ? Peut-être mais cela implique que les perversions des deux amants soient issues de leur amour. Ce serait maladroit… Je pencherais plus volontiers pour une métaphore visant à « excuser » la complicité d’Ayché aux yeux du lecteur. Objet d’un complot entre Aphrodite et Hermès, Ayché se retrouve victime du plus vieux sortilège qui soit : l’amour. De ce fait, sa docilité, son dévouement envers Ismaël est suggéré comme ayant une origine plus noble que les ambitions bassement matérialistes d’Ismaël. Les personnages féminins sont d’ailleurs moins « égratignés » que les personnages masculins. Les femmes sont certes corrompues dans ce récit (toutes sont d’ailleurs des prostituées), mais elles conservent aux yeux de l’auteur une certaine candeur et une droiture déterminée. Il est difficile de dire si cela témoigne d’une grande tendresse pour les femmes, ou au contraire de l’hypocrisie machiste d’un homme qui juge qu’il ne faut pas dire du mal des femmes qui écartent les cuisses sur commande.

Cette ambiguïté permanente est d’ailleurs l’un des points faibles de Jean-José Frappa : une telle histoire aurait pu être brillamment racontée par un Octave Mirbeau, mais Mirbeau se serait avancé dans la narration, aurait fortement donné son avis sur tout ce qu’il détaille. Jean-José Frappa, lui, se comporte en témoin mesuré qui reste prudemment en arrière. Bien que rédigé à la troisième personne du singulier, le roman décrit clairement la vision des choses du point de vue d’Ismaël et s’y conforme le plus souvent. Il est rare que l’auteur se manifeste d’une manière dissociée. Sans doute se disait-il, non sans raison, que le caractère provocateur en serait renforcé. Frappa laisse le lecteur seul face à ses révoltes, mais cela amène forcément à s’interroger sur celles de l’auteur, dont le but n’est pas toujours très clair. Dans sa préface, Jean-José Frappa ne parle de son roman que comme d’une oeuvre légère, sans prétention, uniquement faite pour distraire. Mais il est assez évident que ce roman n’a rien de distrayant, il cherche au contraire à susciter l’indignation et à promener son lecteur tout au long d’un blasphème permanent et cauchemardesque envers la morale judéo-chrétienne. Mais à quelles fins ? Pour prouver quoi ? Il est ici plus difficile de trancher nettement. Le roman préfigure avec acuité l’évolution du monde, mais Jean-José Frappa en était-il conscient ? Ou ne nous a-t-il offert qu’un récit enfiévré par le paludisme, reflétant sa propre perplexité face à des choses dont il a été témoin, et qui l’ont à la fois indigné et excité ? On sent confusément que Jean-José Frappa a projeté une partie de lui-même dans son personnage autiste et indifférent. Mais était-ce pour l’exorciser ou au contraire pour en sublimer le vice ? Ou n’a-t-il chercher qu’à attirer l’attention du monde littéraire par un récit gratuitement scabreux ? Un siècle plus tard, l’auteur demeure insaisissable dans sa démarche littéraire, ce qui rend son ouvrage à la fois intrigant, légèrement frustrant et donc peut-être corrompu et corrupteur, lui aussi…








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