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Citation de rkhettaoui


J’avais de plus en plus de mal à avancer et en même temps ne pouvais plus vivre sans le faire : écrire les interrogations que mes patients pouvaient avoir sur leur passé avait nourri en moi les interrogations connexes que j’avais sur le mien. Vigo disait qu’en fait c’était exactement le contraire, mais quoi qu’il en soit je n’imaginais plus de ne pas fouiller mon passé pour y questionner mes souvenirs, en particulier ceux de l’enfance. Après le départ de Coralie me détourner des années passées avec elle s’était révélé indispensable, et pour les fuir je m’étais plongé dans ce qui les avait précédées : une jeunesse-âge d’or, ou au moins voulais-je la voir ainsi, dorée à l’or fin du temps qui passe. Qu’en avais-je gardé ? Dans quelle mesure pouvais-je être sûr de ce que je croyais être ce passé, être sûr de qui j’y avais été ? Être sûr, seulement, que j’en savais l’essentiel, que je n’avais pas manqué quelque chose ? Écrire des gens qu’ils avaient oublié une partie de leur passé avait précipité chez moi la réalisation que bien qu’étant leur guide dans cette quête je n’avais pas retenu du mien beaucoup plus qu’eux du leur. Comme eux, des bribes de la vie que j’avais vécue s’accrochaient à ma mémoire avec une pertinacité que rien ne pouvait prendre en défaut, des bribes têtues, obsédantes, sources d’autant plus d’étonnement qu’elles n’avaient en apparence aucune importance. Pourquoi restaient-elles, quand des années entières que je pensais cruciales semblaient au contraire s’être effondrées comme des pans de falaise dans l’océan de l’oubli ?
L’empathie ressentie face à mes patients avait envahi mes travaux d’écriture, mais de façon clandestine.
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