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Critiques de Jerzy Giedroyc (1)
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Correspondance 1950-1969

Un document capital pour comprendre la genèse d’une bonne partie de l’œuvre de Witold Gombrowicz. Il faut rappeler, qu’en 1939, Gombrowicz, fait un voyage en Argentine, à l’initiative du ministère de la Culture polonais, avec d’autres écrivains, et c’est Giedroyc, haut fonctionnaire, et membres de différents cabinets ministériels d’avant guerre en Pologne, qui avait proposé son nom. Lorsque la deuxième guerre mondiale a éclatée, l’écrivain est resté en Argentine, et suite à l’installation du gouvernement communiste sous l’emprise directe de Moscou, il ne rentre pas non plus au pays. Il survit difficilement, travaille dans une banque, et n’a plus vraiment la possibilité d’écrire ni de voir éditer ses œuvres, malgré quelques tentatives, en particulier des traductions en espagnol de ses écrits d’avant guerre.



Dans ses diverses tentatives de reprises de contact avec les milieux littéraires, il écrit à un moment à Jerzy Giedroyc. Ce dernier a passé l’essentiel de la guerre dans l’armée polonaise à l’étranger, et la fin de cette dernière le trouve en Italie. Il ne souhaite pas rentrer dans la Pologne sous domination soviétique, et il choisit comme moyen de lutte, de fonder une revue culturelle, qui s’appellera Kultura, dont le premier numéro paraît en 1947. Dès 1948 il transfère la revue en région parisienne, à Maison Laffitte. Et c’est là qu’elle paraîtra jusqu’à 2000, c'est à dire la mort de son créateur. Il faut dire que cette revue a été tout simplement le fait le plus important de la culture polonaise de la deuxième moitié du XXème siècle. La plupart des écrivains, essayistes ou historiens polonais y ont publié à un moment ou un autre, d’autant plus qu’à la revue d’origine s’est ajouté la publication de livres et une revue d’histoire contemporaine. Le politique y était abordé, mais d’une autre façon. Giedroyc a développé une position très particulière, en refusant de s’aligner sur la position d’organes telle que Radio Free Europe, financée par les Américains, et s’alignant complètement sur leur politique, ainsi que celle de l’opposition liée à l’ancien gouvernement polonais installé à Londres, à qui il reprochait son passéisme, son nationalisme chauvin et son manque de capacité à comprendre le monde d’après guerre. Il a voulu développer dans ses publications en toute indépendance une compréhension de la situation nouvelle et proposer des perspectives. Il a voulu initier une réflexion sur l’Etat et les institutions qui garantiraient la liberté et un fonctionnement satisfaisant dans un futur libre, et les relations souhaitables avec les états voisins. Kultura était une revue très exigeante, d’une lecture complexe, une partie était diffusée en Pologne d’une façon plus ou moins clandestine suivant les périodes, elle avait une retentissement énorme parmi les intellectuels, et était très mal acceptée par le pouvoir communiste, mais aussi par toute une partie de l’émigration.



En 1950, lorsque Gombrowicz adresse sa première lettre à Giedroyc, on est juste au début de cette histoire. Giedroyc apprécie beaucoup les écrits de Gombrowicz et très vite, lui suggère d’écrire un journal qui sera publié régulièrement dans Kultura. Il est donc à l’initiative de cette immense œuvre, qui au départ n’enthousiasmait pas Gombrowicz, et qui sera pourtant une de ses œuvres les plus importantes, et qu’il poursuivra jusqu’à sa mort. C’est aussi pour publier Gombrowicz que les premiers livres indépendants de la revue seront publiés, Ferdydurke et le premier volume du journal. Toute œuvre de Gombrowicz sera ainsi publiée en polonais, et les proches de Kultura vont promouvoir Gombrowicz, comme d’autres écrivains polonais, auprès d’éditeurs et de revues étrangères, et c’est ainsi qu’il finira par être publié un peu partout dans le monde.



Gombrowicz ne sort certainement pas grandi de cette correspondance. Egocentrique, exigeant, soucieux essentiellement de lui-même, mesquin avec les autres, ne pouvant pas se refuser un bon mot, même s’il blesse les autres, il est exactement tel que je l’imaginais. Lorsqu’il se met à avoir du succès, il se permet de négliger Kultura, écrivant moins et plus irrégulièrement par exemple.



Mais cela me renforce dans l’idée que l’ouvre et l’artiste en tant que personne sont deux choses différentes, et que peut être il vaut mieux ne pas connaître les artistes pour pouvoir apprécier l’œuvre sans interférences. L’attitude de Giedroyc, qui finalement ne s’en étonne pas, accepte les différentes exigences ou les prises de distance avec beaucoup de classe, une certaine ironie désabusée, est probablement très sage, et donne l’image d’un homme se faisant peu d’illusions sur les hommes en général et les artistes en particulier. Tout en se démenant pour eux.

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