Car les livres ne sont pas du tout choses mortes, mais ils contiennent en eux une puissance de vie qui les rend aussi actifs que l'âme qui les a engendrés : disons même qu'ils conservent comme une fiole l'essence la plus pure de l'intellect vivant qui les a produits. Je les sais aussi vifs et féconds que les dents fabuleuses du dragon ; une fois semés, ils pourraient jaillir comme autant d'hommes armés.
Et pourtant, sans prudence, tuer un bon livre c'est à peu près comme tuer un homme ; qui tue un homme tue une créature rationnelle, l'image de Dieu ; mais qui détruit un bon livre tue la raison elle-même, tue l'image de Dieu, dans l’œil même en quelque sorte. Bien des hommes sont des fardeaux pour la Terre ; mais un bon livre est le précieux élixir de vie d'un esprit supérieur, embaumé et recueilli dans le but d'avoir un supplément de vie après la vie.