Citations de Joseph-Marie Lo Duca (24)
Ai-je le droit de disposer ainsi de la vie des autres ? Mon droit se bornerait alors à disposer de cette vie à condition qu'elle fût offerte aux boulets de canon ? Sottise.
La politique réaliste commence quand on ne tremble plus devant la petite morale des hommes.
La guerre est un malheur : il n'y a plus de science du malheur.
Le courage est le contraire de la peur : non à cause de la différence de sens, mais par l'usage qu'on en fait. La peur - quoique éprouvée par tous - est un mot ignoré, particulièrement quand on parle de ses propres exploits ; le courage, dont personne ne devrait parler, est un mot très commun et employé à tout propos.
Une mouche morte suffit à empoisonner l'huile du parfumeur : un grain d'orgueil annihile le génie et la sagesse.
Le monde doit se défendre d'un fléau plus général : ses hommes politiques. C'est leur médiocrité et leur manque d'imagination qui ordonnent ces carnages au nom de l'ordre, de l'Histoire et de l'honneur. L'honneur est toujours perdu.
La gloire militaire est écrite sur du vent, le vent qui sort des canons.
Plus que jamais épris de toi, ignorant désormais les limites du temps, je pense à l'amour qui sourd de tout mon être, de toute ma vie, de toute ma pensée.
Les femmes étaient beaucoup plus propres que les hommes à m'apprendre certaines choses. J'étais si grave, si décidé, que les hommes n'osaient pas me dire bien des choses que les femmes disent.
Quand la jeunesse de Betzy pénètre dans ces murs, tout change. Elle n'est peut-être pas très jolie, mais elle est si fraîche, si jeune, si détachée de ce que sera la vie... C'est l'âge vrai où l'on peut faire des choses sans raison aucune, pour rien, pour le plaisir.
[...]
Gourgaud et Montholon sont d'accord sur Betzy : à leurs yeux, elle est folle. Curieux monde, pour qui la fraîcheur et le sourire sont des opprobres à cacher.
J'étudie l'anglais, ce qui m'autorise à mieux écorcher les noms des officiers qui m'accompagnent.
Le pouvoir des mots perd toute magie si on ne le souligne pas par l'action.
Le ciel est d'une irréprochable beauté. Mais sans la mer, on périrait d'ennui.
Je refuse à l'amour cette démesure qu'il prend aux yeux d'une femme.
Rien de tel que le sentiment pour rendre le peuple malléable.
Nous nous parons d'idées positives, lorsque nous devrions nous en garantir soigneusement. La vie n'est qu'imagination. L'univers appartient aux fabricants de mirages.
L'armée de Moldavie n'a même pas à nous attaquer : nous fondons sans besoin de mitraille et sans charges coûteuses. Nous sommes cernés par le destin, beaucoup mieux que par les Russes.
Ma cours me déteste de plus en plus. [...] un prélat m'a fait un discours plein de flagornerie : « Dieu fit Bonaparte et se reposa », dit-il soudain, visiblement satisfait de sa trouvaille, au point de se permettre une longue pause. J'entendis alors une voix très basse, juste derrière Bourrienne, qui murmurait : « Dieu aurait mieux fait de se reposer un peu plus tôt. »
Ma mémoire des hommes et des choses est bien singulière. ETant jeune, je connaissais les logarithmes de plus de trente à quarante nombres. En pleine campagne, je sais non seulement les noms des officiers de tous les régiments, mais les endroits où les corps ont été recrutés, leurs exploits. Ma mémoire devient parfois un outil de domination.
Avant la pompe et l'étiquette impériales, nous faisions lit commun, et chaque jour, chacun de nous était pour l'autre la dernière image du soir et la première image du matin.
Maria va venir. Sa tendresse apaisera mes doutes.