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Citation de milgoul


Quand nous nous sommes une fois "fait une idée" d'un écrivain (et tout l'effort de notre critique écrite et parlée vise à ce qu'une telle sclérose intervienne très vite) nous devenons paresseux à en changer - nous marchons en terrain sûr et nous lisons de confiance, d'un oeil dressé d'avance à ramener les hauts et les bas, les accidents singuliers de ce qui s'imprime, à la moyenne d'une "production" sur laquelle nous savons à quoi nous en tenir. Lorsque nous laissons tomber négligemment (nous le faisons dix fois par jour) d'un ton complaisant de prévision comblée : "C'est bien du X..." ou "du Y...", une tendance instinctive se satisfait par là à peine consciemment, qui est de faire reparaître l'essence permanente sous l'apparence accidentelle, d'en appeler de la singularité concrète et parfois déroutante d'une oeuvre à une sorte de noumène de l'écrivain sur lequel nous nous vantons de posséder des repères qui ne trompent pas. De là l'impression de malaise, et la malveillance à peine déguisée qui se font jour dès qu'un écrivain s'avise de changer de genre : il "était" romancier - que se mêle-t-il d'écrire des pièces de théâtre ? Il était une rivière bien endiguée, comme on les aime en France - de petits jardinets y puisaient l'eau et prospéraient modestement sur ses berges (car, comme la Seine, à Paris l'oeuvre d'un écrivain aussi coule entre des livres : les livres qu'on écrit sur lui) le voilà maintenant un de ces fleuves de la Chine, qui s'amusent irrévérencieusement à changer de lit.
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