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Citation de Charybde2


C’était en tant qu’image, davantage qu’en tant que fait brut, que la destruction du World Trade Center s’était présentée, et avait été expérimentée ; son mode d’existence se rapprochait plus de celui du film-catastrophe que de celui du traumatisme intime. Du reste, rappelait Baudrillard, les images télévisées qui avaient tout arrêté dans le monde entier pendant plusieurs heures appartenaient au domaine du déjà-vu ; elles étaient la répétition d’autres images, tirées du répertoire des blockbusters hollywoodiens. À certains égards, elles pouvaient même prétendre en constituer un – dès lors qu’un blockbuster est avant tout cela : un dispositif médiatique dont l’objet est de « faire sauter le quartier », de réduire la concurrence à l’état de ruine par l’intermédiaire d’une OPA esthétique hostile. L’ironie terrible de ce dispositif était que, pour parvenir à « faire sauter le quartier », il fallait en effet réduire en cendre un bloc entier d’immeubles – c’est-à-dire montrer ce que l’on était en train de faire, en même temps qu’on le faisait. De Star Wars de George Lucas à Die Hard de John McTiernan, de True Lies de James Cameron à Lethal Weapon de Richard Donner, jusqu’aux principaux représentants de ce qu’on a appelé le « destruction porn« , les blockbusters racontent toujours des histoires d’immeubles qu’on fait sauter. C’est-à-dire qu’ils racontent le triomphe de la lumière de l’explosion sur l’infrastructure matérielle du monde – le triomphe des images du cinéma (ou de télévision), en tant que flash lumineux, sur les immeubles supposés constituer la matière du monde. En détruisant, à coups de Boeing, les deux plus hautes tours de la ville la plus cinématographique du monde, les kamikazes du 11 septembre 2001 avaient permis de comprendre combien un attentat n’a jamais d’autre but qu’impressionner. C’est-à-dire qu’il n’a jamais d’autre but que celui de saturer de lumière une plaque sensible, afin d’y produire une certaine « excitation » des particules posées à sa surface – à l’instar des sels d’uranyle utilisés par Henri Becquerel lors de ses expériences sur les rayons X.
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