Laurette Mas-Camille

J'ai été malheureuse de comprendre que je suis devenue une réfugiée, malgré moi, et je demande à la France de m'accepter chez elle quelque temps. Je ne sais pas si elle le voudra. En allant à la préfecture pour un énième rendez-vous, j'entends une vieille dame, juste à côté de moi dans le bus, expliquer à une autre que les migrants, ces gens-là, sont des parasites qu'il faudrait chasser. Qu'ils n'ont pas besoin d'être là.
- De bons à rien, madame Polowsky ! Et l'Etat paye tous ces étrangers, à ne rien faire, sous prétexte qu'ils sont migrants! Ils ne viennent que pour la CAF !
- Je sais bien, madame Dubosc, tenez! Par exemple, dans mon immeuble, je les vois, ils sont huit dans l'appartement. Pour dire bonjour, ça, ils savent faire... Mais alors! L'odeur de la nourriture, en permanence. À croire qu'ils ne font que manger. Et avec quel argent, je vous le demande ! C'est pas nous qui pourrions faire autant de courses avec nos petites retraites...
J'écoute. Avec stupéfaction. Je ne savais pas que certains pensaient ainsi.
- Avez-vous déjà été vendue, madame ?
Elles me regardent, stupéfaites par mon toupet. M'inviter ainsi dans leur conversation...
Je continue.
- Vous a-t-on déjà violé des centaines de fois? A-t-on déjà uriné ou déféqué sur vous, comme si vous étiez au toilettes? (...) Avez-vous déjà perdu un enfant à cause d'une excision ?