Le principal intérêt de ce livre est de montrer comment une sommité de l'intelligentsia dans le domaine économique – docteur en économie de l'université Harvard, conseiller économique de Lyndon Johnson et Jimmy Carter, professeur au MIT…–, a pu à ce point se tromper dans ses prévisions.
A grand renfort de chiffres et d'arguments d'autorité, le Japon apparaît comme la puissance dominante de l'Asie au XXIe siècle et la Chine comme durablement embourbée dans le sous-développement alors même qu'elle entame une croissance économique exceptionnelle.
Sans doute trop occidentalo-centré, l'auteur est incapable de voir que capitalisme d'État et contrôle politique centralisé peuvent aller de pair et conduire à des réussites spectaculaires, révélant ainsi que dans certains domaines l'autoritarisme peut avoir des vertus que la démocratie n'a pas.
Peut-être impressionné par la construction européenne en marche avec la préparation du traité de Maastricht au moment où il écrit son livre en 1992, l'auteur sous-estime totalement la capacité et la volonté de réaliser une intégration politique européenne.
Il surestime la capacité de l'Europe à dominer les Etats-Unis et sous-estime lourdement la capacité de ces derniers à innover et de la Chine à prendre le train en marche.
Semblant voir dans les Etats de la CEE un équivalent des treize colonies américaines globalement homogènes du XVIIIe siècle, il est aveugle à la disparité des peuples européens, à leurs divergences d'intérêt et à leurs écarts de développement.
Enfin, même s'il aborde les évolutions démographiques, il surestime la capacité à y répondre et ne pressent pas les tensions provoquées par une immigration de grande ampleur et non désirée.
Décédé trois mois avant le vote du Brexit, et sûrement mortifié par l'échec patent de ses prévisions, il ne recevra pas le coup fatal qui achève de le discréditer.
Il est fascinant de voir comment un éminent sachant peut affirmer haut et fort en se trompant sur presque tout.
Commenter  J’apprécie         00