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Critiques de Ludovic Manchette (1311)
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Alabama 1963

Voici un roman qui m'a séduit dès les premières pages et n'a jamais perdu ni de son intensité ni de son intérêt jusqu'à la fin .

Je " lorgnais " sur lui depuis un certain temps en raison d'une couverture plutôt " attirante " car chargée de symbôles , et d'un titre simple et lui aussi marquant puisqu'en rapport avec un événement d'une importance capitale survenu aux États Unis à cette époque . Un événement de nature à me ramener vers mon enfance puisqu'en 1963 , la tragédie en question allait provoquer un séisme mondial , pensez- donc , une secousse ressentie jusqu'aux fins fonds du petit département de la Creuse où je passais une enfance heureuse : l'assassinat de Kennedy .

Certes , l'objet du livre ne concernera pas spécialement la disparition de ce président même si on en parle , mais y puisera son décor, décrivant les années où , pour un temps encore , Blancs et Noirs vivront dans le même monde , mais bien à part . . Et c'est particulièrement " parlant " de voir évoluer dans une même cité des hommes et des femmes que la différence de couleur de peau oppose jusqu'à la haine . Une foule d'exemples pris dans la vie quotidienne traduisent de fort belle manière ces différences atroces qui soumettaient les plus " faibles " au seul profit des plus " forts " . A faire lire à nos ados pour leur montrer que toutes les vies n'avaient pas le même prix.

C'est dans ce contexte particulier que va se " constituer " un " duo improbable " , suscitant toutes les critiques , moqueries , menaces : l'association de Buď ,le détective privé alcoolique MAIS blanc , avec Adela , courageuse domestique MAIS noire . Un duo qui devrait rester bien présent dans la mémoire des lecteurs longtemps après qu'ils ont tourné la dernière page ...Il y a bien sûr d'autres personnages mais , sans leur faire offense , aucun ne pourra faire " de l'ombre " à ces deux - là, même si leur rôle n'est pas négligeable et soulève des faits et attitudes surprenants ou non , pour l'époque , faits et attitudes du reste porteurs d'espoir pour certains ...

Oui , mais vous attendez l'essentiel , hein ? C'est un polar !!! Bof , pas vraiment , non .Quoi ! Mais on m'aurait fait acheter un livre à l'insu de mon plein gré ? Y'a des cadavres tout de même ? Oui , et même pas mal , des fillettes noires enlevées et ..... Alors , la police doit s'activer ? Pas plus que ça non ...Les fillettes sont noires , les policiers sont blancs ...Vous me suivez ? Alors l'enquête...Comment ça , dég.......?.Oui , bien sûr, mais en Alabama , en 1963....C'est bien pour ça que Bud et Adela....Il faut vraiment tout vous dire .Ce livre , c'est pas vraiment un polar , l'enquête, elle est plutôt là pour ......Non , c'est plutôt un roman noir , mais aussi et surtout le miroir d'une époque et ...il est superbe . Ne soyez pas rebutés d'avance par la violence malgré la dureté du propos . Les auteurs ont fait preuve , à ce sujet , d'un extraordinaire doigté, d'une grande et belle maîtrise.

Et puisqu'on parle des auteurs , disons tout de suite que ce livre est bâti en grande partie sur des dialogues , un art pas forcément facile . Et bien , je vous l'assure , ils ont accompli l'immense prouesse de traduire des tonnes d'émotions par ce biais là. C'est extraordinaire . Drame , colère, menaces , humour , ironie , tendresse , invectives ....On a l'impression de voir des acteurs se donnant la réplique sans coup férir. Un échange de " coups de lame " voire de " scalpel " . Ce n'est pas courant mais le " rendu " est génial.

Vous l'avez compris , j'ai A DO RÉ et j'ai vraiment passé un bon moment dans un roman noir . Étrange, non ? Comme d'habitude , c'est mon ressenti , tout mon ressenti et rien que mon ressenti ( je suis comme vous lorsque vous écrivez vos commentaires ) et vous n'êtes pas obligé(e)s de me croire .Je ne suis qu'un lecteur à qui sa chère épouse a fait un beau cadeau.

Un dernier mot ...Dans le cortège mortuaire de Kennedy , on pouvait voir , près du cercueil ...deux soldats noirs .....
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Alabama 1963

Un vrai bon moment de lecture que ce Alabama 1963.

Années soixante, au cœur d’une Amérique ravagée par la ségrégation, Bud est un détective alcoolique, souillon et mal en point. Adela est noire, domestique pour blancs renfermés dans leurs préjugés, sauf quelques exceptions. Quand on signale la disparition d’une enfant noire, la police n’en a que faire. Il faudra attendre la seconde ou la troisième disparition pour que Bud s’en inquiète. Surtout depuis que Adela vient nettoyer chez lui. Deux univers opposés et qui pourtant ont tant à s’apporter. C’est ce que ce livre dégage, un condensé d’humanité, de tendresse, de clichés qui valdinguent. Résonne au loin la voix de Martin Luther King, j’ai fait un rêve…



L’histoire est passionnante à suivre, elle se dévore avec ses nombreux passages qui font sourire, l’écriture cinématographique à souhait se voit et se vit avec entrain. Pas l’ombre d’un ennui ici. Moi qui ne suis pas férue de littérature américaine, j’ai repensé à ce si beau film qu’est La couleur des sentiments (je n’ai pas lu le livre) avec ses protagonistes tout en couleur. Les patronnes d’Adela sont aussi très bien campées, l’une clouée a son lit perdue dans ses rêves et visions de médium, l’autre qui préfère astiquer sa maison pendant que Adela sirote son thé.



L’enquête est selon moi prétexte à faire la part belle a ces deux antagonistes que sont Bud et Adela, une manière de faire rencontrer deux mondes qui se comprennent mal, se fuient, se rejettent. Une manière dans ces temps blessés par des préjugés ancestraux de laisser passer la lumière, de vivre auprès de la peur et des idées préconçues afin d’avancer main dans la main, blanc et noir.



Un très beau roman pétri d’espoir, d’humour, de tendresse et d’intelligence. Je recommande sans hésiter.
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Alabama 1963

Je comprends l’engouement pour ce livre! Des personnages attachants, une intrigue policière haletante et surtout un duo d’enquêteurs insolite et irrésistible à l’alchimie inattendue dans l’Amérique ségrégationniste des années 60 font de ce roman un très bon moment de lecture! J’avais peur que les personnages soient trop caricaturaux, peur des clichés sur les inégalités sociales et la discrimination raciale mais ça fonctionne! Tout est gommé par la force et l’humanité des personnages principaux, les dialogues truculents, l’humour qui donne une légèreté même si le sujet reste obscur et l’ambiance délétère.

L’intrigue prend place à Birmingham en 1963, année qui fut riche en événements marquants comme l’assassinat de JFK et les actes terroristes du Ku Klux Klan. Adela est une jeune veuve afro-américaine mère de trois enfants qui fait des ménages pour survivre. Elle croise le chemin de Bud ancien flic désabusé reconverti en détective privé, un alcoolique bougon, désordonné et raciste plus par conformisme que par conviction. Bud investigue tant bien que mal sur la disparition d’une jeune fille de couleur, à la demande de la famille, qui sera retrouvée morte quelques jours plus tard. D’autres disparitions de fillettes noires suivront, la police s’investit peu. Embauchée comme femme de ménage, Adela nettoie chez Bud pendant qu’il se pochtronne sans vergogne. Petit à petit au sein de ce binôme singulier naîtront, entre deux piques bien envoyés, une affection et un respect mutuel. Adela deviendra alors sa coéquipière en l’aidant à infiltrer la communauté noire qui oppose au détective blanc un silence de plomb. Les dérives du suprémacisme blanc et du séparatisme sont bien retranscrites et donnent lieu à des scènes révoltantes.

Les relations qu’Adela entretient avec ses patronnes ne laissent pas indifférent ces dernières sont parfois attachantes comme Miss Gloria et ses visions, parfois odieuses comme Dorothy à laquelle elle répond avec intelligence et autodérision. Femme courageuse mais analphabète Adela fera tout pour s’émanciper.

L’enquête est lente, les indices livrés au compte goutte mais elle captive de bout en bout, la fin est inattendue.

Addictif et savoureux.
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Alabama 1963

Le titre est sans mystère : nous sommes en Alabama en 1963. Le cadavre d’une petite fille, violée avant d’être assassinée est retrouvé quelques jours après sa disparition. Les parents éplorés font appel à la police locale, que l’affaire intéresse peu ! En effet, la petite victime est noire. Le ton est donné pour la suite, lorsque l’on fait connaissance avec Adela, qui vend ses services de femme de ménage à de riches blanches. On ne s’étonne pas de la façon dont elle est traitée. Elle a pourtant de la chance, Adela, car l’une de ses patronnes est une vieille dame fantasque qui semble douée d’une lucidité paranormale, et qui la traite presque en égale.





La situation se corse lorsqu’une deuxième famille signale la disparition de leur fille, et fait appel à un détective, exaspérée par la nonchalance de la police. Seulement voilà, le détective en question est une caricature d’enquêteur, alcoolique, vivant dans une bauge en compagnie d’un chien et d’un chat et passant le clair de son temps au bar voisin. C’est une blague d’une de ses compagnons de beuverie, flic, qui sera à l’origine de la rencontre avec Adela…



La première qualité de ce roman réside dans la précision de l’écriture. A quatre mains les auteurs ont réalisé un bijou de dialogues savoureux, qui mettent en scène la malice d’Adela et les restes de bon flic qui sommeillent encore en Bud.



On adore aussi les personnages secondaires, les copines d’Adela avec leurs remarques ironiques à l’égard des blancs, et qui montrent bien que les blagues racistes fonctionnent aussi dans l’autre sens. Pas de manichéisme : les imbéciles sont répartis sans distinction de couleur !



Si on rit sans retenue en parcourant les échanges entre Adela et Bud, on est aussi cueilli par l’émotion , pour des raisons que je ne peux révéler sous peine de divulgacher.





Merci donc aux auteurs pour cette histoire superbe



Et à Bruno de la librairie Ar Vro à Audierne de m’avoir convaincu grâce à ses arguments de découvrir ces deux nouveaux talents.


Lien : https://kittylamouette.blogs..
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America[s]

Chronique d’un abandon.

Quel dommage ! Je me faisais une joie de découvrir ce deuxième roman des auteurs d’Alabama 1963 que j’avais tant aimé. Ici, la magie n’a pas opéré. Que c’est hasardeux un deuxième livre après un coup de cœur.



En quelques mots, on suit ici le road trip d’Amy, une ado de bientôt quatorze ans en fugue. Elle veut retrouver sa sœur Bonnie, voila sa seule motivation au milieu d’une famille peu folichonne qui ne va pas lui manquer. Sur son chemin, elle va croiser de nombreuses personnes qui lui tomberont souvent du ciel pour se loger, se nourrir, en somme pour rendre possible ce voyage lointain. Je ne suis pas fan a la base des personnages tout droit sortis d’une pochette surprise comme j’appelle ça. La providence, les miracles, la bonne chance, très peu pour moi.



Amy c’est à mon humble avis le point fort de ce roman tant cette gamine est déroutante. Elle a une imagination débordante pour aller au bout de ses idées. Treize ans et demi et autant de prénoms différents que de rôles dignes d’une célèbre actrice, autant d’histoires mirobolantes pour justifier sa présence si jeune sur les routes américaines. J’ai beaucoup souri au début car Amy est vraiment épatante. « - Pourquoi es-tu toute seule dehors si tard? Ta mère n’est pas rentrée ? (Profonde réflexion éclaire) - C’est que ma mère elle fait le tapin ». Je ne m’y attendais pas à celle-là ! Et des idées lumières ainsi, ça fourmille à la pelle.



Quand fourche ma langue j'ai là

Un fou rire aussi fou qu'un phénomène

Je m’appelle Amy, Alice, Pénélope, Carol

Je m'appelle Lolita

Lo de vie, Lo aux amours diluviennes



Ça fait sourire un moment puis ça lasse. Enfin moi, ça a fini par bouder mon plaisir lecture. D’autant plus qu’il n’y a pas vraiment d’intrigue qui viendrait pimenter le tout, pas vraiment non plus d’évolution dans le personnage d’Amy (peut-être que ça arrive plus tard mais jusqu’à la moitié du livre, tout reste très linéaire).



À côté de ça, pas de bol pour moi qui ne voue aucun culte pour l’Amérique, les auteurs m’ont servi l’Amérique à toutes les sauces : une page entière de paroles de chansons américaines (inconnues au bataillon pour la plupart), des noms d’acteurs, de stars en tous genre (toujours inconnus au bataillon), des noms de villes à la pelle impossibles à situer sur une carte (ma géographie américaine est tristement pauvre).



En conclusion, je n’ai pas survécu à cette surenchère américaine ni à l’idée peu crédible d’une si jeune gamine en fugue livrée à elle même qui ne rencontre que de bonnes âmes, je ne connais qu’une mère Thereza et elle n’est plus de ce monde.



C’est un avis très personnel que je vous livre mais je sais que ce livre rencontre déjà la route du succès. C’est tout ce que je souhaite à ce duo d’écrivains bien sympathiques et généreux et qui ne manquent pas ni d’humour ni d’imagination.



Vous vous ferez votre propre avis si vous ouvrez ce livre. Je sais que beaucoup d’entre vous apprécient l’Amérique.



Et puis et puis…



Pardonnez-moi si je n'ai dans les yeux

Que l'Amérique

Je reviendrai je ne sais pas quand

Cousu d'or et brodé d'argent

Ou sans un sou, mais plus riche qu'avant

De l'Amérique.
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America[s]

Impossible de résister au nouveau roman de Ludovic Manchette et Christian Niemiec après mon immense coup de cœur pour « Alabama 1963 » !



« America[s] » invite à suivre les pas d’Amy, treize ans, qui vient de quitter un domicile familial privé d’amour, avec l’espoir de retrouver sa grande sœur qui s’est fait la malle du même endroit un an plus tôt…afin de devenir playmate dans le célébrissime Manoir Playboy à Los Angeles. Le seul petit hic est que l’adolescente habite Philadelphie et qu’elle va donc devoir traverser les Etats-Unis en auto-stop, toute seule et sans un sou en poche.



Si ce roman se déroule dix ans après « Alabama 1963 », pour nous plonger dans l’Amérique des seventies, il délaisse cependant le thriller afin de nous servir un road trip parsemée de quête identitaire sur la mythique Route 66. Il ne faut cependant que quelques pages pour se rendre compte que, peu importe le genre, l’écriture de ce duo d’auteurs continue inévitablement de faire mouche.



Au niveau des personnages, ce nouveau roman n’a également rien à envier à « Alabama 1963 », surtout qu’Amy va croiser de nombreux individus au fil de ce voyage, allant de hippies bienveillants à des gens moins fréquentables, en passant par quelques célébrités tels que Bruce Springsteen (dont je suis grand fan!), Hugh Hefner ou même Ted Bundy. Les auteurs s’en donnent à cœur joie, forçant parfois même un peu sur la dose au détriment de la crédibilité, mais insufflant beaucoup d’humour à un contexte social, politique et culturel existant, un peu à l’image du premier roman du Suédois Jonas Jonasson, « Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire », faisant même également un peu penser à « Forest Gump ».



Outre des rencontres marquantes, des personnages attachants et un hasard qui fait souvent bien les choses, les auteurs multiplient également les références, surtout musicales (Route 66 oblige !), mais également à leur précédent roman, tout en livrant une ode à l’amitié et à la liberté, le tout servi par une écriture fluide, des dialogues percutants et une bonne dose d’humour et d’humanité.



N’hésitez pas à lire Ludovic Manchette et Christian Niemiec !
Lien : https://brusselsboy.wordpres..
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Alabama 1963

Deuxième coup de coeur de l'année avec cette histoire aussi improbable qu'addictive, j'ai rarement dévoré un livre avec autant de gourmandise, impossible à lâcher, simplement génial.

Parler de ce livre, c'est parler d'alchimie voire de magie car arriver à ce résultat avec un tel scénario et un tel contexte est un pur numéro d'équilibriste et ce n'était pas gagné d'avance.

Pour le contexte, il s'agit des Etats-Unis dans les années 60, dans le Sud en Alabama, la ségrégation raciale, une police raciste, le Klu Klux Klan...

Pour le scénario il va s'agir de disparitions de jeunes filles noires et d'une police d'une rare incompétence à la motivation douteuse, bref vous l'avez compris, l'auteur n'a pas choisi la facilité.

Cette histoire c'est la rencontre de deux mondes irréconciliables et que tout oppose, c'est aussi une association improbable entre deux personnages qui n'étaient pas censés se rencontrer et encore moins se comprendre, Adela et Bud.

Il y a des histoires qui dégoulinent de bons sentiments auxquels on peine à croire et qui ont le mérite d'essayer de nous convaincre, et il y a ce livre aux dialogues incroyables de vérité, au langage "border line" qui sonne si vrai quitte à choquer parfois.

Un récit sans fard, une galerie de personnages pittoresques et à la limite de la caricature pour certains (quoique...) et d'autres simplement "normaux" dirait-on aujourd'hui mais qui font dans ce contexte figures de héros.

Une histoire dure et tendre, triste et joyeuse, pessimiste et pourtant positive, c'est l'alchimie dont je parlais plus haut et qui nous donne ce livre incroyable de justesse et d'émotions.

J'ai bien sûr adoré cette lecture qui m'a fait passer du rire aux larmes et franchement croyez-moi, c'est à lire absolument !
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Alabama 1963

Cette année 1963, Birmingham, en Alabama, est une poudrière. C’est dans cette métropole, que Martin Luther King considère alors comme « probablement la ville où la ségrégation est la plus rigoureuse de tous les États-Unis », que le mouvement américain des droits civiques a choisi de concentrer son action en faveur de la déségrégation et de l’égalité des droits, pas seulement dans la loi, mais dans la réalité. Les protestations non violentes tournent à l’émeute quand le Ku Klux Klan répond par un attentat à la bombe contre une église exclusivement fréquentée par les Noirs. L’effervescence monte encore lorsque King prononce son discours historique I have a dream à l’occasion de la grande Marche sur Washington. La crise atteint un paroxysme quand John F. Kennedy est bientôt assassiné.





Pendant ce temps, et quoi qu’il en soit, Adela Cobb continue à se serrer avec les autres Noirs dans la section des bus qui leur est réservée. Lorsqu’elle sort le chien de l’un de ses employeurs, elle ne peut l’accompagner dans les parcs qui lui sont interdits. Veuve et mère de famille, elle survit d’un aléatoire salaire de misère en trimant comme femme de ménage pour des familles qui, bien souvent, la tolèrent à peine chez elles. Et si la police est contrainte de protéger les fillettes noires qui tentent de se rendre dans les écoles déségréguées, aussitôt boycottées par les élèves blancs, elle ne va pas jusqu’à s’émouvoir de la disparition de l’une d’entre elles, ni, ensuite, de la découverte de son corps sans vie.





Les assassinats de petites filles noires se multipliant, Bud Larkin, détective privé alcoolique en mal de clients, accepte sans enthousiasme d’enquêter pour le père d’une des victimes. Raciste par défaut plus que par conviction, dans un contexte où l'immense majorité de la société blanche n’envisage les Noirs que comme des sous-hommes, cet ours mal léché, cabossé par ses propres malheurs, se voit pour la première fois confronté aux implications concrètes de cet état d’esprit. Ses investigations ne vont pas seulement le mener sur les traces d’un insaisissable tueur en série, au coeur d’une affaire aux multiples rebondissements. Elles vont aussi lui ouvrir peu à peu les yeux sur l’ignominie de certains de ses semblables et sur les injustices supportées par ses nouvelles relations noires, pourtant bien compliquées à côtoyer. Car, s’il n’est pas évident de franchir le fossé d’incompréhension, de peur et d’hostilité mutuelles entre les communautés noire et blanche, y prétendre expose à la réprobation générale, voire à de terribles représailles.





Au-delà de l’enquête criminelle et de son suspense addictif, ce roman aux personnages attachants, restitués dans toutes leurs complexités et ambiguïtés, est une plongée puissamment réaliste au coeur d’une Amérique raciste au bord de l’implosion en cette année 1963. Sa lecture pourra trouver un prolongement dans celle du plus récent Un long, si long après-midi d’Inga Vesper, à mon avis moins percutant, mais assez complémentaire dans son approche plus féministe de la société blanche et raciste de l’Amérique de cette époque.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Alabama 1963

Je m'attendais à un récit sombre, mortifère et terriblement plombant.

Il le fut, mais pas que.



Point de départ, la disparition d'une fillette. Noire.

Pas de quoi mettre sur le pied de guerre la police du comté.

Puis d'autres absences de survenir.

Faudrait p'têt s'affoler, les gars, avant d'être taxés de justiciers laxistes à tendance légèrement ségrégationniste.



Raciste, Bud Larkin l'est, assurément.

Ajoutez irascible et têteur de boutanche H24 et vous obtenez ce qui se fait de pire en matière de détective à 100 bornes à la ronde.

C'est pourtant vers lui que se tournera une famille noire en plein désarroi, faute de biffetons à allonger à un privé digne de ce nom.

Adela Cobb est femme de ménage.

De celles qui souffrent en silence les réparties majoritairement foireuses de ses patronnes blanches alors que de répondant et d'esprit, elle ne manque point.

Adela et Bud.

Aussi dissemblables que l'eau et le feu.

Mais ne dit-on pas que seules les montagnes ne se rencontrent jamais ?



L'air est vicié en cette année 1963, sise en Alabama.

La chanson qui nous est déclamée est empreinte d'injustice séculaire même si les lignes tendraient à bouger, tout doucement. Merci Bibi.

Le KKK s'épanouit sur le terreau fertile de la haine de l'autre.



Ce récit est celui de l'espoir.

Malgré moult portraits gerbants, idéologiquement gavés au white power, assortis de disparitions en série quelque peu alarmantes, il tendrait à prouver, sur un ton faussement léger, que le contact de l'autre grandit bien plus qu'il n'avilit, nourrissant ainsi l'idée d'une possible évolution des mentalités à un train de sénateur sur les pentes escarpées du Tourmalet, vent de face.



L'enquête est captivante.

L'interaction entre les personnages que tout oppose jubilatoire.

Le tout dépeint avec un sens de la formule certain et un humour salvateur au regard de la gravité du sujet abordé.



Alabama 1963 est à dévorer en se gavant d'Alabama, chantée par Neil Young en 1972, et parfaitement dans l'esprit de l'oeuvre précitée.
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Alabama 1963

En ce mois d'août 1963, la population noire de Birmingham est en émoi depuis que Dee Dee Rodgers, âgée de 11 ans, a disparu. Des parents démunis depuis des jours, d'autres inquiets pour leurs propres enfants, une police locale qui n'a pas l'air de chercher ni de s'inquiéter, des battues organisées ici et là mais restées vaines. Neuf jours après la disparition de la fillette, le corps d'une enfant noire est retrouvé par deux adolescents dans une clairière. Étonnamment et pour son plus grand soulagement, Ellis Rodgers en est certain : il ne s'agit pas de sa fille. Qui est donc cette petite fille ? Un tueur en série sévirait-il donc dans la ville de Birmingham ? Voyant le peu d'intérêt accordé à l'enquête sur leur fille, les Rodgers font appel à un détective privé, Bud Larkin, renvoyé de la police deux ans auparavant...

Adela est une jeune mère de trois enfants qui se démène pour tenir à flot son foyer, son mari étant décédé et son beau-frère n'en foutant pas une pour l'aider. Elle accumule les heures de ménage chez des particuliers blancs. Suite encore à un différent avec l'une des maîtresses de maison, elle décide de la quitter et s'empresse aussitôt de rechercher des ménages. C'est ainsi qu'elle fait la connaissance de Bud Larkin qui l'engage, non sans une certaine méfiance...



À quelques jours d'intervalle, deux petites filles disparaissent à Birmingham. La police, peu encline, visiblement, à déployer des hommes et des moyens pour démasquer le ou les coupables, Bud Larkin décide de mener sa propre enquête. Et alors qu'Adela, sa femme de ménage, fait irruption dans sa vie, leur rencontre va les bouleverser, aussi bien eux-mêmes que la population apparemment pas encore préparée à voir un noir et une blanche arpenter les rues de la ville. D'autant que tout semble opposer le détective alcoolique, grossier, grognon et raciste et la femme de ménage volontaire, affirmée et au fort caractère. Écrit à quatre mains, ce roman nous offre une peinture réaliste et passionnante de l'Amérique ségrégationniste, les auteurs s'étant fort documentés aussi bien sur les lieux, le temps, les dates que la religion, et une enquête policière captivante. Doté d'une écriture précise et concise, de dialogues savoureux, d'un certain humour et de personnages hauts en couleurs, Alabama 1963 se révèle un roman fort, percutant et émouvant...
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Alabama 1963

Coup de coeur !

Ce roman est un bijou, une petite pépite....



On est à Birmingham aux USA, en 1963, et le cadavre d'une petite fille noire est retrouvé. il sera suivi d'autres disparitions, le meurtrier ayant trop pris la confiance...

La police (blanche) ne fait pas grand choses, les "négres" peuvent bien s'entretuer, pour ce que ça leur fait...

Mais les parents d'une fille disparue décident d'engager un détective privé, et comme ils n'ont pas beaucoup d'argent, ce ne sera pas le meilleur des détectives privés... Plus souvent bourré que sobre, Bud peine à gérer sa vie, alors enquêter...

Au même moment, Adela Cobb, jeune femme noire, la trentaine et veuve, cherche des heures de ménage, elle en trouvera chez Bud qui habite un taudis. Et de fil en aiguille, pour pénetrer dans la communauté noire, poser des questions, il s'avére qu'Adela est indispensable. Sans elle, aucune porte ne s'ouvre.

On est en 1963, en Alabama, et rien que se tenir à côté d'une noire, quand on est blanc, est considéré comme un affront aux bonnes moeurs. le Ku Klux Klan a des yeux partout...

On est en 1963, le président Kennedy vit ses derniers jours, la religion est omni présente dans la vie d'Adela.

Mais pour l'heure, Bud essaie de mener une enquête, et Adela fera tout pour l'aider.

Deux couleurs opposées, deux façons de vivre opposées, l'un diminué par son alcoolisme, l'autre freinée par sa couleur de peau, mais la même volonté de trouver ce "sale type".

Un roman policier historique, avec un duo improbable d'enquêteurs, sous fond de ségrégation , de religion et malgré le thème , qu'est ce que j'ai pu sourire !

Des petites phrases et des réflexions, pleine de bon sens sur le racisme et la religion qui sont des petites pépites d'humour.



Intelligent, captivant, tendre, drôle, pétillant, rageant, révoltant, jubilatoire, profond , intéressant, une fin surprenante :

ce roman est un petit bijou !



Ne passez pas à côté, c'est un vrai bonheur de lectrice !



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Alabama 1963

Petit retour rapide sur une fiction qui a déjà bénéficié de plus de trois cent quatre vingt critiques. Lecture plaisante qui se dévore sans temps mort. L’enquête policière concerne la disparition et l’assassinat de petites filles noires dans l’Amérique ségrégationniste. En réalité, le sujet sert plutôt de toile de fond à une étude sociologique de cette Amérique des années 60 où il est difficile de mettre un terme à cette ségrégation qui gangrène les relations humaines. Tout ce séparatisme y est parfaitement mis en évidence sans que la violence ne soit mise en exergue. Au contraire, la plume se veut légère, drôle tout en démontrant les mécanismes relationnels bien ancrés dans les rapports entre blancs et noirs et la discrimination qui permet à un chien de pouvoir se promener dans un parc réservé aux blancs alors qu’une personne noire ne peut y accéder ! Néanmoins, ce livre traite aussi de l’amitié et parle aussi d’espoir, que l’Histoire n’est jamais figée, qu’elle n’est que mouvement ! De cette étrange association pour l’époque, entre Bud, détective blanc, raciste, alcoolique et Adela, femme de ménage noire, va naître au fur et à mesure de la lecture une compréhension mutuelle doublée d’un sentiment amical. C’est le côté naïf du récit.

Mais j’ai surtout apprécié ce coup de projecteur sur cette période où la marche pour les droits civiques des noirs est évoquée ainsi que l’assassinat de Kennedy, l’horreur que représente la ségrégation pour celui qui est universaliste. En un mot, c’est un roman policier parfait pour des adolescents quelque peu avertis (viol, inceste) et qui aiment les romans policiers ! Ma petite fille de seize ans a déjà mis une option et je lui ai fortement conseillé !

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Alabama 1963

Le corps d’une petite fille assassinée au milieu de la campagne. Si elle avait été blanche, la police serait intervenue.

Mais non, elle est noire, pas de souci.

Bien sûr officiellement, les droits civiques devraient être respectés. Sauf qu’en Alabama, comme au Mississipi et en Géorgie, les lois ségrégationnistes Jim Crow ont pris le pouvoir : on veut bien concéder que l’esclavage soit aboli, mais il ne faut pas exagérer : droit de vote, non, quand même, droits d’égalité, cela voudrait vraiment dire que Blancs et Noirs seraient égaux ! Non, mais ! ou bien  égaux, alors, d’accord, mais séparés, de toute façon, dans les restaurants, les bus, les toilettes… et les écoles.

Et les femmes noires sont les bonnes à tout faire des blanches : elles nettoient leurs latrines, mais n’y ont pas accès. Elles promènent leurs chiens à l’entrée des parcs où elles ne peuvent accéder.

Adela en rit : les chiens peuvent chier là où les Blancs se promènent. Elle regarde le panneau «  White only », « et ne put s’empêcher de sourire en songeant qu’à cause de leurs fichues lois c’est forcément un Blanc qui finirait par marcher dans la merde du chien ».

Dans ce quartier blanc de Birmingham, début août 1963, toute révolte est inutile, et accepter de déroger à la règle, comme par exemple recevoir un cadeau d’une blanche, ou qu’elles prennent un café ensemble, ne peut que conduire à sa perte, Adela en est parfaitement consciente.

Ceci début août, parce que le 28, Martin Luther King lancera son «  I have a dream » qui changera les consciences.

A Montgomery, Rosa Parks avait refusé de céder sa place de bus à un Blanc, il y a huit ans, précédée par d’autres femmes courageuses ; Adela, elle, reçoit les camouflets des Blancs, c’est comme ça. « On en avait pendu pour moins que ça. Elle allait devenir l’un de ces « fruits étranges » que chantait Billie Holiday. »



Entre temps, Bud, détective alcoolique perdu dans l’alcool, sans boulot, reçoit la visite des parents qui recherchent leur fille, et les regarde, hagard. « Comme si aucun Noir n’était jamais entré dans son bureau. Ce qui était le cas, d’ailleurs. »

Renvoyé de la police, il survit de bouteille en bouteille, et ne se rend même pas compte, parce qu’il a vraiment très soif, que son foutoir va être nettoyé par Adela, recrutée par hasard par un de ses ex-collègues.

S’il veut avoir l’air de chercher l’assassin de la petite, il lui faut l’aide d’une Noire, sinon, les portes se ferment, et une chose est sûre, le meurtrier ne peut qu’être Noir. Voleurs, menteurs, et assassins, d’autant qu’au premier meurtre, s’en ajoute d’autres. Il n’invente rien, il sait.

Pourtant, il accepte qu’Adela l’aide, pourtant, elle l’aide, Adela.

En cela aidée par une vieille dame, celle qui voulait lui offrir du café, preuve qu’elle n’avait plus toute sa tête, et qui parle sans queue ni tête… mais cependant, oui, ses mots aident, elle n’est pas si folle.



Le racisme ordinaire, dans sa pauvreté, sa haine et ses idées reçues, énoncées brutalement, et aussi avec humour, distance prise tout en étant dedans, dans l’ordinaire des croyances, pour produire un livre bluffant, unique dans son genre, émouvant et grandiose, bouleversant par ses simples dialogues.

L’ordinaire de la haine, si misérablement facile lorsque l’on se croit du bon côté. Le courage, pour Adela, consiste à sortir par la grande porte, et non celle de service, quand elle donne sa démission ; il consiste à entrer dans le parc « White only » devant les yeux médusés de deux pauvres commères blanches, et à se rouler dans l’herbe.

Ne nous réjouissons pas trop vite : l’ombre du Ku Klux Klan qui fait brûler une croix devant la maison où Adela a reçu Bud pèse et continue à peser.

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Alabama 1963

Alabama 1963

Une petite fille noire disparaît.

La police s'en fout et vire les parents.

On la retrouve violée et tuée.

.

Une deuxième petite fille noire disparaît.

La police s'en fout et vire les parents.

On la retrouve violée et tuée.

.

Une troisième....



Vous avez compris.

Le livre est un polar. Mais l'enquête, menée par un duo improbable (un détective privé blanc viré de la police, sa femme de ménage noire), est surtout un prétexte pour raconter la vie des Noirs à l'époque. Rappeler le mépris dans lequel on les tient. La présence du KKK violente, oppressante. Et les remarques racistes, consternantes....

Et ces petites filles que la police ignore du fait de la couleur de leur peau....



Une bonne piqûre de rappel.... avec l'espoir du "plus jamais ça" !

Bon évidemment vue l'actualité...........
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Alabama 1963

Une petite fille noire qui disparaît, ce n'est pas le genre d'affaire qui intéresse la police de Birmingham, en 1963. Et tant pis si on la retrouve violée et assassinée. Et tant pis si d'autres fillettes sont enlevées. Et tant pis si elles meurent. Ce sont des histoires de noirs, ils n'ont qu'à régler ça entre eux.

Mais les parents de la première victime ne veulent pas en rester là et ils engagent Bud Larkin pour trouver le meurtrier. Bud : ancien flic, détective privé, alcoolique patenté, bordélique et raciste.

A la faveur d'une blague que lui ont fait deux amis flics, il se retrouve avec une femme de ménage sur le dos ! Une négresse ! Sans doute une voleuse ! Curieuse, aussi, elle qui écoute aux portes quand il reçoit ses clients.

Mais Adela Cobb, veuve, mère de trois enfants, femme de ménage de son état, analphabète, va lui être d'une aide précieuse. Elle lui ouvre les portes de ces familles noires qui se méfient des flics, des détectives, des blancs.

Envers et contre tous, l'improbable duo va enquêter pour retrouver le monstre, tueur de petite fille.



Voilà un roman comme on les aime ! Une enquête policière, certes, mais cela va bien au-delà. C'est l'histoire d'une époque : l'Amérique du début des années 60 avec l'assassinat de Kennedy, les exactions du Ku Klux Klan, le racisme des institutions, la ségrégation raciale. Une époque et un Etat, l'Alabama, où l'on ne s'embarrasse pas de droits civiques. Les noirs continuent à voyager à l'arrière des bus. Ils ont droit aux coups, aux insultes, à la condescendance des blancs. Mais malgré ce contexte délétère, les auteurs usent de l'humour pour faire passer leur dénonciation de cette Amérique raciste.

Le personnage attachant d'Adela n'y est pas pour rien. Une femme courageuse qui endure les brimades de ses patronnes mais n'en pense pas moins. Son association avec un détective blanc est un grand moment. Bud a peut-être été un bon flic et, à coup sûr, il ferait un excellent détective, mais l'alcool ne lui rend pas service. Leurs échanges sont savoureux et le lien qui se crée entre eux, au-delà des préjugés, est très émouvant. Une petite allusion à La couleur des sentiments prouve que le propos est bien de dénoncer les injustices avec légèreté.

Un flic blanc qui se rachète, une domestique noire qui s'émancipe pour une enquête qui sert de prétexte à une radiographie de la société américaine des années 60.

Un roman qui fait passer du rire aux larmes. C'est dur et tendre à la fois, profond et drôle, noir mais optimiste. Un énorme coup de coeur.

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Alabama 1963

1963 : la guerre de Sécession est terminée depuis près d’un siècle, les esclaves ont été affranchis, le gouvernement américain tente timidement d’imposer des lois d’égalité pour en finir avec la ségrégation, mais hélas ! La question noire est plus que jamais d’actualité, plus que jamais en Alabama. Zoom sur cet état, où l’on fait connaissance d’Adela qui travaille pour les blancs, subit des injustices flagrantes que sa condition l’oblige à accepter, Adela, dévouée à sa famille, une petite femme courageuse, travailleuse, un tantinet coléreuse, déterminée qui promet d’excellents moments de lecture. Il faut dire que sur son chemin, se tiennent des personnages au tempérament bien marqué ce qui aidera à comprendre sa manière d’être et provoquera colère, sourire ou tristesse chez le lecteur. On y fait connaissance de ses amies et voisines, ses patronnes, son beau-frère, ses enfants…



…Et puis il y a Bud, peu recommandable sans doute, raciste, alcoolique, bagarreur, venant volontiers chercher querelle chez Lorraine, propriétaire du bar où il retrouve ses anciens collègues de la police, certains événements l’ayant obligé à démissionner pour devenir détective. Personnage intéressant que l’on verra évoluer tout au long du roman.



J’ai passé quelques heures délicieuses à la lecture de ce roman thriller plein de rebondissements et de surprises, un de ces romans passionnants sur la question noire aux Etats-Unis dans les années 60, à lire absolument pour compléter ces connaissance sur cette épineuse page de l’histoire d’Amérique.
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Alabama 1963

Alabama 1963.

Le titre en dit déjà long sur le paysage qui nous attend. Rien que le titre, on sait déjà qu'on ne sera pas ici au pays des Bisounours.

Le thème fait froid dans le dos, on s'attend à du lourd et on n'est pas déçu... Birmingham en Alabama, le récit démarre au cours de l'été torride de 1963, cette fameuse année qui sera fatale quelques mois plus tard au Président Kennedy.

Le corps sans vie d'une fillette noire est retrouvé. Mais que fait la police ? Oh, vous savez, la police s'en préoccupe bien sûr, n'allez pas croire l'inverse, mais vous savez ce que c'est, il y a tellement à faire à côté, ne serait-ce que la sécurité dans les quartiers blancs...

Mais d'autres filles noires disparaissent toujours selon le même rituel...

C'est l'occasion pour nous de faire connaissance avec Bud Larkin, ancien flic viré de la police, reconverti en détective privé bougon, qui carbure au whisky et bien sûr raciste, comme à peu près tous les flics ou anciens flics que compte le charmant comté de Birmingham, mais aussi l'Alabama, et tant qu'à faire, tout le sud des États-Unis. Mais c'était en 1963... Ouf ! Comme vous le savez, les temps ont bien changé depuis lors...

Bref ! Bud Larkin, entre deux états proches de l'Ohio, reçoit des clients... Souvent ce sont des cocus blancs, c'est un peu sa spécialité... Il faudrait savoir où Madame passe ses après-midis et avec qui... Un flagrant délit, ce serait l'idéal... Mais Bud Larkin n'est pas très inspiré, jusqu'au jour où le père d'une des filles disparues lui demande d'enquêter. Contre toute attente il accepte...

Dans le même temps, nous faisons connaissance avec Adela Cobb, femme de ménage noire, Bud Larkin la prend à son service chez lui, car voilà, le fameux Bud Larkin, ce n'est pas vraiment un maniaque de la propreté... Son univers est un vrai capharnaüm.

Bien sûr tout les oppose, ces deux-là, a priori ça ne peut pas faire bon ménage entre eux, si j'ose dire. Adela commence à se mêler de ce qui ne la regarde pas. C'est sans doute son côté jeune veuve et mère de famille. Elle pense que les petites filles, même noires, ne devraient pas disparaître comme cela, bon sang ! Mais de quoi se mêle-t-elle ?!

Oui, on s'attend à du lourd et on sera servi, mais c'est un ton ironique qui s'invite dans le récit, des propos incisifs mêlés d'humour... Et un duo de choc que tout oppose. Et c'est sans doute là la force, la richesse, le sens aussi, de ce roman.

Cela n'enlève rien à la gravité du sujet, bien au contraire.

Le ton est un peu décalé, Adela est un personnage particulièrement attachant et bientôt à force d'avoir bien nettoyé, rangé l'intérieur de chez Bud, Adela se dit qu'il y a peut-être lieu de continuer sa tâche en mettant de l'ordre dans les idées de celui-ci...

Ce roman est addictif. Son rythme m'a plongé dans l'horreur américaine, la ségrégation, le Ku Klux Klan, mais aussi la réalité ordinaire, le quotidien parfois sordide, insupportable...

Mais il y a toujours ce pas de côté, ce rai de lumière qui effleure les nuages, des rires d'enfants dans un champ de coton...

Qui plus est, les personnages secondaires sont atypiques, ne manquent pas de relief et forment au final une communauté qui donne du sens au propos.

J'avais repéré depuis quelques mois ce roman sur Babelio, et mon amie Blandine que je remercie au passage, m'avait encouragé à le lire. Je ne sais pas pourquoi, je pensais que ce livre était un roman américain. Qu'elle ne fût pas ma surprise de découvrir que ce roman avait été écrit à quatre mains par deux auteurs français que je ne connaissais pas, Ludovic Manchette et Christian Niemiec.

Allez, je ne résiste pas à l'envie de vous partager un air qui me trotte dans la tête en terminant cette chronique, c'est du Neil Young pur jus :

« Oh Alabama

The devil fools

With the best laid plan.

Swing low Alabama

You got spare change

You got to feel strange

And now the moment

Is all that it meant. »

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Alabama 1963

J'ai beaucoup tardé à m'atteler à ce retour de lecture, parce que je n'arrivais pas à cerner pourquoi je n'ai pas eu le coup de cœur attendu. J'ai lu nombre de critiques depuis la parution de ce roman, dont la plupart très enthousiastes, notamment d'ami(e)s dont les goûts sont proches des miens. Et comme souvent dans ce cas-là, mon attente est devenue trop forte, ce qui a engendré une (toute relative) déception. J'ai vu notamment çà et là des références à "La couleur des sentiments", un des livres que j'emporterais sur mon île, et non, désolée, mais "Alabama 1963" n'a pas suscité en moi le même enthousiasme.

"Mais pourquoi diable a-t-elle mis 4 étoiles, alors qu'elle n'arrête pas de nous rabâcher que ça ne lui a pas tant plu que ça ?" vous croyez que je ne vous entends pas maugréer dans mon dos ? Attendez, je vous explique bientôt. Mais d'abord je vous remets vite fait en mémoire de qui et de quoi on parle, au cas où vous n'auriez lu aucune des 496 critiques précédentes, on ne sait jamais.

Plusieurs fillettes noires ont disparu dans les environs de la ville de Birmingham, Alabama, en cet été 1963. Comme la police ne manifeste pas un entrain démesuré à les retrouver, y compris après la découverte du cadavre de l'une d'entre elles, la famille d'une des jeunes disparues se tourne vers Bud Larkin, archétype du détective de série B, déglingos, m'enfoutiste, et en plus...blanc pétri de toutes les idées racistes de l'époque. Pas forcément l'idée du siècle...

Heureusement pour eux, par un incroyable concours de circonstances (premier passage où j'ai un peu tiqué), Adela Cobb va venir travailler comme femme de ménage chez lui. Evidemment elle est noire, et évidemment aussi, les relations vont être compliquées entre eux au début. Mais très sensible à la détresse des parents des jeunes disparues, Adela va insister jusqu'à ce que Bud se remue le derrière pour enquêter. Vous en savez assez sur la trame, évoquons un peu plus les personnages. Bud est un ancien flic qui traîne des casseroles, il est complètement désabusé et balade son mal-être entre son bureau-bauge, et son troquet favori où il retrouve d'anciens collègues. Je l'ai déjà croisé maintes fois, il ne m'a donc pas vraiment interpellé. Adela m'a effectivement évoqué un peu les bonnes de "La couleur des sentiments", quand elle décrit ses différentes patronnes blanches et leurs travers (parfois sympathiques, comme la vieille Gloria que j'ai beaucoup appréciée). On fait connaissance avec quelques-unes de ses copines, et avec sa famille, trois enfants et un beau-frère parasite.

Le contexte historique (ségrégation, discours de Martin Luther King, assassinat de Kennedy) est évidemment évoqué, mais de façon un peu trop anecdotique à mon humble avis. C'est d'ailleurs la principale raison de l'absence d'une cinquième étoile. Il m'a manqué de l'épaisseur à ce niveau-là, je trouve que si déjà les auteurs ont choisi précisément 1963 il aurait été bienvenue d'étoffer un peu, quitte à rajouter une cinquantaine de pages.

Mais j'arrête de faire ma grincheuse, parce que tout compte fait, j'ai quand même passé un très bon moment avec ce roman, l'écriture est dynamique (beaucoup de dialogues), les personnages attachants pour la plupart, et l'enquête, si longue à démarrer se révèlera finalement passionnante. J'ai soupçonné la conclusion avant la fin, mais ce n'est pas bien grave.

Je voulais d'abord mettre 3,5 étoiles, mais tout bien pesé, le roman présente quand même bien plus de qualités que de défauts, il a malheureusement souffert d'une comparaison difficile à soutenir. Alors comme je suis dans un jour de grande générosité, j'ai poussé jusqu'à 4. Mais vu le nombre de notes maximales, j'ai presque l'impression d'avoir été pingre !
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Alabama 1963

Alabama 1963, Bud un ex flic qui traine des casseroles et qui est constamment imbibé au wiskey mène l’enquête avec Adela sa femme de ménage noire. Autant dire que certains apprécient peu. Notamment les gars qui se baladent en chemise de nuit blanche toute l’année avec leur bonnet enfoncé trop bas sur la tête. Ils doivent être daltoniens ou un truc du genre : ils ne supportent pas qu’on mélange les couleurs. Ou alors un jour de lessive leurs belles chemises de nuit ont perdu leur blanc éclatant et depuis ils font une fixette. On a beau leur dire que les gens ne déteignent pas ils sont complètement flippés.



Bref, toujours est-il que cette association atypique n’est pas du gout de tout le monde. Pourquoi ? Je viens de vous le dire : Alabama 1963 ! A cette époque peu importe l’abolition de l’esclavage et les belles paroles la ségrégation est la norme et la haine et les préjugés pullulent. Blancs comme noirs sont conditionnés dans leurs rôles respectifs au point que faire autrement dépasse l’imagination et l’entendement de la plupart. Les noirs par peur (difficile de les traiter de trouillards quand le risque est la mort) et les blancs par confort (vous savez les histoires de race supérieure et autres conneries du genre) et pour certains par trouille aussi. Les amis des noirs finissent comme les noirs récalcitrants : au bout d’une corde, et encore ça c’est quand ils ont de la chance.



Ludovic MANCHETTE et Christian NIEMIEC décortiquent les mœurs de la société Américaine de l’époque sans manichéisme. Le poids de l’éducation, des croyances, des idées reçues, la terreur que font régner les encagoulés font que la ségrégation est la norme. Autant dire que tout le monde est racisme, par conviction, par obligation, par habitude, par ignorance… peu importe le résultat est à peu près le même. Si ce n’est que certains sont en capacité de se remettre en question et de s’engouffrer dans la brèche du changement car oui les choses commencent à changer. Dans le sang, dans la douleur mais elles changent.



J’ai beaucoup aimé le personnage de Bud . C’est un personnage meurtri qui s’est retiré du monde pour penser ses blessures. C’est aussi un personnage emblématique de cette société. Malgré tous ses travers c’est un bon gars qui finit par amadouer et attendrir le lecteur. Ce n’est pas Adela qui dira le contraire. Adela justement, forgée dans la souffrance, la sueur et l’espoir elle est de celles qui n’abandonnent jamais. Un duo qui se complète à la perfection, fait pour se comprendre, instinctivement.



Mais, au fait, je vous ai bien parlé d’une enquête : notre duo d’enquêteurs cherche à faire éclater la vérité et à trouver l’assassin des petites filles noires que la police blanche ne recherche que mollement. Car « les petites filles ça ne disparait pas comme ça » comme dit Adela. Une enquête un peu convenue mais qui reste intéressante et tient le lecteur en haleine. Les férus de polar trouveront sans doute le coupable avant le mot fin mais cela n’enlève rien au plaisir de lecture. En ce qui me concerne l’enquête est passée au second plan, ce qui m’a vraiment plu c’est qu’elle est menée sur fond d’analyse sociétale. Un parti pris qui n’est pas sans rappeler La couleur des sentiments de Kathryn STOCKETT. Les auteurs font d’ailleurs ouvertement allusion à cette histoire. Un clin d’œil qui fera sourire les lecteurs de STOCKETT.



Un livre qu’on ne peut plus lâcher une fois commencé.

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Alabama 1963

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