AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de cocomilady


Extrait du chapitre 1

Appelé une demi-heure plus tôt pour un homicide au bois de Boulogne, Franck fut ravi de poursuivre son investigation sur un lieu proche de son domicile. Cette fois-ci, tout portait à croire qu’il pourrait passer un peu plus de temps auprès de sa compagne, qui lui manquait terriblement.

En se faufilant dans les sous-bois, le capitaine Benafi salua l’un des officiers de la brigade VTT responsable de la surveillance de ce secteur. A première vue, ce dernier verbalisait un homme, le pantalon à peine relevé. Il venait de le faire sortir de l’une des tentes de fortune dressée par une prostituée dans cet endroit appelait familièrement « le carré magique ». A entendre l’individu pris la main dans le sac, celui-ci ne faisait que discuter avec une amie qu’il n’avait pas revue depuis des mois. Ces propos firent rire l’officier qui tendit à l’homme le procès-verbal. A quelques lieues de là, quatre cantonniers s’efforçaient d’effacer toute trace de vie nocturne trop agitée en protestant. Les joggeurs ainsi que les familles allaient bientôt aborder les chemins boisés. Ils devaient se hâter. La vue de préservatifs usagés, de mouchoirs en papier et de canettes de bière nuisait au charme et à la réputation déjà bien entachée du bois de Boulogne. Tout devait disparaître pour laisser place à la verdure exceptionnelle de l’endroit, de manière à profiter pleinement de cette nature encore abreuvée à cette heure par la rosée du matin. Une légère brise vint effleurer les feuilles des arbres qui, dans un léger flottement d’air, laissèrent s’échapper une douce odeur champêtre.

Franck ne s’attarda pas. Il enfila ses gants de latex tout en empruntant le sentier de petite randonnée qui longeait le lac inférieur du bois. Au bout d’une centaine de mètres, il aperçut enfin le corps des officiers qui encadraient le périmètre. Des barrières de sécurité entouraient les lieux interdisant toute intrusion de civils sur la scène de crime, évitant ainsi de la souiller. Le capitaine se glissa parmi la foule déjà en proie à la curiosité, puis se dirigea, non sans peine, vers l’un de ses collègues.

_ Salut Quentin. Alors, qu’est-ce qu’on a ?

_ Femme entre vingt et trente ans, taille moyenne, blonde aux cheveux longs, aucune marque sur le corps, pas d’effets personnels, dit-il en lisant ses notes. Pour le reste, il faut voir avec le médecin légiste.

Franck s’agenouilla, puis souleva délicatement le drap mortuaire qui recouvrait le corps de la victime. Celle-ci reposait sur l’herbe fraichement coupée, allongée entre quelques buissons fleuris. A première vue, la jeune femme ne présentait en effet aucune marque sur sa peau blanche entièrement dénudée.

_ Tu l’as vu le médecin légiste ?

_ Oui patron, il est là-bas derrière les arbres. Il avait une envie urgente, répondit Quentin en ricanant.

_ On dit une envie pressante !

_ C’est la même chose patron. Il avait envie de pisser.

Franck se mit à rire à ces mots, puis dévisagea Quentin en ajoutant :

_ Mais qu’est-ce que je vais faire de toi, hein ? Tu es irrécupérable !

_ C’est bizarre ça, ma femme me pose la même question tous les jours !

Franck commençait à examiner la dépouille plus attentivement lorsqu’une tape à l’épaule le fit sursauter.

_ Salut ma gueule. Alors, pas banal notre cadavre, hein ? dit le médecin légiste en s’agenouillant à ses côtés.

_ Ouais Chris, pas banal ! Dis-moi, t’as pas peur de te faire griller à pisser en pleine nature ? Y’a du monde ici, si tu vois ce que je veux dire. Et je te rappelle que c’est interdit par la loi.

_ Merde ! Tu vas m’arrêter ? Et si tu parles des prostituées, elles ne traînent pas dans le coin à cette heure-ci, pis si tu veux mon avis, elles en ont vu d’autres.

_ Ah, pas sûr ! C’est pas donné à tout le monde de voir un fossile en pleine action !

_ Très drôle Franck, très drôle.

Le médecin légiste Christopher Rogier travaillait en équipe avec Franck depuis plus de quinze ans. Leur efficacité ainsi que leur complicité soudaient l’ensemble de l’équipe, et leur amitié était à toute épreuve. A voir le médecin, tout le monde aurait pu penser qu’il venait à peine de souffler ses quarante bougies. Néanmoins, il en comptait huit de plus. Il ne coiffait que rarement sa crinière blonde et portait uniquement des jeans troués enrichis de tee-shirts de hard-rock, le plus souvent noirs. Son style, associé à sa jeunesse d’esprit, le rajeunissait. Ses un mètre quatre-vingt pour soixante-quinze kilos et de son style décalé, renvoyait de Chris l’image d’un homme immature et volage, ce qui était en quelque sorte le cas. Encore célibataire à presque cinquante ans, l’envie de fonder une famille et de dormir aux côtés d’une seule et même femme n’avait jamais fait partie de ses priorités. Sa manière de vivre, qui incluait une conquête différente dans ses draps d’une semaine à l’autre, lui convenait parfaitement. Ce qui ne l’empêchait nullement de respecter et de comprendre les couples mariés et soudés. Certes les sorties accompagnées de son ami se faisaient rares depuis sa mise en ménage avec Elisa, mais il l’acceptait.

_ Trêve de plaisanteries, si on parlait un peu boulot. Tu as quelque chose pour moi ?

_ Oh que oui ! Observe bien sa bouche.

Poussé par la curiosité, Franck releva les manches de sa veste de costume, puis tenta délicatement d’ouvrir la bouche de la défunte. Néanmoins, une légère tension l’en empêcha.

_ Putain de merde ! C’est quoi ce bordel ?...
Commenter  J’apprécie          00









{* *}