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Citation de Ledraveur


Les sciences n’ont commencé à se développer vraiment que lorsque par méthode on a fait disparaître Dieu et son action de l’horizon de leurs recherches. Tant que Dieu pouvait être considéré comme une cause susceptible d’intervenir dans le cours des phénomènes, l’activité scientifique est restée limitée dans son exercice. Elle était empêchée de prendre toute sa dimension. Elle ne s’est vraiment déployée, mais alors avec quel succès, que lorsqu’elle a fait volontairement abstraction de ce « Dieu-cause » ou plutôt de cette idée sur Dieu, lorsqu’elle s’est libérée totalement de l’entrave que constituaient ses croyances sur un Dieu intervenant librement, directement, de façon discrétionnaire et décisive, dans le devenir du Monde. De la sorte Dieu n’a plus été invoqué pour résoudre à peu de frais les questions encore sans réponse, ni pour procurer des réponses péremptoires supprimant définitivement les questions susceptibles de se poser. Cette mise systématique hors de question de l’action de Dieu comme cause au sens commun du terme a permis de même aux sciences humaines de se développer dans leur domaine propre.
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… prendre toujours plus conscience du réel, du moins autant qu’il peut le supporter, afin qu’il entrevoie le grand large et qu’il prenne son vol ?
Paradoxalement ne faudrait-il pas être, sinon athée, du moins être amené à se poser des questions insolites, et certes cruelles en leurs conséquences, « déstabilisantes », au sujet de l’existence de Dieu, pour être susceptible d’atteindre à une foi en Dieu réelle, à une foi qui, parce qu’elle est vivante, conduit l’homme sans cesse à la remettre en question et sans cesse à la réaffirmer. Perpétuelle confrontation entre ce que le croyant reçoit du dehors de par sa connaissance objective du réel, et ce qui monte en lui du dedans où s'impose l'exigence née de son intériorité quand il prend suffisamment conscience de soi.
p. 22C’est pourquoi, pour qualifier l’éthique, je récuse le terme d’obéissance et choisis le mot fidélité : l’exercice de la fidélité donne à l'obéissance un caractère personnel que la lettre de la loi ne peut pas édicter et que la simple obéissance ne peut pas atteindre.
Prenons un exemple symbolique : Les dix commandements de la Loi de Moïse. En supposant — ce qui est loin d’être certain — que plusieurs d’entre eux ne soient pas très marqués par des conditions contingentes particulières à la civilisation où ils ont été édictés, les dix commandements sont d’une nature trop générale pour que les frontières qu’ils tracent ne doivent jamais être franchies dans certains cas imposés par les situations et les circonstances, par les conditions de vie difficiles ou extrêmes, par l’état physique ou psychique du moment de tel individu. Il est des fidélités qui vont jusqu’à dicter impérieusement des désobéissances comme souvent il en est qui exigent beaucoup plus que ce que la loi peut commander... Il faut encore dire davantage : il est des obéissances qui sont des infidélités... lorsque derrière l’observance de la loi on se défend d’avoir à correspondre personnellement à des exigences sur lesquelles celle-ci garde le silence...
Il est bien évident que ces considérations ne peuvent être comprises dans leur juste portée et ne pas être cause de soupçons voire de scandales que si on a déjà eu l'occasion de se les formuler à soi-même et d’en tirer les conséquences pour son propre comportement.
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p. 29
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