AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de lanard


Censure / autocensure
P 155-156 Touts les techniques de mise à l'écart ou de repérage des livres jugés dangereux présentent l'inconvénient d'être apparentes. Leur utilisation entraîne pour le bibliothécaire le risque d'être qualifié de censeur, terme que le sens commun revêt d'une signification péjorative. De plus, les pratiques de marquage des livres attirent l'attention du lecteur sur les textes ainsi stigmatisés. Comme le remarque Pascal Pia, "l'emploi du mot enfer pour désigner les rayons de la bibliothèque, où sont rangés les ouvrages réputés contraires aux bonnes mœurs, n'aura pas été pour atténuer la curiosité que de tels ouvrages suscitent. Qu'il y ait enfer des imprimés, cela donne à rêver, même à qui ne lit jamais1".
Les bibliothécaires préfèrent de ce fait exercer une sélection à l'achat et éviter de commander des ouvrages qui leurs paraissent indésirables. Cette sélection sera d'autant plus forte que le budget de la bibliothèque est restreint et les choix flirteront dès lors d'un manière plus étroite avec les censures. Comme nous l'avons montré précédemment, la ligne de partage entre les exclusions qui procèdent du choix et celles qui relèvent de la censure est difficile à tracer. Le censure peut s'effectuer d'un manière volontaire, le bibliothécaire écartant tel ou tel titre, selon son propre vouloir et en mesurant les effets de ses choix, ou relever de autocensure.
On peut considérer que, lorsqu'il pratique des censures, le bibliothécaire projette ses propres craintes sur le lecteur, et n'offrira pas en lecture ce qu'il redoute pour lui même ou pour le pérennité des valeurs politiques ou philosophiques auxquelles il est attaché. Alors que, par l'autocensure, il ne commandera pas certains livres, qui ne l'inquiètent pas personnellement, mais dont il craint que le contenu ou la présence dans la bibliothèque ne soit ni compris ni accepté. Il redoute donc des réactions agressives pouvant survenir pour des motifs moraux, philosophiques, religieux ou politiques, mais, également, des reproches liés au rôle qui lui est assigné.
Encore faudrait-il introduire quelques nuances dans ces définitions. Il est, en effet, difficile de démêler l'écheveau dans lequel se confondent censures et autocensures. Les pressions que subit le bibliothécaire s'inscrivent plus fréquemment dans ses propres représentations que dans l'ordre du réel ; le bibliothécaire suppose, en fonction de ce qu'il sait de son autorité de tutelle et de ses lecteurs, mais aussi en fonction de ce qu'il a intégré de son rôle d'éducateur, qu'il est préférable de ne pas choisir tel ou tel titre. Lorsque les pressions ne s'exercent pas à travers des interventions concrètes, aucun élément ne prouve qu'il ne mêle pas ses propres hantises à celles supposées de l'autorité de tutelle et des lecteurs.
Commenter  J’apprécie          70





Ont apprécié cette citation (3)voir plus




{* *}