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Citation de rkhettaoui


Je ne suis pas une simple victime venue se plaindre comme mille autres dans ce bureau. Je suis un concept. Terrible. Une mère à qui l’on a arraché son enfant, la chair de sa chair, sous ses yeux. Il m’est arrivé ce qui n’arrive qu’aux autres. Cette femme est jeune, elle porte un uniforme bleu marine qui voudrait lui laisser croire qu’on peut tenir le mal à distance. Elle est gardienne de la paix, rien de moins, elle a la peau lisse et le regard doux. Elle n’est que bonnes intentions. Et par ma présence, c’est une angoisse originelle qui prend corps et vient transpercer sa carapace. Je suis le numéro malchanceux de la loterie criminelle. Je suis l’égérie de la poisse. Me toucher serait attraper une maladie mortelle, dévoreuse de chair. Croiser mon regard serait, peut-être, rester pétrifiée pour l’éternité. Elle voudrait me le cacher, mais je le sais. Je ne lui en veux pas.   — Pernot, vous pouvez venir une seconde ? Une forme humaine a passé son buste par la porte et fait signe à l’officier de la suivre dans le couloir. Je les entends deviser à travers le mur tandis que la petite blonde tâche de garder une contenance en m’adressant par intermittence quelques sourires contrits. Trente secondes plus tard, Pernot revient s’asseoir en face de moi et ouvre enfin la bouche. — On m’informe que la brigade criminelle va reprendre votre dossier, madame. La brigade criminelle. Sans que je le veuille, ces mots me ramènent quinze ans en arrière, au moment où la Crim’ a fait irruption dans ma vie en la personne d’Arsène Galien. Je revois ses boucles brunes, ses yeux noirs, sa fougue. Les années qui ont suivi, brûlantes dans ma mémoire au point que je ne m’autorise jamais à y repenser. Et au bout de cette guirlande de souvenirs, le bruit mat du choc auquel on ne s’attend pas. Arsène, le chevalier blanc puis l’enflure. L’oiseau sauvage de mes deux. L’incident de parcours. Je me souviens de sa fierté à porter l’écusson brodé d’un chardon. « Qui s’y frotte s’y pique ». C’était la devise de la Crim’. Pour moi, ça restera surtout la sienne.  
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