ÊTRE VIVANT
Pour écrire un poème
il faut être vivant
de tous ses vocables
infinitésimaux
et pour être vivant
avoir regardé longuement la mer
jusqu’à ce que les yeux soient couleur mer
avec des oiseaux de mer peints sur le ciel de l’iris
avoir respiré le ressac par bouffées
jusqu’à ce que les parfums de mer
migrent au profond des pores
avoir écouté toute une vie la scansion de la mer
pouls cosmique de l’univers
pour écrire un poème
il faut renaître sans cesse
enfanter en soi les morts
bercer les noyés devenus varech
écouter la mer chuinter
un mot toujours le même difficile
à déchiffrer quelque chose comme :
é-bau-che é-bau-che é-bauche
et pour cette é-bau-che commencer non par les mots
mais par le rythme et regarder
les dessins de l’écume sur le sable
nager en avant et à rebours
de siècles en siècles
jusqu’à retrouver en soi
le oui central
rayonnant et dansant
sur la chair du monde
passé présent
et futur