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Citation de Cielvariable


Quoi de plus arbitraire que de choisir 101 parfums à soumettre aux narines assoiffées de nos lecteurs ? Chaque année, plus de 1 000 parfums nouveaux sont lancés sur le marché ! Alors 101 : trop ou trop peu ? Trop peu, au vu du nombre de parfums, dont certains remontent à plusieurs siècles, et trop peu, si l’on songe à tous ceux qui mériteraient d’y figurer et n’y sont pas ! J’entends d’ici les récriminations des uns et des autres : « Comment ! Tel parfum n’y est pas ! Ce n’est pas sérieux… » Et je répondrai invariablement : « J’en suis désolé, il aurait été sans doute le 102e de la liste tant il est intéressant. Mais nous n’avions qu’une place limitée ! »
La règle du jeu de cette collection n’est pas de proposer les 101 « meilleurs » ou les 101 plus vendus, ni même un Guinness des parfums. Plutôt un choix personnel, et intime parfois (le parfum joue de notre sens le plus mystérieux et instinctif : l’odorat). Ce choix est aussi un parcours à travers le temps et l’espace. Les parfums anciens, les parfums stars des années folles, les parfums modernes, les parfums de marque, les parfums de niche, les parfums d’auteur, les parfums artistiques, les parfums européens et orientaux, etc. : comment arbitrer de tels choix sans être injuste ? J’ai voulu aussi proposer une invitation au voyage, pour sortir du piège trop rassurant : « Les bons parfums sont français », ce qui est de moins en moins vrai…
Trop peu donc, mais trop encore pour le lecteur qui s’offrirait le luxe de sentir à la suite les 101 parfums proposés à son nez, comme je le fis moi-même. Quoique professionnel et habitué de ce genre de « dégustation olfactive », je manquai d’en tomber dans les pommes ! Le seul parcours de la sélection des Guerlain – la marque la plus ancienne et la plus réputée de la parfumerie française – dans sa somptueuse boutique des Champs-Élysées, faillit me faire perdre mon odorat : l’exercice était du genre de ceux des testeurs de café ou de thé, qui mettent en bouche et crachent immédiatement des dizaines de breuvages ; la rapidité du test faisant partie de la sensibilité aux différences…
Pour le parfumeur que je suis, l’exercice se doublait d’un effort de concentration et d’objectivité (relative, nous l’avons indiqué d’emblée, le choix étant largement instinctif) : si je propose ici
« mon choix », j’ai aussi pensé à mes lecteurs et lectrices, dans leur diversité : de goût, d’âge, de culture, etc. J’ai tenté d’être équitable : combien d’arbitrages déchirants durant ce travail de sélection pour aboutir aux 101 ! Les « éliminés » me tiraient des soupirs et presque des larmes…
J’ai voulu tout de même donner au lecteur une vision multiple et objective dans sa diversité : il trouvera des parfums historiques – dont je me suis fait une spécialité depuis bientôt 15 ans – venus de la nuit des temps ou reconstitués à partir d’archives, des parfums stars, de marques devenues parfois célèbres à cause de leurs parfums plus que de leur métier d’origine, des parfums hors normes et aussi beaucoup de parfums d’« auteurs ». J’ai cherché, je ne le cache pas, à valoriser ici ce qui me semble le plus important dans la création d’un parfum : l’art du nez, appelé aussi parfumeur-créateur. Chaque article propose une présentation de celui-ci. On découvrira ainsi ces grands artistes qui, des Guerlain à de plus jeunes créateurs contemporains, font l’histoire de la parfumerie, restant souvent injustement dans l’ombre. À une exception près : le plus grand génie parmi eux, François Coty.
Je souhaiterais d’une certaine manière lui dédier cette sélection qui l’en a pourtant exclu. Exclu pour un motif pratique très injuste : ses parfums – parmi les plus purs chefs-d’œuvre de notre art, comme La Rose Jacqueminot, L’Origan, Chypre, Ambre antique, Émeraude, Jasmin de Corse dont raffolait Colette, etc. – ne sont plus fabriqués. On ne les trouve dans aucune boutique et pas même sur internet. Les formules et le nom appartiennent pourtant à l’un des géants de la parfumerie, le groupe CotyLancaster (supplions ici ses dirigeants de nous les relancer bientôt !). Pour les amateurs, voici une consolation qui me permet de recommander une excellente institution : on peut quand même découvrir les parfums de François Coty à l’Osmothèque de Versailles, le musée des parfums oubliés, créé par Jean Kerléo pour que notre mémoire ne se perde pas. Ce lieu mériterait d’être classé monument historique et au patrimoine mondial de l’Unesco !
S’il n’était pas commode de choisir 101 parfums pour ce petit guide, il ne sera pas non plus commode au lecteur de choisir parmi les 101 que je soumets au jugement final de son nez. Certains parfums se trouvent partout, dans toutes les grandes boutiques généralistes ou duty free d’aéroports. D’autres, dans une seule et unique boutique : ce sont les niches ! Quand j’ai commencé moi-même à créer des parfums confidentiels, le mot n’existait pas. Au début, il ne m’a pas déplu, un peu comme l’appellation des « vins de garage » dans le vignoble du Bordelais.
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