Nicole Notat

Nicole Notat, ex-secrétaire de la CFDT (et première femme à occuper ce poste), démontre par écrit ce qu’elle met déjà en pratique à Vigeo, agence de notation extra-financière, qu’elle dirige après l’avoir fondée.



Sans candeur ni outrecuidance, elle prouve que :

-L’ère est révolue où le compte de résultats, à lui seul, raconte ce qu’il faut savoir de l’entreprise.

-Les données extra-financières résumées dans le sigle ESG (Environnement, Social et Gouvernance) :

-s’intègrent désormais dans l’appréciation d’une entreprise et leur reporting est une plus-value,

-se développent comme des outils de mesure payants et rationnels pour l’investisseur, l’analyste et le citoyen,

-se mettent en place selon des modalités pragmatiques de négociation et d’arbitrages,

- L’actualité internationale et l’utilité boursière de l’ISR (investissement social responsable) se conjuguent et se déclinent comme un critère d’évaluation fiable et incontournable.



Au sceptique, au méfiant comme à l’idéaliste ou au cynique, elle répond que, pour insatisfaisantes que soient les avancées en droit humain, développement durable et protection écologique :

- des institutions comme l’OIT, l’OCDE, l’UNESCO, la HALDE, et les codes différents du travail et du commerce, forment un patrimoine de normes et d’objectifs qui a le mérite d’exister comme base de travail et exercice concret,

- la clarification des causes profondes d’un système défaillant ou cupide et l’interrogation des logiques qui y mènent sont plus fructueuses que la dénonciation des faiblesses personnelles et son ruineux concert de litiges,

- le diagnostic éthique délivre un cahier des charges appliqué et contrôlé, et se démarque ainsi d’une communication cosmétique des valeurs.



De nombreux exemples illustrent ce passage d’une culture

- de déclaration des principes,

- de la certification écrite

- et de la posture morale

à la crédibilité :

- de la preuve, des faits,

- de la conformité au résultat ciblé

- des initiatives concrètes à long-terme

- et des corrections sur le terrain



Exemples :

- Parmi les 2000 clients de l’agence de notation extra-financière Viageo qui ont accepté de se soumettre à ce mode de collecte d’informations et de modèle d’analyse qui captent la visibilité et la pertinence de l’engagement de l’entreprise sur chaque objectif de responsabilité environnementale, sociale ou de question de gouvernance, citons des entreprises internationales cotées comme Danone, EDF, Axa, Lyonnaise des Eaux, L’Oréal, Lafarge au Maroc.



- Le concept de RSE (responsabilité sociale et environnementale) est également testé dans la sous-traitance d’activités et l’achat de produits et de services. Répondre de son sous-traitant, de son fournisseur, s’assurer qu’ils garantissent eux-mêmes le respect des salariés et des normes de sécurité évitent bien des frais de dédommagements pour préjudice et des coûts en réputation entachée comme Apple ou Total (l’affaire Erika) l’ont vérifié à leurs dépens.



- Sous l’égide d’un Programme des Nations Unies pour l’Environnement (UNEP-FINANCES), des assureurs de biens et de services et des gestionnaires d’épargne et de fonds de pension sont les signataires de 6 principes pour l’investissement responsables (PRI) qui engagent les investisseurs et gérants de capitaux à prendre en compte le respect des ressources humaines, la protection de l’environnement et la qualité de la gouvernance dans la gestion des placements qu’ils font pour leurs cotisants et épargnants.



Tout l’enjeu, c’est l’efficacité de la loi au regard du principe qu’elle fixe et de l’obligation qu’elle crée.

Par conséquent, l’analyse extra-financière:

1) se tient à équidistance des intérêts divergents ou contradictoires (ONG, syndicalistes, actionnaires, clients, fournisseurs, salariés, dirigeants, consommateurs, médias, conseillers régionaux, populations locales etc.).

2) exerce ainsi sa vertu pédagogique de l’échange et du dialogue avec tous les acteurs pour les faire cheminer vers le compromis,

3) suscite l’obligation d’identifier et de comprendre les positions en présence, d’une manière incarnée et non figée, et qui fait bouger les lignes.

4) élargit son périmètre d’action sociétale et internationale par le potentiel transverse de son approche entrepreneuriale, notamment avec la globalisation économique et le nomadisme démocratique.

Les détenteurs de titres ne sont plus passifs et font entrer la vraie vie dans l’Assemblée Générale, et les équations mathématiques ne résument pas le « Goodwill ». Les mouvements d’opinion influencent : suite à l’agressivité de l’écologiste José Bové, la direction MacDo en France a immédiatement intégré des fournisseurs locaux et modifié sa diététique.



La notation sociale, facteur de décloisonnement, reflète la capacité de partenariats multiples. Le maillage des concessions pour lequel elle œuvre est la garantie de la santé de l’entreprise et, avec elle, celle de la planète actuelle et future : la vogue du « social business » surfe sur une lame de fond comme le démontrent les impulsions données par des personnalités qui ne sont pas des doux rêveurs, tels que Augustin de Romanet en 2009, à la tête de la Caisse des Dépôts et Consignation, qui créa « le club des investisseurs de long terme » ou le créateur de la NEF (Nouvelle économie fraternelle), filiale du Crédit coopératif.



L’action par Nicole Notat exposée dans ce livre est à méditer.