Si je lis, ma femme est seule et ça la rend triste. Même si elle est dans la pièce, elle sait que je ne suis plus là quand je lis ou que j'écoute de la musique. Je suis ailleurs, avec l'auteur ou le compositeur, mais plus dans la pièce.
Quitter son pays n'est jamais simple, j'en sais quelque chose. La promesse de réaliser son rêve ne change rien à l'affaire. Car quand bien même adviendrait-il, qui nous dit qu'il sera à la hauteur de l'idée que nous nous en faisons.
Je vois une coupure de presse avec en légende : Le plus beau regard d'Hollywood appartient à la France, c'est le regard de Louis Jourdan...
Il rit comme un gamin.
- Ce n'est pas moi qui le dis !
Jean Cocteau est, sans surprise, séduit par la plastique de Louis. Son visage il est vrai, tout comme ce fut le cas pour Jean Marais, semblait être un de ses dessins qui aurait pris vie.
Quant à son goût pour l'Amérique, il lui vient certes des films qu'il va voir avec sa mère et des clients de l'hôtel, mais aussi de la musique qu'il ne se lasse pas d'écouter des heures durant. Bing Crosby, Cole Porter, Armstrong... À force, il connaît toutes les chansons par cœur, tous les morceaux sur le bout des portées, jusqu'à la moindre inflexion de tempo. Cette enfance française conditionnée par des nurses anglaises et les films d'Hollywood fera de lui un homme à l'identité mixte. Résolument français, mais avec un désir profond d'être un jour américain.
Les choses vues et vécues à cet étage devront être gardées secrètes. Parce que ce château sera le lieu le plus gardé d'Hollywood, il sera celui de tous les plaisirs, de toutes les folies, de toutes les extravagances.
UN CHÂTEAU POUR HOLLYWOOD
Elle flottait, inerte, sur le dos. Morte ? Probablement. Habillée de vert émeraude aux reflets mordorés, ses yeux joliment peints de rouge carmin, Lucilia Caesar, puisque tel est son nom, venait de s’éteindre dans l’indifférence générale. Il est rare cela dit qu’un communiqué du gouvernement fasse état du décès accidentel d’une mouche à merde. (Début du roman)
"Cette horrible expression de French Lover que je redoutais tant, il l'avait prononcée.J'espérais pouvoir y échapper, mais il n'en fut rien. French lover, quelle terrible étiquette, dit il, encore désolé!"
Mildred vida un verre de whisky d'une traite et pria sainte Rita, dont elle prétendait qu'elle était à la fois la patronne des putes et des cause désespérées, une activité à plein temps à Hollywood.
Quel incroyable destin que celui de Louis Jourdan (1921-2015). Né à Marseille, il fit rapidement ses débuts devant la caméra de Marc Allégret avant d’enchaîner quelques films français dans les années 1940. Repéré par le grand producteur David O. Selznick, Hollywood lui ouvre ses portes en 1946. Il tournera avec Alfred Hitchcock, Max Ophüls, Vincente Minnelli pour ne citer qu’eux, dans une longue carrière américaine au cours de laquelle il fut élu l’« homme le plus séduisant du monde » et qui le vit donner la réplique à Elizabeth Taylor, Leslie Caron, Brigitte Bardot, Gregory Peck, Franck Sinatra, Grace Kelly ou encore James Dean. Mort à Beverly Hills en 2015, il incarna comme peu d’autres l’élégance française et la beauté.
Richement illustrée, cette biographie raconte l’âge d’or hollywoodien puis le déclin des « grands studios ». Cela au fil d’une mise en scène passionnante, composée d’allers-retours entre le passé glorieux de Jourdan et les nombreux entretiens que l’auteur, Olivier Minne, a pu avoir avec lui au cours des cinq dernières années de sa vie.