Les évasions étaient fréquentes à Charvein. Abreuvés de mauvais traitements, sous-alimentés, perdant l’espoir de sortir de cet enfer, les Incos ne craignaient pas de risquer la mort ou la réclusion cellulaire pour mettre fin à leurs misères.
Ils ne pouvaient s’évader des cases la nuit, ces dernières étant soigneusement gardées par les porte-clés arabes, armés de sabres d’abatis. Ils devaient le tenter sur les lieux de travail. Par groupes, s’enfuyant dans toutes les directions pour semer le désarroi parmi leurs cerbères, ils essuyaient les coups de feu. Les uns tombaient pour ne plus se relever ; d’autres, plus heureux, réussissaient à gagner la lisière de la forêt vierge où ils se plongeaient, poursuivis par les surveillants et leurs auxiliaires. S’ils étaient rejoints, il n’était pas rare qu’on les assassinât sur place. Cela dépendait de la férocité ou de la compréhension des chasseurs d’hommes lancés à leurs trousses.