L'Irlande de 1845 est dépendante d'une seule culture : la pomme de terre. Plus de 1,5 million d'ouvriers agricoles n'ont pas d'autre ressource pour nourrir leurs familles, 3 millions de petits cultivateurs lui doivent l'essentiel de leur subsistance, et la bourgeoisie elle-même en fait une consommation beaucoup plus importante qu'en Grande-Bretagne. Mais en cas de mauvaise récolte, ce sont bien sûr les pauvres des campagnes qui courent le plus grand danger.
Tandis que la Réforme triomphe en Grande-Bretagne, la grande majorité des Irlandais reste fidèle à l'Eglise catholique. Dans les années 1640, une insurrection contre la domination protestante est écrasée par Cromwell qui ne laisse pour choix aux propriétaires catholiques impliquées dans la révolte que " l'Enfer ou le Connacht ", la mort ou l'expulsion vers les terres les plus pauvres de l'ouest. En 1690, la bataille de la Boyne, qui voit la victoire du protestant Guillaume III sur Jacques II, anéantit les espoirs des catholiques. Au début du XVIIIème siècle, ils constituent plus des trois quarts de la population irlandaise mais ne détiennent que 14% des terres.
Personne non plus ne connaissait la maladie qui allait s'attaquer à la pomme de terre en 1845 : le mildiou, provoqué par un champignon, Phytophtora infestans, déclenchant une catastrophe écologique presque sans égale dans l'histoire moderne.
Avec l'Acte d'union voté en 1800, le parlement de Dublin est fondu dans celui de Londres, l'Irlande perd son semblant d'indépendance et devient partie intégrante du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande. La promesse faite par Pitt que l'Union serait suivie d'une rapide émancipation des catholiques (éligibilité au parlement et accès à toutes les fonctions publiques) reste lettre morte : le roi autant que l'opinion britannique s'y opposent résolument.
Daniel O'connell, un avocat catholique radical, va alors donner un cadre au mouvement pour l'émancipation. (...) une loi d'émancipation des catholiques est votée en 1829. (...) Au début des années 1830, il brandit le mot d'ordre d'abrogation de l'Acte d'union, réclamant l'autonomie de l'Irlande au sein de l'Empire.
L'Union est, aux yeux des nationalistes, responsable du déclin économique sensible en ce début de siècle. En son nom, on a instauré le libre-échange entre l'Angleterre et l'Irlande et, dans les années 1820, supprimé les taxes protégeant les manufactures irlandaises.