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Citation de OhOceane


Être envoyé à Königsberg en 1944 – par nul autre que Joseph Goebbels – était censé être une punition et avoir des allures d’exil, mais, pour ma part, je me sentais presque chez moi, d’autant plus que, jusqu’à cet été-là, la ville, de même que la plus grande partie de la Prusse-Orientale, avait été largement épargnée par la guerre. En définitive, ce fut probablement une chance que je sois loin de Berlin et des pensées de qui que ce soit lorsque le comte von Stauffenberg fit sa tentative manquée de coup d’État en juillet, sans quoi j’aurais très bien pu être emporté dans la vague d’exécutions qui s’ensuivit. À une centaine de kilomètres au sud-est de Königsberg, Hitler annonça à la radio qu’il était toujours en vie. Et dans l’éventualité où quelqu’un aurait été là pour assister à une démonstration de loyauté et d’affection – et uniquement dans cette éventualité –, les gens poussèrent un profond soupir de soulagement.
J’étais un humble lieutenant, attaché à la 132e division d’infanterie et au FHO – la section du renseignement militaire allemand chargée du front de l’Est –, et mon travail consistait à effectuer des évaluations significatives des capacités et des intentions soviétiques, puis à les communiquer aux commandants de l’armée, basés à Paradeplatz. Ces évaluations significatives se résumaient en réalité à ceci : l’Armée rouge était sur le point de nous anéantir.
En tant qu’officier, j’avais droit à une chambre au Parkhotel, dans Huntertragheim, près de l’Oberteich. Construit en 1929, l’hôtel était le dernier cri du luxe moderne. Du moins, jusqu’à ce que deux cents bombardiers Lancaster de la RAF fassent leur apparition deux nuits de suite, fin août 1944, et mettent la ville en pièces. Presque tous les immeubles au sud d’Adolf-Hitler-Platz, y compris le célèbre château et la cathédrale où Kant était enterré, furent détruits ou endommagés. Trois mille cinq cents personnes furent tuées et des dizaines de milliers d’autres se retrouvèrent sans domicile – un avant-goût du sort effroyable qu’allait bientôt connaître Berlin. Les étages supérieurs du Parkhotel et de nombreux hommes qui y logeaient disparurent en fumée, mais le second étage, où j’habitais, fut épargné, et le restaurant d’à côté s’en sortit à peu près indemne lui aussi – une bonne chose, car c’était l’un des rares endroits où les officiers allemands pouvaient emmener des filles des services auxiliaires, lesquelles, même en 1944, étaient parfois chaperonnées de manière stricte.
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