Entre deux souffles, je jette un œil par-dessus mon épaule. Le vieux ne se laisse pas semer si facilement que ça. Nous voilà coincés. Pas le temps de grimper sur le talus, notre poursuivant serait immédiatement sur nous. Nous courons en priant qu’il fatigue rapidement sous cette chaleur.
La vibration est discrète, presque imperceptible. Pourtant, elle sonne à mes oreilles comme un chant libérateur. Sous les secousses du lourd convoi encore invisible, le fil discret qui longe la voie se met à siffler.
« On traverse ! que je gueule.
– T’es cinglé, souffle Yan.
– On traverse. Maintenant ! »
Je ne verrai pas mon père sur son lit mortuaire, j'ai tant de belles images de lui en tête. Je ne veux pas de celle-là. (p.99)
Mon père aimait fumer. Sur le trajet, invariablement, il allumait une Gauloise à l'aide de cette chose ronde dissimulée sous le tableau de bord et sur laquelle il fallait appuyer. La fumée qui emplissait le petit espace me rendait très vite malade, entraînant chez moi de sévères nausées. (p.29)
Mon père est parti seul, dans une chambre d'hôpital aseptisée, au son d'un bip de machine. (p.101)