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Citation de Jacopo


Comment devient-on de droite (quand on ne l’était pas auparavant) ? Au fond, j’ai une hésitation, un vrai doute à ce sujet : est-ce qu’on passe à droite quand on adopte un comportement et des valeurs plus individualistes ? Ou quand on adhère à une certaine vision des enjeux collectifs ? Les deux arguments sont défendables.

Quand j’habitais à la campagne, je me souviens de discussions avec un paysan à la retraite, Marcel, qui avait travaillé dans les années 1980 comme routier, puis comme conducteur d’engins sur les chantiers. Il m’expliquait que lorsqu’il avait débuté dans le métier, n’importe quel chauffeur qui en voyait un autre en rade, sur le bas-côté de la route, se garait pour l’aider à recharger sa batterie ou à changer son pneu. Mais le progrès du management, l’optimisation des temps de voyage ont rendu cette solidarité concrètement impossible, et les coups de main spontanés ont disparu, disait-il, au cours des années 1990. C’était bien avant la géolocalisation et la possibilité pour les entreprises de transport de tracer leurs véhicules en temps réel et de comparer les performances de leurs salariés sur des trajets identiques. Cet exemple me revient souvent à l’esprit, car je pense que les conditions de vie actuelles, l’état de notre civilisation sont tels que nous sommes tous, très souvent, ce chauffeur qui ne s’arrête pas : nous avons à produire (et à consommer) sur un rythme si précis, si soutenu, que l’entraide ou même l’écoute de l’autre seraient une perte de temps. Autrement dit, la solidarité est une victime collatérale de l’accélération ; et l’on deviendrait de droite à travers les multiples conduites qui témoignent qu’on a été gagné par l’individualisme libéral.
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