Si l'évocation de la Révolution française nous ramène d'instinct aux valeurs de liberté et d'égalité qu'elle nous a laissées en héritage, si son souvenir se rattache à l'image de nos grands symboles nationaux et républicains, si la moindre allusion à la Révolution fait toujours surgir quelques clichés dans notre mémoire collective - de la prise de la Bastille au moulin de Valmy, de Louis XVI guillotiné au coup d'Etat de Bonaparte - avouons que les Français connaissent mal cette période, et que le flou l'emporte généralement.
Julie-Victoire Daubié La première bachelière de France.
Gustave Rouland était-il misogyne ? Si l'on regarde quelques-unes des mesures que ce bourgeois d'Yvetot réputé libéral prit, comme ministre de l'Instruction publiques et de Cultes, durant son double passage au gouvernement de l'Empereur Napoléon III - 185-1857 et 1860-1863 -, nul doute que non ! Inventeur visionnaire des bibliothèques scolaires, ne s'est-il pas préoccupé du versement régulier de leur salaire aux institutrices ? N'a-t-il pas souhaiter imposer l'ouverture d'une école de filles dans chaque commune de plus de cinq cents habitants, et d'une école normale d'institutrice par académie ?
Et pourtant, en cet été 1861, il refuse de signer le titre de bachelière à une femme de 37 ans, qui pour la première fois en France a réussi à obtenir le diplôme de baccalauréat ! Son prétexte : ne pas ridiculiser le ministre de l'institution publique
Il faudra à ce ministre récalcitrant l'intervention de l'impératrice Eugenie auprès de son époux, plus ouvert au progrès que Rouland, pour que celui-ci ratifie, au bout de neuf mois, le diplôme de Julie-Victoire Daubié, un second prénom qu'elle peut désormais déployer comme étendard.
Marie Marvingt Marie casse-cou. Qui est cette femme hors du commun, que l'on surnomma Marie casse-cou ou La fiancée du danger ?
Si elle n'est pas né en Lorraine, celle-ci revendique haut et fort que Marie Marvingt, qui a vécu à Metz et surtout à Nancy, est l'une de ces femmes d'exception qui ont marqué son histoire. Marie Marvingt est aussi l'une des premières femmes à pratiquer la bicyclette, avec laquelle elle sillonne les routes de France dès 1889. Depuis Nancy, elle - randonne - jusqu'à Naples, Bordeaux, Toulouse, Milan. Elle atteint l'apogée de la gloire cycliste en 1908 en bouclant le Tour de France, alors interdit aux femmes, suivant les coureurs en décalé 4488 km, 8 cols, 14 étapes, et une moyenne de 150 km par jour, dans des conditions très dures. Le public la considère comme une héroïne ; ce sera sa seule performance de ce niveau, mais elle se déplacera en vélo toute sa vie, accomplissant en moyenne mille kilomètres par an jusque dans sa vieillesse : à 86 ans, elle fera encore Nancy-Paris à bicyclette, au mois de janvier et avec 30 kilos de bagages !
Yvette Pierpaoli La femme aux mille enfants. Le consul de France à Pnom Penh n'en reviens toujours ^pas. C'est la panique dans la ville en ce mois d'avril 1975, quelques jours avant l'arrivée des Khmers rouges. Une femme suivie d'une troupe d'orphelins perdus se présente dans ses bureaux, et exige un passeport pour chaque enfants. Interloqué, le consul lui demande à qui ils sont, et ce qu'elle veut. L'inconnue, une femme pétulante et coriace aux yeux noisette d'à peine quarante ans, lui répond : - À moi, je suis leur mère ! J'ai accouché de plusieurs quadruplés ! - Complice ou dépassé par le tragique de la situation, le consul demande leurs noms. Elle répond : - Lundi, mardi, mercredi, jeudi, vendredi...-
Véridique ou embellie, l'anecdote a été rapportée par l'écrivain anglais John Le Carré, dans son roman Le tunnel aux piogeons. cette femme , qu'il a bien connue, s'appelle Yvette Pierpaoli. Une femme d'exception, née au Ban -Saint-Martin, près de Metz, le 18 mars 1938, et dont la vie, exemplaire, est à la fois une aventure et un roman.
Marthe Cohn Espionne juive dans l'Allemagne nazie. Rattachée aux commandos d'Afrique, elle tente à quatorze reprises, dans des conditions particulièrement difficiles, de pénétrer en Allemagne ; elle y parvient le 11 avril 1945 après avoir été conduite jusqu'à Schffhouse en Suisse : - À l'origine, expliquera-t-elle en 2017 à des élèves de Saint-Gilles-Croix-de-Vie qui l'avaient invitée, je devais franchir le front, mais je n'ai jamais réussi dans cette entreprise. La solution a été de transiter par la Suisse. J'ai quitté une foret et ensuite il fallait traverser un champ. C'était un endroit où il n'y avait pas de barbelés. Au bout du champ il y avait une route. Et là, c'était l'Allemagne. En revanche la frontière était gardée par deux sentinelle. L'une partait de l'est et remontait vers le champ à la rencontre de l'autre qui venait de l'ouest. Apres s'être retrouvée, elles se séparaient, c'est à ce moment qu'il; fallait passer. -
Anne Blanchot Philippi. Le fer au cœur.
Le feu du fer est dans mes yeux
Depuis l'enfance au jour fiévreux
Où je voyais par me fenêtre
Sa flamme naitre et disparaitre
Cent fois sur l'horizon des jours,
Où je voyais jaillir des fours
Et des creuset sa gerbe folle
Qui retombait sur mon école
Et s'accrochait au toit lointain
Comme la traine d'un hennin.
Feu, fer, flamme, fours, creusets. Des mots de Lorraine de l'acier du pays des mines de fer et des coulées de fonte, de cette Lorraine disparue mais dans laquelle ont trempé l'enfance et la plume d'Anne Blanchot Philippi.
Des mots que l'on retrouve dans d'autres de ses plumes, comme Le fondeur - Quand le fondeur, après l'effort - S'abat au fond de l'aciérie...-, Le funiculaire- Funiculaire à minerai - Ton wagonnet se balance... -, Ma terre rouge, sans doute l'un des plus beaux - Terre audunoise d'où je suis - Où s'embrasait hier la nuit... -.
Monique Berlioux La reine du 100 mètres dos. Cette femme, c'est Monique Berlioux, et c'est l'une des grandes personnalités du monde sportif français et international originaires de Lorraine, au même titre que le coureur cycliste Gilbert Bauvin - né à Lunéville -, le perchiste Maurice Houvion - originaire de Saint-Dié-des-Vosges - ou le patron de la Fédération Française de Football Jacques Georges - vosgien de Saint-Maurice-sur Moselle -, sans oublier Michel Platini, qui fait la fierté de la ville de Joeuf. Elle, c'est la natation, mais aussi le Comité International Olympique, le C.I.O., dont elle fut directrice de 1975 à 1985 : une vie totalement consacrée au sport. Monique Berlioux est née à Metz le 22 Décembre 1923.
Lou Albert-Lasard La lumière du camp de Gurs.
Ce n'est pas Auschwitz. Ni Bergen6Belsen ni Maïdanek. Ni un camp d'extermination en Pologne ni un camp de prisonniers en Allemagne. Simplement un camp dit poliment - d'accueil - en France, où au moins de mai 1940 - avant Vichy ! - le gouvernement français - assigne - - traduisons - interne - des milliers de femmes d'origine allemande. C'est le camp de Gurs, à 40 kilomètres au sud de Pau, au pied des Pyrénées. Plus de 7000 femmes y sont enfermées, que l'in surnomme les Gursiennes. Parmi elles,, une peintre messine , Lou Albert- Lasard, et sa fille Ingo.
Si l'honneur peut inspirer l'artiste, Lou en est un émouvant exemple.
Metz, mon navire,
Dans mon délire,
Entre les ponts,
Entre les monts,
Au fond de l'anse
Tu te balances.
Souffle le vent
Sauvagement
Dans la voilure
De ta verdure
Qui claque et bat
Vers ton grand mât
De Saint-Etienne.
Mais elle n'oublie pas ses racines de terre rouge :
Mes jardins sont de terre rouge,
Mes cathédrales sont en fer
Et leurs vitraux de feu qui bouge.
Mes arbres ne sont jamais verts,
Car le pylône est mon érable,
Point ne bourgeonnent ses rameaux.
Ni ces cités usinières du Pays-Haut aux noms en - ange :
Russange, Ottange, Hayange, Algrange,
Rédange, Havange et Volmerange,
Venez qu'on vous aligne un peu...
Avec le temps...
Avec le temps, va, tout s'en va
On oublie le visage et l'on oublie la voix
Le cœur, quand ça bat plus, c'est pas la peine d'aller
Chercher plus loin, faut laisser faire et c'est très bien.