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Citation de Atarah


Atarah
01 décembre 2016
Toute vie a un sens. Mais nous ne le comprenons que le jour où cette vie, soudain, bascule vers son terme comme si un sommet était franchi, alors qu'en fait, de ce jour, la meilleure part de nous même ne bougera plus de ce sommet. Un jour vient où la vie qui jusque-là avançait avec prodigalité sans penser à la mort, et en effet, la mort reculait à mesure dans un lointain indéfini pour laisser à la vie toute la place, sans rien lui disputer, et sans même se donner un nom, un jour vient où la vie, découvrant aux confins la stature immobile de la mort, apprend que chaque instant désormais, s'il n'est pas rempli est un instant perdu, une blessure faîte à la vie et que celle-ci ne pourra plus guérir. Et, paradoxe rendu encore plus tranchant par cette nouvelle lumière, c'est au moment précis où cette vision de notre mort nous enferme en nous-même que naît en nous, pour la première fois, l'autre vision qui nous sort de la mort, à jamais, celle d'une seconde mémoire qui reprend et relie tous les instants de jadis vécus au hasard, brillants ou ternes, pour leur donner rétrospectivement un sens qui ne leur était pas présent quand ils furent vécus, mais dont la nouvelle vie les sacre d'une façon définitive; une seconde mémoire qui n'est plus notre mémoire mortelle mais celui d'un Moi éternel et impassible, généreux et dominateur, qui élève chaque instant hors de sa misère d'instant d'homme dans la gloire des instants du monde. Elle est la mémoire du monde ! Alors dans notre passé et notre avenir tout s'éclaire. Il n'y a jamais de gaspillage dans la vie. Et même le luxe offensant du passé, ses splendeurs et ses vanités folles, et tout le vide des caresses et des fêtes d'une nuit sont les arcanes d'une histoire grandiose….
Ah, mon Père, mon Père, je vois bien où vous m'avez conduit ! Vous avez voulu qu'il y est en moi deux êtres superposés. Les voici. Vous poursuiviez le premier de vos sarcasmes et de votre rire. Il continue à s'agiter dans le temps du monde, avec ses impulsions, ses désirs, son besoin d'être heureux ou malheureux, de choisir et d'être choisi, sa conscience posée sur les choses, loin de lui, et les cinq ou six livres qu'il veut écrire encore, et les femmes innombrables, tant de promesses ! L'autre, immobile comme vous, fondu en vous et vous fondu en lui, ayant déjà écrit tous les livres et aimé toutes les femmes, sa conscience rappelée à soi, centrée sur soi, et ayant jamais multiplié ses puissances, hors du temps, hors de tout… Mais celui là, qui était vous avant d'être moi, comme il vous faisait rire aussi, Père cruel, Père infaillible ! Que la nuit s'épaississe mais que votre rire demeure…
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