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Citation de mimo26


C’était une triste époque à bien des points de vue, les uns compréhensibles, les autres pas. Nous avions à la Maison-Blanche un grand pantin, commandant en chef de tous les combattants de la guerre froide, et les Russes étaient en train de concocter un engin qu’ils enverraient, un mois plus tard, en plein ciel, des steppes poussiéreuses du Kazakhstan. Par ce beau et chaud mercredi du début de septembre, il y a vingt ans de cela, les journaux du matin relayaient en détail les nouvelles de Little Rock, où Orval Faubus s’était enfin décidé à sauter le pas. S’étalant sur quatre colonnes, la manchette, en caractères si grands et si gras qu’ils semblaient crier, surmontait une publicité en pleine page annonçant le jour J pour l’Edsel, que l’on pourrait bientôt voir partout dans les show-rooms des concessionnaires. « Quel vieux débris ! » fit Podjo installé à l’arrière, le Commercial Appeal étalé sur ses cuisses tel un plaid hors de saison. Il parlait de Faubus et non de l’Edsel, mais il devait découvrir par la suite que cela s’appliquait aussi bien à l’un qu’à l’autre.

Ils étaient trois dans la vieille Ford, qui, partis du Delta, remontaient vers le nord sur l’autoroute 61. Le soleil avait d’abord frappé à l’arrière, puis sur leur gauche, par-dessus le fleuve que l’on apercevait parfois au-delà d’une levée. De Bristol à la frontière du Tennessee, il y avait environ deux cents kilomètres de route et de terres cultivées à demi inondées, aux sillons argentés par l’eau qui y stagnait, plats comme la main jusqu’à ce que la voiture attaque la crête de Chickasaw, là où les champs de coton, de maïs et de haricots s’arrêtaient, et Memphis apparaissait. Podjo Harris, qui allait sur ses quarante et un ans, était un type d’aspect robuste, aux cheveux, aux yeux et à l’épaisse moustache noirs, au menton nu comme un talon, au nez imposant. À l’avant, un garçon de vingt-sept ans, Rufus Hutton, et une femme qui pouvait en avoir trente-cinq, Reeny Perdew. Mince et blond, Rufus portait ses cheveux coiffés en queue de canard. Sa bouche était molle, et ses yeux du bleu très pâle des violettes papilionacées, emblème des confédérés.
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