On m'a quelquefois dépeinte comme une femme austère, aigrie et maussade, voire bigote. Mais si j'ai été sévère, je l'ai d'abord été envers moi-même. Et puis, comment conserver fraîcheur, enthousiasme et légèreté quand on a survécu à sa famille, quand on a connu l'exil et un mariage stérile ? On prit mon sens du devoir pour de la froideur, alors que seul m'animait le désir de me protéger de ma redoutable timidité et de la trop vive sensibilité que je m'efforçais de garder en mon for intérieur. Étant donné la rudesse des épreuves traversées, n'était-il point naturel que j'en conservasse des stigmates ?