En réalité, je m'appelle Brice, un prénom que j'ai toujours trouvé précieux et efféminé. Les consonances viriles et abruptes de "Bruce" me séduisirent à l'âge de dix ans, dès ma première lecture d'une bande dessinée célèbre, "Batman", dont le héros, Bruce Wayne, se métamorphosait d'un paisible héritier en une chauve-souris justicière. Ce fut l'affaire d'un changement de syllabe. Trente ans plus tard, il n'y avait plus que mes grandes sœurs pour persister à me donner du "Brice".
La consécration mondiale d'une star hollywoodienne, Bruce Willis, dit en sorte que ce prénom soit enfin prononcé correctement : "brousse", et non "brusse". En revanche, l'allure massive de Willis, ses biceps, sa haute stature et son sourire charmeur m'apprirent à mes dépens que je m'étais désormais encombré du prénom d'un séducteur. Ce qui n'était pas mon cas. Et en prenant de l'âge, cela ne s'arrangeait guère.