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Critiques de Vincent-Mansour Monteil (2)
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Lawrence d'Arabie : le lévrier fatal 1888-1935

Vincent Mansour Monteil (1913-2005) est le mal-aimé des biographes de T.E. Lawrence (dit Lawrence d'Arabie).

Il est souvent regardé comme trop critique à l'endroit de Thomas Edward Lawrence, et il y, à cela, plusieurs raisons.

Sans doute après une lecture passionnée des Sept Piliers de la Sagesse considéra-t-il les choses avec plus de distance, sinon plus de méfiance. Cela se vit surtout en 1973, avec la traduction française par Hélène Houssemaine du livre de l'historien jordanien Suleiman Moussa ou Mousa (1919-2008) : T.E. Lawrence, an Arab view ( qui était paru à Oxford en 1966 et qui devint pour les Éditions Sindbad : Songe et mensonge de Lawrence). Il lui fut demandé un texte pour introduire ce livre dans sa version française, et ce fut : Lawrence vu par les Arabes. Comme Moussa avait écrit son ouvrage en réaction à la sortie sur les écrans du film "Lawrence d'Arabie", de David Lean, en trempant sa plume dans le vitriol, cela déteignit sur Vincent Mansour Monteil qui nous fit comprendre que les Arabes entendaient donner leur point de vue, pour "rétablir la vérité", une vérité qui aurait été contrefaite par Lawrence et les Britanniques, et qui sembla épouser leur manière de voir.

Quand V.M. Monteil publia son : Lawrence d'Arabie, le lévrier fatal (1888-1935) en 1987, un an avant le centenaire de la naissance de Lawrence, ce travail aurait pu pourtant être mieux accueilli, car l'auteur avait tenu compte de parutions antérieures, mieux que ne l'avait fait Jacques Benoist-Méchin dans les rééditions successives de son portrait de Lawrence : il s'appuya, en effet, sur les travaux de John Edward Mack (1929-2004), qui avait laissé un mémorable : A prince of our disorder : the life of T.E. Lawrence en 1976, et sur ceux de Desmond Stewart (1924-1981), qui laissa en 1977 un T.E. Lawrence parfois plus contestable. Il ne dédaigna pas non plus l'ouvrage de Philipp Knightley et Colin Simpson : Les vies secrètes de Lawrence d'Arabie, publié en 1969. Lawrence d'Arabie, le lévrier fatal de V.M. Monteil nous donne, du coup, une vision assez sombre de l'existence de Lawrence, les zones d'ombre étant, aux yeux de l'auteur, plus nombreuses que les traits lumineux. Il ne s'y défend cependant pas d'éprouver un reste de sympathie pour le héros britannique, mais l'on finit par se demander, en lisant ce livre, si Monteil n'éprouvait pas une pointe de jalousie à l'égard de Lawrence. Il aurait probablement bien aimé être le Lawrence d'Arabie français, lui qui s'intéressa aux affaires marocaines, tunisiennes, palestiniennes et iraniennes, et qui fut, c'est incontestable, un éminent orientaliste, dans la lignée de Louis Massignon, dont il fut l'ami à partir de 1938. Toujours est-il que son livre sur Lawrence a moins marqué que ceux de Jean Béraud Villars, de Jacques Benoist-Méchin ou de Maurice Larès.



François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010)
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Les Musulmans soviétiques

Au nom de Dieu, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux,



Voici une lecture qui m'a pris beaucoup de temps, mais qui fut très instructive : « Les Musulmans soviétiques » du célèbre orientaliste converti à l'islam, Vincent, dit Mansour, Monteil, aux éditions du Seuil. 



Ce livre date du début des années 1980, et il est une édition augmentée et corrigée de la première publication datant des années 1950. L'auteur est un célèbre orientaliste français, grand savant des cultures et peuples musulmans, africains et asiatiques. Grand voyageur et polyglotte, il finira par se convertir à l'islam en 1977 en Mauritanie. 



Cet ouvrage est une étude complète et globale des populations musulmanes vivant sous domination soviétique, qu'il découvrira durant deux voyages, et beaucoup de rencontres. Pour dresser un premier cadre et comprendre de quoi parle-t-on, ces populations représentent actuellement les territoires d'Asie Centrale, du Caucase du Nord et de la Crimée. Le Tatarstan, la Bachkirie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan, l'Ouzbékistan, le Turkménistan, le Daghestan, la Tchétchénie, l'Ingouchie et d'autres régions et états, qui sont de nos jours indépendants ou membres de la fédération de Russie. 

Toutes ces populations turcophones (parfois persanophones) vivent dans cette Asie Centrale surnommée le Turkestan, qui fut un haut lieu de l'âge d'or islamique, puis qui fut colonisé par l'Empire de Russie tsariste au 18ème/19ème siècle, puis avec la révolution bolchévique de 1917 devint l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS). 



Le communisme, idéologie d'État, athée et de tendance antireligieuse (avec la célèbre formule de Marx assimilant la religion à l'opium du peuple), devint loi en terres d'islam. Vincent Monteil vient ici nous raconter ces peuples, leur histoire, leur lutte contre l'oppression et leurs quotidiens sous les Soviets. 



Ce livre est un panorama descriptif complet de tous ces peuples. Nous découvrons ces différentes populations réparties sur un espace immense, avec plusieurs perspectives. Une perspective numérique et géographique : les recensements, le nombre de musulmans, les lieux de vie et territoires concernés. Une perspective historique, avec l'histoire de ces peuples musulmans sous la domination des Tsars de Russie pré-soviétique, que la presse soviétique appellera plus tard « la prison des peuples ». On y découvre les mouvements de lutte et de libérations islamiques, les guerres, les sociétés de l'époque, les différentes classes sociales musulmanes et leurs travaux intellectuels. 



Avec la Révolution bolchévique, c'est le rapport du communisme de Lénine aux populations musulmanes dites « nationales » qui est abordé. On suit la vision qu'ont Lénine et Staline, du nationalisme, de la question des « nationalités » sur un immense territoire comme celui de l'URSS. La question de l'ethnicité, de l'appartenance nationale (avec l'exemple extrêmement intéressant de la place des juifs dans la vision léniniste et staliniste), mais aussi et surtout de l'organisation politique de cet État soviétique, et de ses conséquences en terres d'Islam.

De plus, la perspective linguistique est de même analysé : la russification et la relation entre les langues des populations musulmanes et le russe, le bilinguisme, l'enseignement, les différents alphabets (arabe, latin ou cyrillique), et la place des différentes langues dans le système soviétique, jusqu'à même la compréhension de l'orthographe des noms ! 



L'ouvrage continue en expliquant et racontant les cultures locales, d'Almaty à Tachkent en passant par Bakou, Grozny et Boukhara jusqu'à Kazan, toutes ces populations, ayant des coutumes proches tout en restant différentes. Les modes de vie, les mœurs, les relations entre Russes et autochtones musulmans, qu'ils soient Ouzbeks, Tajiks, Kazakh, Turkmènes ou encore Tchétchènes. Vincent Monteil explique d'une manière exhaustive et détaillée pour mieux comprendre ces peuples.



L'aspect économique des territoires musulmans soviétiques est abordé, avec les immenses richesses et ressources ainsi que la main-d'œuvre abondante que fournissent les musulmans soviétiques. Il est intéressant d'avoir un aspect économique sur ces populations musulmanes, pour voir le rendement financier de ces terres pour l'URSS. 



L'auteur aborde ensuite l'aspect idéologique. Comment les populations musulmanes dans leur diversité vivent le communisme ? Comment y ont-ils réagi ? Il s'intéresse donc à un aspect intellectuel qui m'a réellement passionné (notamment au sujet de Sultan Galiev, et du panislamisme), des tendances entre communisme athée antireligieux, socialisme islamique, panislamisme et panturquisme. Le socialisme islamique, la place du communisme dans la psyché collective musulmane et même la place des religieux musulmans, de leur influence au sein de la population sont abordés. L'islam confrérique aussi est expliqué, et son influence profonde et clandestine au sein des masses musulmanes est particulièrement intéressante. Monteil, raconte aussi la formation des imams en cette contrée, leur connaissance de l'islam et de la langue arabe et le fait que l'islam a vécu un recul dans la pratique et parfois dans la croyance, mais pas dans la conscience collective. 





Ce n'est qu'un petit aperçu du contenu de cet ouvrage, en réalité, il est bien plus riche, et il serait trop long de détailler ici chaque élément analysé et raconté par ce livre. De la place de la femme aux structures familiales jusqu'à l'analyse des pays frontaliers, tout est expliqué, analysé, mêlant sources académiques, journalistiques et des expériences personnelles de terrain. 



C'est un livre très riche et très dense, qui est excellent pour découvrir l'histoire de musulmans d'Asie centrale et du Caucase, ainsi que comprendre leur situation sous la domination soviétique. 



Sa densité peut parfois le rendre indigeste, surtout si la partie en cours de lecture n'intéresse pas particulièrement. Néanmoins, Monteil, qu'ALlah lui fasse miséricorde, a su produire un livre riche en informations, tout en n'étant pas trop long, et avec d'excellentes sources. L'auteur (malgré quelques grosses exceptions), reste plus ou moins neutre et objectif, dans l'analyse et l'explication de certains éléments. 



Un excellent livre pour comprendre l'Asie centrale du siècle dernier, écrit par un auteur érudit au parcours riche, que je ne peux que conseiller pour qui s'intéresse aux peuples musulmans d'Asie centrale et à leur culture et patrimoine riches.  



Qu'ALlah fasse Miséricorde à ce grand érudit, Vincent Mansour Monteil.
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