Le choucas
Il y a un oiseau qui, par son pelage
et par l'enrouement de sa note,
pourrait passer pour un corbeau ;
Grand habitué de l'église,
Où, tel un évêque, il trouve un perchoir,
Et aussi un dortoir.
Au-dessus du clocher brille une plaque,
Qui tourne et tourne, pour indiquer
De quel point souffle le temps.
Levez les yeux -- votre cerveau se met à nager, c'est
dans les nuages -- cela lui fait plaisir,
Il le choisit plutôt.
Aimant la hauteur spéculative
,
C'est là qu'il vole son vol aérien, Et de là voit en toute sécurité
L'agitation et le spectacle rare,
Qui occupent l'humanité en bas, En
sécurité et à son aise.
Vous pensez, sans aucun doute, il s'assoit et réfléchit
Sur les futurs os cassés et contusions,
S'il devait tomber.
Non; pas une seule pensée comme celle-là
n'emploie sa pensée philosophique,
ni ne la trouble du tout.
Il voit que ce grand rond-point,
Le monde, avec toute sa débâcle bigarrée,
Église, armée, physique, loi,
Ses coutumes et ses affaires,
Ne le regarde pas du tout,
Et dit : que dit-il ? -- Caw.
Oiseau trois fois heureux ! Moi aussi j'ai vu
Beaucoup des vanités des hommes ;
Et, las de les avoir vus,
Ces membres se résigneraient gaiement
Pour une paire d'ailes comme la tienne
Et une telle tête entre eux.