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Citation de Jcequejelis


Préface à l'édition de 1921

J’ai été sur le point de supprimer les pages qui servent d’Introduction à la première édition de ce livre. Je les jugeais, - je les juge encore, - d’une philosophie puérile, sentimentale, larmoyante, obscure et mal écrites par surcroît. J’y ai renoncé. Après tout, elles représentent une minute de moi-même. Et puisque j’ai tenté d’exprimer cette minute, elle ne m’appartient plus.

Peut-être devrait-on écrire les ouvrages qui comportent plusieurs volumes en quelques mois, leur documentation une fois achevée et les idées qu’ils représentent mises tout à fait au point. L’unité de l’œuvre y gagnerait. Mais l’ensemble de l’effort de l’ouvrier y perdrait sans doute. Toutes les fois qu’il croit s’être trompé, un désir vivant s’éveille en lui, qui le pousse à de nouvelles créations. Au fond, tout écrivain n’écrit qu’un livre, tout peintre ne peint qu’un tableau. Chaque oeuvre nouvelle est destinée, dans l’esprit de son auteur, à corriger la précédente, à achever une pensée qui ne s’achèvera pas. Il refait sans cesse son travail, en le modifiant sur les points qui, dans le travail antérieur, ne rendaient qu’imparfaitement sa sensation ou sa pensée. Quand l’homme s’interroge et s’efforce, il ne change pas vraiment. Il ne fait qu’écarter de sa nature ce qui est étranger à sa nature, et en approfondir ce qui lui appartient. Ceux qui brûlent leur oeuvre avant qu’on ne la connaisse parce qu’elle ne les satisfait plus, passent pour être doués d’un grand courage. Je me demande s’il n’y a pas plus de courage à consentir à n’avoir pas toujours été ce que l’on est devenu, à devenir ce que l’on n’est pas encore, et à laisser la vie aux témoignages matériels irréfutables des variations de son esprit.

399 - [Le Livre de Poche n°1928, p. 25]
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