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Critique de aurore022


Le désarroi lepeniste de Sylviane Agacinski

Finalement, on ne lit que pour se rassurer. A force de ne pas apprendre la pudeur, j'ai littéralement épanché mes états d'âme sur Internet. Alors qu'en réalité, l'exercice le plus difficile est d'évoquer ce qu'on lit car l'interprétation de nos lectures révèle beaucoup de nous. Ma première chronique littéraire sera donc axée – il n'existe que des « hasards objectifs » dans l'existence comme disait André Breton – sur un journal … intime.


Une des plus grandes intellectuelles féministes contemporaines s'appelle Sylviane Agacinski. Elle a théorisé les points communs et les différences entre les sexes, notamment dans son ouvrage « le drame des sexes » (Seuil, 2008). Farouchement opposé à la GPA, son dernier essai est paru chez Gallimard sous le titre : « L'homme désincarné. du corps charnel au corps fabriqué » (2019). Avec un intérêt presque enfantin, hier, j'ai découvert dans une librairie bruxelloise « à l'ancienne », son livre « Journal interrompu - 24 janvier – 25 mai 2002 » (Seuil).


Se dévoiler pour Sylviane Agacinski passe d'office, en 2002, par l'affirmation médiatique du couple qu'elle forme avec Lionel Jospin. Ce dernier était le candidat socialiste aux élections présidentielles françaises. Agacinski a d'abord écrit ce journal pour se déverser dans un moment où elle n'avait qu'émotions et réflexions en elle sans pouvoir sortir d'une logique narcissique, certes mais avant tout intellectuelle.


A priori, là où on attend d'un journal intime des phrases lapidaires évoquant les tracas du quotidien, on sent dans ce « Journal Interrompu » que la philosophe ne cesse jamais de penser ; cela se traduit dès les premières phrases par des interrogations sur le temps …


«Je ne suis aujourd'hui d'humeur à rien. Ni à parler du temps, ni à parler d'autre chose. (…) j'ai envie de confier à ma machine l'expression de mon désarroi présent »



La question du rapport entre les hommes et les femmes l'habite : elle insiste sur les différences biologiques entre eux sans nier les discriminations et les violences faites aux femmes. Et là où Mark Lilla a théorisé l'avènement de la gauche identitaire, Agacinski citait, dès les présidentielles de 2002, Marcel Gauchet sur la « déferlante individualiste » à l'opposé de la souveraineté des citoyens, de la majorité et non des minorités.


Avec un style quelque peu ampoulé, parfois, Agacinski se plaint du superficiel de la présence des caméras et des appareils photos durant cette campagne électorale. Néanmoins, le style est lyrique, le fond finement intelligent.


Pourquoi un journal « interrompu » ? Car, nous connaissons la fin : le Pen passe au second tour de l'élection présidentielle le 21 avril 2002 et Agacinski est effarée : la multiplicité des candidats à gauche, la passivité des sociaux-démocrates ont eu raison de Lionel Jospin. Mais pas de la plume et de la vivacité d'esprit de sa compagne ! Assurément, elle n'est pas « la femme » de ….

Aurore van Opstal
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