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Critique de JIEMDE


Les rentrées littéraires se suivent… et ne se ressemblent pas ! Tant mieux. Car autant celle de l'automne dernier fut globalement décevante, autant mes premières lectures de cette rentrée dite « d'hiver » sont assez enthousiasmantes.

Et dans le lot, L'Enfant rivière d'Isabelle Amonou fait figure de jolie découverte. D'abord parce qu'il nous emmène dans la banlieue d'Ottawa, sur les rives de la rivière des Outaouais qui sépare le Québec de l'Ontario, et bien plus : deux histoires, deux cultures, deux religions, et beaucoup de blessures.

Des blessures, Zoé n'en manque pas, d'aucuns diraient même qu'elle les collectionne : abusée petite par son père, mère dépressive, soeur alcoolique, mariage brisé avec Tom après que leur enfant, Nathan, ait échappé un instant à leur surveillance et se soit noyé.

« Zoé et lui n'avaient pas partagé la souffrance, ils se l'étaient renvoyée ».

Zoé aurait pu sombrer, Zoé aurait dû sombrer. Sauf que Zoé est persuadée que Nathan est toujours vivant, et elle le cherche inlassablement depuis six ans, dans les marécages et bois de la marina de Gatineau, où comme ailleurs le chaos s'est installé.

Car Isabelle Amonou place son intrigue autour de 2030, alors que le changement climatique longtemps annoncé fait désormais des ravages. Il pousse la population des États-Unis à fuir le pays pour se réfugier au Canada, tandis que les Canadiens cherchent à se protéger de ces néo-migrants en les parquant et en érigeant un mur. En Alaska…

« On a fait partie de l'État le plus puissant du monde, America First et toutes ces conneries, et voilà comment on va finir, dans des bidonvilles ».

Dans ce récit choral des retrouvailles entre Tom, de retour au pays et Zoé, devenue chasseresse, Isabelle Amonou réussit à déployer sa trame noire sans faiblir, dans une ambiance d'anticipation d'un chaos annoncé qui – heureusement – ne sombre jamais dans la dystopie.

Si j'ai parfois regretté un accompagnement trop important du lecteur dans sa compréhension du livre, c'est un bien faible regret comparé à l'habileté de l'auteure à insérer une réflexion profonde sur l'identité autochtone - ses travers passés comme sa réalité d'aujourd'hui –, sur la responsabilité et sur la résilience.

Reste au final un livre prenant, doublé d'un joli portrait de femme en constante interrogation, saisie à un point de bascule de son existence. Et une auteure qui, s'évadant du polar le temps d'une résidence révélatrice, promet beaucoup dans le noir…
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