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Critique de Henri-l-oiseleur



Après la présentation remarquable du livre par l'éditeur sur la fiche de Babelio, il est bien difficile d'ajouter une note de lecture pertinente. Commençons toutefois par rappeler que le mot "constitution" employé dans le titre n'est pas à prendre au sens moderne, étroit, de document écrit fixant les règles de la vie politique d'une communauté humaine. "Constitution", ici, sera plutôt synonyme de "institutions", au sens large, ou encore, de "régime", et de pratiques diverses de la citoyenneté. Ce qui frappe en effet, c'est que le citoyen de la démocratie, ou même de l'oligarchie, athéniennes, n'a rien à voir avec nous, sujets passifs qui votons à date fixe pour des représentants à qui nous signons un chèque en blanc, avant de retourner à notre inactivité. Non, le citoyen athénien a d'autant plus de devoirs politiques que le régime est plus démocratique : on apprend donc ici (ou bien, ce livre nous rappelle) que la vie démocratique exige du citoyen un engagement politique de tous les instants, et un sens du devoir envers la communauté que nous n'avons pas. Montesquieu rappelle à juste titre dans L'Esprit des Lois que la démocratie exige des gens la vertu, la responsabilité, le sens du devoir. On est impressionné, en lisant le texte d'Aristote, par la quantité de charges qui pèsent sur le citoyen, et sur lui seul. Loin d'être des privilèges réservés aux autochtones de sexe masculin (d'où les sottes accusations modernes de racisme, de machisme etc), ces contraintes de la vie démocratique sont nombreuses et rendent l'apolitisme impossible, sauf en régime tyrannique.

D'autre part, ce livre est étonnant car il ne se borne pas à décrire le fonctionnement des institutions athéniennes, mais les situe dans une évolution et une longue durée. Aristote fait oeuvre d'historien et n'hésite pas à inclure des documents et textes authentiques, et à expliquer par des rapports sociaux, voire des luttes de classe, les différents régimes qui se sont succédé à Athènes des origines à 322 av. J.-C. A ce titre, son analyse des réformes de Solon, puis de la tyrannie de Pisistrate, est remarquable, entre autres qualités et pour ne parler que des figures politiques les plus connues. On voit à l'oeuvre dans ce texte une méthode d'enquête et de description qui étonnera le profane par sa rigueur.

C'est à l'occasion d'une version grecque tirée de ce livre, que ma curiosité a été éveillée. La langue (quand on choisit une édition bilingue, soit dans la Collection des Universités de France, soit en poche) est d'une grande clarté, et permet aux hellénistes amateurs, très, trop amateurs, dans mon genre, de reconnaître dans le texte grec ce qu'ils ont lu dans la traduction, et de comprendre la construction des phrases. Ce n'est pas un petit plaisir.

Quant à l'actualité de ce genre de lecture, je crois qu'elle va de soi. Les médias bruissent de vains débats sur l'état de "notre démocratie".Aristote nous fournit l'occasion d'y réfléchir un peu plus à loisir.
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