AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de NMTB


NMTB
14 février 2018
Petite précision : j'ai lu une édition de 1754, trouvée sur Gallica, et qui n'est pas claire (à éviter). Des « Remarques » ont été insérées par un tiers dans le corps du texte d'origine, elles allongent beaucoup le livre. Je ne sais même pas qui en est l'auteur. La citation que j'ai laissée sur Babelio en est tirée, j'ai scrupuleusement retranscris l'orthographe pour montrer que ce mystérieux auteur cherchait à la réformer, à la simplifier, pour la rendre plus adaptée au langage parlé.
En matière de grammaire, il y a les insupportables donneurs de leçons qui passent leurs temps à couper la parole pour signaler les fautes, des fous de la règle, pourrait-on dire. Apparemment le contraire de notre réformateur de 1754 qui voudrait inventer d'autres règles, mais ces gens-là sont en fin de compte de la même espèce, des gens d'opinions. C'est très bien les opinions, je suis ravi d'en connaître toutes sortes, ça permet de se poser des questions. Et puis, elles ont cet autre avantage de mettre en lumière, par contraste, la vérité, ou du moins sa recherche.
Les auteurs de cette grammaire de Port-Royal, M. Arnauld et M. Lancelot, sont des chercheurs de vérité, pas des donneurs de leçon. Ils n'ont pas écrit un manuel, mais un ouvrage quasiment linguistique pour découvrir et expliquer les lois qui régissent spontanément les langues, avec leurs fameuses exceptions et les évolutions d'une langue vivante. Voilà ce qu'en disent précisément MM. de Port-Royal : « Or, c'est une maxime que ceux qui travaillent sur une Langue vivante doivent toujours avoir devant les yeux, que les façons de parler qui sont autorisées par un usage général et non contesté, doivent passer pour bonnes, encore qu'elles soient contraires aux règles et à l'analogie de la Langue ; mais qu'on ne doit pas les alléguer pour faire douter des règles et troubler l'analogie, ni pour autoriser par conséquence d'autres façons de parler que l'usage n'aurait pas autorisées. Autrement, qui ne s'arrêtera qu'aux bizarreries de l'usage, sans observer cette maxime, fera qu'une langue demeurera toujours incertaine, et que n'ayant aucuns principes, elle ne pourra jamais se fixer. »
La fixité d'une langue passe par des règles établies consciemment, comme l'ont fait les écrivains français autour de 1600, sans cela nous aurions autant de peine à déchiffrer leurs livres que ceux écrits en langue d'Oïl quatre siècles auparavant. Si nous entendons encore parfaitement Racine et Pascal aujourd'hui, des élèves de Port-Royal, c'est parce que leurs aînés ont cherché des règles de grammaire. Ils ne les ont pas inventées, ils les ont fixées.
C'est une grammaire générale, beaucoup de comparaisons sont faites avec d'autres langues. Dans la première partie, il est rapidement question de la formation des mots. La parole est définie comme signes de la pensée et l'écriture comme signes de cette parole. Dans la seconde partie il est plus précisément question de ce qu'on appelle aujourd'hui la grammaire avec une analyse des noms, des pronoms, des adjectifs, des genres, du singulier et du plurier, etc. Oui, « plurier », c'est comme ça qu'ils disaient à l'époque, pourquoi dit-on « pluriel » aujourd'hui ? Mystère, auquel ne répond pas ce livre, mais il répond à des tas d'autres questions, sur des détails bien sûr, des éléments de langage qu'on utilise tous les jours sans s'en apercevoir.
Sur la théorie, ce qui m'a le plus interpellé, c'est l'analyse du verbe. Dans une analogie avec la logique il est considéré essentiellement comme « un mot qui signifie l'affirmation ». le verbe être est purement le verbe de l'affirmation, il correspond à la faculté de juger dans la logique. Mais tous les verbes, débarrassés de leurs attributs, servent essentiellement dans la phrase à affirmer. C'est intéressant au point de vue du fonctionnement de l'esprit humain. Pour faire un raccourci, verbaliser ce serait affirmer et donc signifier son jugement. Au commencement était le Verbe…
Commenter  J’apprécie          32



Ont apprécié cette critique (2)voir plus




{* *}